Le cinéaste islandais signe un film de vengeance qui devient aussi un film de rédemption, porté par une photographie splendide.
C’est une maison qui ressemble à un petit entrepôt ou peut-être à une serre, perdue dans la campagne islandaise. Au loin, toujours filmée du même angle, nous l’observons. À l’image, les saisons défilent, les couleurs du ciel et de la terre mutent, la maison, elle, reste immobile.
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Un jour, l’endroit que l’on pensait vide est visité puis retapé par un homme (incroyable acteur Ingvar Eggert Sigurðsson). Ingimundur a décidé de tout reprendre, de tout refaire pour installer sa famille : sa fille et son mari et surtout son adorée petite fille, avec qui il passe la majorité de son temps.
Dès les premières minutes de A White, White Day, deuxième long métrage d’Hlynur Pálmason présenté à la Semaine de la critique, on reconnaît la précision quasi chirurgicale du cadre, l’attention photographique accordée au lieu, et cette cinégénie bizarre (le blanc épais du brouillard), qui imbibaient chaque plan de Winter Brothers, son premier film. Mais alors que ce coup d’essai prometteur, sorti en salle l’an passé, laissait exprimer les appétences très arty d’un cinéaste-plasticien, A White, White Day, semble lui se détacher d’un trop grand souci esthétique.
Vers la rédemption
Film de “vengeance”, si l’on en croit son synopsis, A White, White Day suit en effet la quête de ce père et grand-père aimant, commissaire de police en congé et veuf depuis peu. Il veut en apprendre davantage sur sa femme tant aimée, qu’il soupçonnait de tromperie. La vengeance va se révéler comme un chemin rédempteur, une thérapie mêlée de colère et de violence, et conduire à la guérison d’Ingimundur. Elle est le petit moteur du film, qui permet au personnage de changer.
À côté de cette traque paranoïaque, c’est le quotidien d’un homme endeuillé, sa relation privilégiée à l’adorable tête blonde de 13 ans (géniale scène de l’histoire racontée au lit de la petite malade) que saisit Hlynur Pálmason avec une infinie tendresse et pudeur. C’est aussi et surtout un microcosme arrêté dans le grand monde en mouvement, comme cette maison insensible aux changements du temps des premières images, que le cinéaste donne à voir : un deuil, cet espace ralenti, comme gelé dans la glace.
“Vous arrive-t-il de pleurer ?”, demande le médecin à Ingimundur, qui, enragé par la question insensée, détruit le bureau de l’homme en blouse blanche. Les sanglots et les plaintes sont inutiles, le temps file et les enfants grandissent. Alors que l’on pouvait craindre une conclusion tragique et un brin sadique, A White, White Day a, dans une dernière séquence de retrouvailles fantomatiques bouleversantes, la beauté et l’élégance d’offrir un peu de paix à son personnage blessé.
A White, White day de Hlynur Pálmason avec Ingvar Eggert Sigurðsson, Ída Mekkín Hlynsdóttir (Islande, Danemark, Suède, 2019, 1h49)
Semaine de la critique, date de sortie inconnue
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