Une vidéo accable l’enseignant, devenu influent depuis sa critique du Traité constitutionnel européen en 2005, et pris pour modèle par certains Gilets jaunes en raison de son militantisme pour le référendum d’initiative citoyenne.
Etienne Chouard divise beaucoup dans les réseaux militants de gauche. Et ce n’est pas cette vidéo qui va l’aider à refaire consensus. Il y a quelques jours, le site Egalité & Réconciliation (fondé par l’idéologue d’extrême droite antisémite Alain Soral) a exhumé une interview que l’enseignant et blogueur a donnée à Sud Radio le 18 avril dernier. Interrogé par Elisabeth Lévy, directrice de la rédaction du magazine Causeur, Chouard se pose en défenseur de la liberté d’expression, mais en atteignant un point clairement limite (à partir de 29 minutes dans la vidéo ci-dessous).
“Même si j’étais antisémite, je devrais avoir le droit d’être antisémite”
Check News (le site de fact-checking de Libération) a publié un verbatim de l’interview. Il n’en faut pas plus pour prouver que le militant du Référendum d’initiative citoyenne (RIC), très populaire parmi les Gilets jaunes, flirte avec la ligne rouge. Il déclare ainsi qu’il “devrait avoir le droit d’être antisémite”. Pour comprendre cette citation, voici son contexte plus général : “Vous trouvez que la liberté de ne pas aimer une religion est très importante. Mais quand BHL me traite d’antisémite – même si j’étais antisémite, ce qui n’est évidemment pas le cas… Mais même si j’étais antisémite, je devrais avoir le droit d’être antisémite. De la même manière que je devrais avoir le droit d’être islamophobe, ou christianophobe…”, déclare Etienne Chouard.
Elisabeth Lévy le relance sur ce point : “…Ce qu’on appelle l’antisémitisme, ce n’est pas la critique du judaïsme, c’est la haine des juifs.” Il répond, imperturbable : “Personne n’a de haine des juifs. Vous en connaissez beaucoup sérieusement ?” Il répète encore, alors que la journaliste n’en revient pas : “Dans les gens que je connais, et j’en connais beaucoup des jeunes, j’ai des classes moi-même, ça fait trente-cinq ans que j’ai des classes, et il n’y a pas de haine des juifs.”
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Il voyait en Alain Soral “un résistant”
Etienne Chouard conclut en donnant sa définition de la démocratie : “Un régime qui nous oblige à discuter parce qu’on n’a pas envie de se tuer. Un régime qui nous oblige à discuter de tout, et surtout avec les gens que l’on trouve dangereux, ou méprisables”. Ce n’est pas la première fois que l’ouverture extrême du débat conduit Etienne Chouard sur un terrain très glissant. En 2014, il avait qualifié Alain Soral de “résistant” : “Pour moi, Alain Soral est à gauche parce qu’il se bat contre les privilèges. C’est un résistant.”
Depuis de longues années, cela ne l’empêche pas d’être très soutenu sur internet, notamment par ceux qui voient en lui un guide spirituel, et qu’il nomme les « gentils virus ». La mobilisation des Gilets jaunes a été l’occasion pour lui de se refaire une virginité idéologique – au point que François Ruffin lui a rendu hommage en décembre 2018, même s’il a souligné qu’il avait des désaccords avec lui. Mais ses vieux démons ne l’ont semble-t-il jamais quitté.