Des icônes du rock au féminin, l’épopée du rap français et de la soul étasunienne, un jazzman camé, un Dylan mythifié, une quête de son en Afrique, Leonard Cohen, un New York arty et ravagé… et plus encore en 10 documentaires essentiels à (re) voir en streaming.
#OnResteOuvert : Fermons nos portes, pas nos esprits !
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“Rolling Thunder Revue, a Bob Dylan Story by Martin Scorse”, 2019 (sur Netflix)
“Dylan serait-il devenu un personnage scorsesien ?”, demandait Thierry Jousse dans les pages des Inrockuptibles lors de la sortie de Rolling Thunder Revue, a Bob Dylan Story, mis en scène et assemblé par le réalisateur de Taxi Driver. Une chose est certaine, ces deux-là ont le sens de la manigance et de la mystification, tant ce film, constitué d’images d’archives datant de la tournée 75 du Zim, tord le cou aux grands récits hagiographiques hollywoodiens, en leur substituant une autre réalité plus cosmique.
La galerie de protagonistes réels qui s’y télescopent (Allen Ginsberg, Patti Smith, Joan Baez, Joni Mitchell), en côtoie d’autres, imaginaires, dans une grande épopée à redécouvrir à l’aune de la sortie récente de Murder Most Foul, grande fresque de 15 minutes en forme de requiem pour le XXe siècle dévoilée par Dylan le mois dernier.
“Wattstax” de Mel Stuart, 1973 (sur YouTube)
Quatre ans que Martin Luther King a été assassiné, sept ans que les émeutes de Watts, quartier de Los Angeles, ont éclaté suite à une énième violence policière. Déjà, en 1965, une forme de Black Lives Matter. En 1972, Stax Records réunit ses plus grandes stars pour une immense fête commémorative : à l’affiche, Isaac Hayes, Rufus Thomas, les Staple Singers, The Bar-Kays.
Sans négliger l’immense dimension politique de l’événement, Wattstax est surtout un concentré de groove où la soul music passe le relais au funk en construction et un témoignage unique sur une autre nation en formation pour l’émancipation. Avec deux recommandations particulières : le Do the Funky Children de Rufus Thomas et Isaac Hayes sublimant son Theme from Shaft.
“French Game – une histoire du rap français” de Jean-François Tatin, 2019 (sur Arte TV)
Dévoilée l’année dernière sur le site de la chaîne Arte, cette série documentaire en onze actes (sous la forme de capsules de 5 à 8 minutes) retrace l’histoire du rap français, des premiers coups de semonce de NTM jusqu’aux errances autotunées des frangins de PNL.
Réalisée par Jean-François Tatin et écrite par Azzedine Fall et Guillaume Fédoux, French Game – une histoire du rap français se mate comme on écoute une playlist idéale (chaque épisode porte le nom d’un titre iconique du rap made in France), façon de retracer les grands chapitres de cette épopée moderne, qui commence mine de rien à prendre de la bouteille. Au programme : le Bouge de là, de Solaar, la filiation new-yorkaise du rap marseillais, B2O, le temps des collectifs, Gynéco, Casey, TTC et toute la clique. “Allez les jeunes !”, comme disent les JT à l’époque.
>> A lire aussi : NTM : le biopic sur Kool Shen et JoeyStarr a trouvé ses acteurs
https://www.youtube.com/watch?v=IhYxDwLzEMw
“Let’s Get Lost” de Bruce Weber, 1 (dispo sur YouTube)
Il n’y a pas grand-chose à ajouter au titre de ce documentaire consacré à Chet Baker et sorti l’année de sa mort. Un visage parcheminé, ravagé ; une voix brisée et, pourtant, par éclairs, intacte, un trompettiste à bout de souffle qui trouve au plus profond de lui-même la grâce.
Dans un noir et blanc hors d’âge, Bruce Weber filme the rise and the fall de Chet Baker, clochard céleste comme le fut son équivalent rock Vince Taylor, comme lui échoué à Paris, SDF cramé et ravagé. Let’s Get Lost est un formidable document, parfaitement maîtrisé, qui témoigne d’un génie à l’œuvre au pire de son meilleur. Un film, aussi, d’une humanité rare sur une dérive incompréhensible qui rend hommage à un destin qui mérite d’être revu.
“French Waves – la série” (sur le site de “French Waves”)
A l’origine, French Waves est un projet lancé par les membres du label Pain Surprises, avec pour objectif de recenser tout en subjectivité l’histoire de la musique électronique en France sous toutes ses formes : de la réception de la techno de Détroit à l’électroclash, de Berlin à la French Touch, jusqu’à sa scène la plus contemporaine.
Alors le projet s’est concrétisé dans un long documentaire, dans la création d’un vaste site, mais aussi d’une web série ! Dix courtes vidéos, qui explorent chacune l’histoire du genre autour d’une interview de l’un de ses acteurs principaux – tant historiques (Breakbot, Bob Sinclar, Motorbass) qu’actuels (Jacques, Fakear). Alors si vous n’avez pas le temps de vous farcir un docu’d’une heure, mais que vous êtes quand même exigeants, vous savez quoi faire.
“Blank City” de Céline Danhier, 2011 (sur FilmoTV)
C’est une époque ramassée que la réalisatrice française Céline Danhier fige, l’espace d’un film riche en images et documents d’époque. Le lieu ? New York City, dans sa zone la plus délabrée. Celle du Lower East Side. Les dates ? Quelque part en 1977 et 1981, une fourchette durant laquelle un mouvement aussi hétéroclite que bordélique s’est forgé de façon très informelle : la no wave.
Sorte de réponse arty et punk à la très percussive Beat Generation, cette vague protéiforme d’expressions artistiques diverses et variées a vu naître les hymnes cramées de Richard Hell et de ses Voidoids, le revival jazz drogué de James Chance, les cinémas perfusés à Charlie Parker de Jarmusch et transgressif de Nick Zedd et une galerie de personnages aussi trash que géniaux. En complément, pourquoi ne pas relire La Veuve Basquiat, récit essentiel de ces ex-temps modernes, signé Jennifer Clement.
“Grünt Tour 1, 2 et 3” de Grünt, 2020 (sur YouTube)
A la recherche des acteurs de la scène rap africaine, l’équipe de Grünt part arpenter le continent, en marquant trois étapes : Casablanca (Maroc), Bamako (Mali) et Abidjan (Côte d’Ivoire). En trois épisodes, la team de Jean Morel revient sur les modes de consommation du genre musical dans les pays concernés, ainsi que les contextes dans lesquels elle émerge, parfois bien différents de ce à quoi nous sommes habitués.
Le Grünt tour invite à une rencontre directe avec les artistes, qui témoignent de leurs expériences au sein de leur culture respective, et à la découverte de ces musiciens qui auraient pu nous échapper. Documentaire filmé entre 2019 et 2020, c’est l’occasion d’être à la pointe de l’actualité de la trap africaine. R.B.B
“Leonard Cohen, Bird on a Wire” de Tony Palmer, 2010 (sur Arte TV)
Bon point pour celui ou celle qui, en 2009, a retrouvé les rushs d’un documentaire des années 1970, à l’abandon dans un entrepôt hollywoodien. Le trésor déniché n’est autre que le film retraçant la tournée européenne (et en Israël) de 1972 de l’immense Leonard Cohen. Disparu en 2016, le Canadien à l’honneur du film de Tony Palmer, qui, ayant repris possession de son œuvre, s’est appliqué à la retoucher à la demande de la famille de Cohen.
De nombreuses versions live d’incontournables du répertoire de l’artiste sont retranscrites, tels So Long, Marianne, The Partisan et bien d’autres. Paru en 2010, le film d’une centaine de minutes offre une véritable mine d’or d’archives, qui permettent une proximité particulière avec la légende qu’était, et demeure, Leonard Cohen.
https://www.youtube.com/watch?v=80RUxqA7xxw
“Debbie Harry, Atomic Blondie” de Pascal Forneri, 2017 (sur Arte TV)
Bien souvent, on fait l’erreur de l’appeler Blondie elle-même, tellement Debbie Harry était une figure emblématique de ce groupe, qui, dans les années 1970, s’est imposé comme le grand précurseur de la new wave. En menant Blondie, Debbie Harry a traversé bien des mondes : le New York punk du CBGB’s et les hauts lieux de la Beat Generation d’abord, la Californie ensuite où elle a connu la gloire (et les majors), puis bientôt l’Australie et le reste.
A travers le portrait de cette figure étrangement magnétique et énigmatique d’une Debbie Harry qui aura su garder son aura punk jusque dans sa starification internationale, le documentaire ravive ces belles époques révolues.
https://www.youtube.com/watch?v=7U2OGTSfO6Y
“Patti Smith : Dream of Life” de Steven Sebring, 2007 (sur YouTube)
Suivant l’artiste à travers le globe sur onze ans, le film Dream of Life dépeint Patti Smith sous tous ses aspects. “La vie est une aventure que l’on dessine de nos propres mains”, affirme-t-elle de sa voix posée. Appliquant sa maxime, la chanteuse, poétesse, écrivaine et artiste est mise à nu à travers des scènes de concert, de sa vie privée, les histoires qu’elle raconte, son rapport à ses croyances religieuses et, bien entendu, ses œuvres.
Le documentaire de Steven Sebring reste une référence pour quiconque souhaiterait s’aventurer dans la touchante histoire de Patti Smith. A la fois sensible, avec un chant ultra-maîtrisé et badass aux origines punk, elle est une artiste intemporelle et nécessaire du siècle passé et de ce siècle.
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