Olivier Mellano, Brendan Perry et le Bagad’ Cesson proposent des sons celtes flirtant avec la musique contemporaine, la soul solide de Sharon Jones avec un album posthume, et de la soul encore avec la grande Mavis Staples. Le Français Flóp est, lui, tout cool, et Midget !, avec ses chansons indescriptibles, invite à ne rien faire.
Ce disque, il fallait en parler juste pour placer le jeu de mots qui décrit son genre musical hybride : la biniou-wave. Et puis on l’a écouté, ce disque, et du coup on peut même en parler parce qu’il est bon. Ce disque, c’est celui de l’in(c)lassable musicien Olivier Mellano, avec au chant Brendan Perry (Dead Can Dance) et la trentaine de musiciens et choristes du Bagad’ Cesson de Cesson-Sévigné (dans le 35). Cet album-projet, No Land, c’est un seul puissant morceau de 40 minutes, à la frontière des sons celtes et de la musique contemporaine. Une musique comme un paysage sauvage, qu’arpente et découvre la voix virile de Brendan Perry. La rando revigorante de la semaine, à poursuivre le 25 novembre à Cesson-Sévigné pour le concert de sortie de l’album.
Elle ne viendra plus jamais en concert faire perdre des litres de sueur à ses fans : Sharon Jones est décédée le 18 novembre 2016, mais la veillée commémorative s’annonce dansante et joyeuse, avec la sortie d’un ultime album posthume, Soul of a Woman, enregistré avec les fameux et fidèles Dap-Kings alors qu’elle luttait contre le cancer. Soul solide, ballades à violons et cette voix de reine de la soul éraillée : ce disque est une victoire.
Toujours au rayon soul women, et au rayon de soleil, le nouvel album de Mavis Staples, 78 ans, est une bénédiction. Enregistré avec Jeff Tweedy, If All I Was Was Black est la première œuvre de Mavis Staples sans reprises. Uniquement des chansons originales, et un groove cool imparable, pour dresser un état des lieux de l’Amérique contemporaine, lancer un manifeste anti-Trump et plus encore inonder le monde de messages d’amour lancés d’une voix tendre et râpeuse. Mavis Staples, trésor de l’humanité.
Retour en France. Le troisième morceau du nouvel album de Flóp s’appelle Quelque chose. Et le suivant, Autre chose. Patron du discret bien qu’excellent label Les Disques Bien, Flóp passait jusqu’alors pour une sorte de chanteur brésilien qui ne parlerait que le français et ne serait jamais sorti de sa chambre de bonne à Paris. Un doux rêveur désinvolte et dégagé. Sur cet album réalisé avec le guitariste-cycliste Seb Martel, Flóp commence par des chansons un peu country rockab’, avant de calmer les chevaux et de retrouver la position allongée pour des rêveries décroissantes au-dessus des genres. “Plus tu bouges et plus tu t’enfonces”, chante-t-il sur Sables mouvants. Cette chanson n’a l’air de rien, mais elle est du côté du vrai et du bien.
En France toujours, il y avait la chanson réaliste, et puis la chanson surréaliste, dont un nouveau mystère charmant éclot sur l’album de Midget ! (le duo Mocke-Claire Vallier). D’abord, ce titre, le plus beau de l’année : Ferme tes jolis cieux. Et ouvre grand tes oreilles, pour accueillir les aquarelles opalescentes et psychédéliques de Midget !. Ces sept compositions si difficiles à décrire, si bonnes à écouter, c’est de l’art qui se dilate, de la musique de chambre à air ou d’aquarium sans parois. Une échappée flottante hors des formats de la chanson, entre l’éther et les profondeurs. Le seul reproche que le critique musical de profession puisse faire à cet album de rêve, c’est qu’il ne donne aucune envie d’écrire, de travailler, de produire, de passer ses heures devant un écran d’ordinateur. D’ailleurs, j’arrête.