Elles sont toutes mères, et elles ont toutes vu leur fils, leur fille, partir faire le jihad ou accompagner leur conjoint jihadiste. Rencontre avec ces femmes dont la vie, un jour, a basculé.
Les yeux brillants, elles font défiler les centaines de photos de leur téléphone portable. Sophie est à la terrasse d’un café parisien, Isabelle (ces deux prénoms ont été modifiés) dans son HLM d’une ville portuaire et Lydie dans une villa cossue du bassin minier. Sur les écrans s’affichent les bouilles souriantes de leurs petits-enfants. “Voilà mon petit cœur de beurre”, décrit doucement Isabelle en montrant une brunette de 8 ans. “Je l’appelais comme ça avant.”
Depuis quatre ans, pour ces trois femmes, il y a un avant et un après. En 2014, comme des centaines de familles françaises, elles ont vu leurs enfants partir faire le jihad en Syrie. Avec leur départ, tout s’est figé. Depuis quatre ans, elles traversent un quotidien cabossé par l’angoisse. Trois vies où se sont invités avec fracas la radicalisation, le terrorisme international et Daech. Tantôt victimes, tantôt coupables, elles ont vu leur rôle évoluer au gré de la géopolitique, de l’opinion publique et des attentats.
Un phénomène d’attraction qui devient sociétal
Pour comprendre, il faut retracer la presque demi-décennie qui vient de s’écouler. A l’été 2014, l’attentat visant Charlie Hebdo n’a pas encore eu lieu. Personne ne mentionne les départs au jihad excepté quelques spécialistes peu écoutés. En juin, le califat de l’organisation Etat islamique est proclamé à Mossoul, mais nul n’est en mesure d’imaginer que le phénomène d’attraction va devenir sociétal, entraînant des légions de Français en perdition sous la bannière noire.
Isabelle se souvient de la première fois qu’elle a entendu parler de Daech, quand sa sœur lui a demandé si elle avait vu ce que c’était à la télé. “Non, c’est quoi ? – C’est un mec méchant qui tue des gens en Syrie.” A cette époque, leurs enfants sont convertis. Lydie et Isabelle le vivent très mal. Leurs filles d’à peine 20 ans se sont mariées à des pratiquants avec qui elles ont des enfants en bas âge et s’adonnent à un islam rigoriste. Les relations sont houleuses. Ce sont des histoires de famille. Secrètes, compliquées, douloureuses. Mais pour l’instant encore ordinaires.
Si Sophie, qui vit dans une banlieue chic du sud de Paris, sait que son fils est devenu musulman, elle est à mille lieues d’imaginer qu’il est dans une mouvance radicale. Ce sont les autorités qui lui apprendront son départ avec sa compagne et leur enfant de quelques mois. Lydie découvre avec terreur que, malgré son signalement deux mois avant, sa fille est partie en novembre 2014 avec son mari, fiché pour radicalisation, et leur bébé de 6 mois. Quant à Isabelle, elle prend connaissance du jihad de la sienne dans les pages d’un journal local. “La description collait, c’était forcément elle, son mari et les deux enfants. Ils venaient de partir en Syrie. Mais moi, le jihad, je ne savais même pas ce que c’était.”
“A partir de là, le quotidien, c’est l’attente et la peur”
Sophie cherche ses mots. “C’est Alice au pays des merveilles, vous savez, quand elle tombe. La terre s’ouvre sous vos pieds. C’est les abysses, sans fond et sans fin.” Isabelle, 53 ans, résume. “A partir de là, le quotidien, c’est l’attente et la peur.” Ces familles se retrouvent seules face à cette absence d’un nouveau genre, dont on commence peu à peu à parler. Débute alors “une vie parallèle”.
Les nouvelles tombent quelques semaines après l’arrivée en Syrie par WhatsApp. Au premier message, Lydie s’effondre. “Tu ne peux pas comprendre, on est là pour Allah. Je prie pour vous. Si on meurt, c’est pas grave.” Isabelle reçoit une photo. Son petit-fils de 3 ans pose à côté du drapeau noir de Daech. “C’est surréaliste, souffle-t-elle. Ça n’existe qu’à la télé.”
Tout tourne autour des nouvelles irrégulières de leurs enfants
Sur les conseils de la police et des psys, toutes trois tentent de garder le lien, de ne pas réagir violemment. Isabelle “en arrive à parler chiffons” avec sa fille. A travers les clichés qu’elle reçoit, Lydie voit se dérouler “la vie de mère au foyer” de la sienne. Comme Sophie, elles regardent grandir ou naître leurs petits-enfants par photos interposées.
Une mécanique épistolaire se met en place. Tout tourne autour des nouvelles irrégulières de leurs enfants, qui ne communiquent que dans des cybercafés syriens. Il se passe parfois des semaines, des mois sans nouvelles. “On est pendu au téléphone, dépeint Isabelle, qui achète une pochette qu’elle met autour de son cou pour avoir toujours son smartphone sur elle. On dort avec, à côté de son oreille, on a constamment une peur bleue de manquer un appel. Il n’y a plus d’heure, plus d’horaires.”
“Le cinéma, c’est une heure trente sans portable, je ne peux pas me permettre de perdre une heure trente”
Sophie enchérit : “Je ne le lâche jamais. Dans la douche, aux toilettes.” Elle s’arrête de vivre, ne fréquente plus les endroits où elle doit s’en séparer. “Le cinéma, c’est une heure trente sans portable, je ne peux pas me permettre de perdre une heure trente.” Un jour, dans le métro, sans réseau, elle rate une conversation et reste sans nouvelles plusieurs semaines. “Ça a été l’enfer, j’ai cru qu’il était mort, j’étais dévastée.”
Au restaurant avec des amis, il lui est arrivé de partir au milieu de son plat pour pianoter avec son fils. “Mon portable est devenu le prolongement de ma vie, détaille-t-elle. C’est mon poumon.” Elle se souvient de cette fois où son téléphone “a commencé à déconner”. Elle a foncé hurlante et en larmes chez son opérateur, où ils ont dû “la prendre pour une folle”.
“Ma vie, c’est ma fille en Syrie, et voilà”
Autour de ces femmes, la vie continue. Il faut commencer à annoncer la nouvelle, à affronter le regard des autres. Du côté de Lydie, les gens sont compréhensifs. “Ils me disaient tout le temps : ‘Je ne comprends pas comment tu fais. T’as vraiment du courage.” Elle soupire. “Au début, ça va. Puis on en a marre. Moi, je passe des journées entières couchée dans mon lit.”
Elle pense finalement qu’on lui dit ça pour éviter les questions. “Ça leur fait peur.” Lydie voit peu à peu qu’ils s’enquièrent de moins en moins d’elle. “Je me dis qu’ils en ont peut-être assez. Au début, c’est nouveau. Maintenant, c’est connu.” Elle enlève ses lunettes pour se frotter les yeux. “C’est devenu ma vie. Ma vie, c’est ma fille en Syrie, et voilà.”
Là où Lydie est soutenue par sa famille et traverse cette épreuve avec son mari, Sophie est seule. Son ex, remarié, n’y prête guère d’attention. Elle se fâche avec sa famille. “Ils ont dit des choses que je ne pardonne pas”, confie-t-elle en tremblant. Elle note une réaction “entre sidération et gêne” chez ceux qu’elle avertit, “et la compassion passe vite”.
“Je traverse ma vie sans la vivre”
Dans un premier temps, Isabelle, séparée du père de sa fille, n’a prévenu que la famille et les très proches. Aux autres, elle ne dit rien. “Je me suis blindée, j’ai appris à mentir”, grimace cette petite femme aux cheveux courts. Mais dans son quartier, tout le monde se connaît. Au début, elle chancelle à chaque fois qu’on lui lance : “Alors, ta fille ? Tes petits-enfants ? Ils poussent ?” Les premiers temps, lorsqu’elle croise un enfant de l’âge de sa petite-fille dans la rue, elle change de trottoir et se cache pour pleurer. “Je traverse ma vie sans la vivre”, murmure-t-elle.
Durant les premières années, il y a l’espoir du retour. Si elles n’en parlent pas tout de suite, c’est aussi pour ne pas mettre leurs enfants dans l’embarras au cas où ils reviendraient. Pendant deux ans, Sophie paie les factures de son fils. “Je me disais ‘s’il revient, à 22 ans être interdit bancaire c’est quand même pas top”, reconnaît-elle dans un rire nerveux.
“C’est de plus en plus dur”
“On dit qu’un deuil s’apaise avec le temps, réfléchit Sophie. Là, c’est l’inverse. C’est de plus en plus dur, j’ai l’impression d’arriver au bout du truc.” Au quotidien, tout est objet de souvenir. Une date, une musique, un film, une odeur. Et les administrations, pour qui les enfants sont toujours en France.
“Il y a des journées où ça va. Aller bien, c’est ne pas avoir eu trop peur, ne pas avoir craqué au boulot, avoir eu des nouvelles de mon fils, décrit Sophie. Et le soir, je rentre et je reçois un relevé de compte à son nom. C’est un bout d’enfer qu’on bouffe un peu chaque jour.” Et quand elle tente de résilier ses abonnements, on lui rétorque qu’il est majeur, qu’il n’a qu’à envoyer un mail.
A force d’être seules face au malheur, sans autre soutien des autorités que des auditions à répétition, sans personne qui les comprend, ces familles se rapprochent de structures qui commencent à se développer pour prévenir un phénomène dont tout le monde parle désormais.
La “déradicalisation” devient le maître mot
Au mitan de l’année 2015, la “déradicalisation” devient le maître mot du ballet d’experts qui parcourent les plateaux télé. Des associations flairent le filon et engrangent des milliers d’euros de l’Etat pour s’attaquer au phénomène. A cette époque, les parents sont vus comme des ressources, parfois sonnantes et trébuchantes. Mettre le grappin sur ces familles pour les faire témoigner devient un enjeu. “Il y a des personnes dangereuses, estime aujourd’hui Sophie. Je n’accepte pas que nos mômes soient utilisés. J’étais moins mal en quittant certains de ces groupes qu’en y étant.”
Isabelle se rapproche de Dounia Bouzar, alors grande prêtresse de ce haut mal. On lui demande de témoigner de son expérience devant des centaines de personnes, sans formation ni soutien. L’indélicatesse y frise l’incompétence lors d’ateliers de sensibilisation où on lui montre des vidéos d’enfants, le pied posé sur des têtes tranchées. “J’étais complètement démolie après ça”, hoquette cette grand-mère de trois petits qui grandissent chez Daech.
Lydie, elle, décide de s’investir. D’abord dans une association, puis en son nom propre. Cette professeure de lycée de 59 ans multiplie les interventions auprès du public et dans les médias. C’est d’ailleurs la seule qui parle aux Inrocks sans anonymat. Très vite, elle s’affiche à visage découvert.
“C’est mon histoire que tu as racontée ?”
En 2015, alors qu’elle vient de témoigner dans un journal, elle reçoit un message de sa fille, accompagné d’un lien. “C’est mon histoire que tu as racontée ?” Lydie hésite. “Et puis finalement, je lui ai écrit : ‘Oui, mais ce n’est pas que ton histoire. C’est aussi la mienne. C’est celle d’une mère dont la fille est partie dans un pays en guerre.”
Pour elle, témoigner, prévenir, intervenir est un moyen de tenir. “Mon investissement m’a permis d’avancer, analyse Lydie. Porter la parole auprès des jeunes, éviter que d’autres partent. C’est mon moyen de m’en sortir. Mon mari craque peu, il se défonce au boulot. Moi, j’interviens partout.” En mai dernier, avec d’autres familles, elle crée le collectif Familles unies, pour porter leur voix. Selon Sophie, “c’est le seul collectif sain, qui ne demande pas d’argent, qui parle de nous”.
“Aujourd’hui, je me fous de tout”
Au fil du temps, elles ont vu l’absence de leur enfant modifier leur caractère. “Je ne me reconnais plus, sourit tristement Lydie. J’étais réservée, discrète, presque timide. Je parlais peu.” A l’inverse, Sophie et Isabelle se sont éteintes. “J’étais un peu pétasse, raconte Sophie. J’aimais les fringues, sortir. J’étais fan de ciné. Aujourd’hui, je me fous de tout.”
Elle a même pris la décision de ne plus faire de rencontres. “Je préfère ne pas me lier. A chaque fois, le sujet des gosses arrive sur la table. Je ne supporte plus, j’ai de plus en plus de mal à mentir. Je ne vis pas, je survis.” A 48 ans, sa vie professionnelle a été stoppée net. Quand elle a appris que son fils était parti, elle venait d’avoir une grosse promotion. Elle est rétrogradée. “J’étais partie pour aller haut. Aujourd’hui, je compte les trimestres jusqu’à ma retraite. La boue s’est étalée jusque dans mon boulot.”
Isabelle “prend du poids” et “fume à l’excès”. Elle ne rit plus. “Je souris, parce qu’il faut bien. Mais pour rire naturellement, il faudrait me chatouiller. J’y pense à chaque instant.” Lydie s’y refuse. Avec son mari, ils se sont mis à voyager, pour “se ressourcer”. Ça n’a pas été facile. “Au début, j’étais mal de voyager alors que mes enfants sont dans le besoin, explique-t-elle de sa voix calme. Mais je me suis dit, pour être là quand mes petits-enfants vont rentrer, il faut être en forme. Et pour être en forme, il faut des moments des bonheur.”
Au soir du 13 novembre 2015, Sophie est scotchée devant la télé
Ces quatre années, le quotidien en France, ce sont aussi les attentats. Au soir du 13 novembre 2015, Sophie est scotchée devant la télé, à vomir de la bile pendant des heures. “On est effondré comme tout le monde. Mais on a peur aussi. On se dit ‘pourvu que le mien ne soit pas là-dedans’. Et puis on culpabilise d’avoir peur. On se dit ‘ouf’ et on s’en veut. C’est une peur viscérale, coupable. On ne se sent même pas légitime à dire ‘c’est horrible’.”
Après les attentats de 2015, les regards changent, et avec eux l’opinion publique. De victimes, les familles deviennent coupables d’être parents de jihadistes. A Sophie, on demande un jour si elle aime toujours son enfant. Elle tombe des nues. “Mais comment une mère pourrait ne plus aimer son fils ? On ne peut pas me reprocher d’aimer mon gosse. Ça ne veut pas dire que je cautionne.” Elle hausse le ton, les yeux pleins de larmes. “J’ai de l’amour pour mon fils, parfois j’ai de la rage, du dégoût, de la haine. Et encore plus d’amour quand j’ai de la haine.”
“Je préférerais que ma fille soit emprisonnée en France”
Pour Lydie et Isabelle, le tournant survient à la fin de l’été 2016, après l’attentat avorté de Notre-Dame, fomenté par des jeunes filles. A partir de là, les femmes revenues de Syrie sont systématiquement incarcérées. “C’était très dur à accepter, se souvient Lydie. On se dit qu’elle va aller en prison. C’est une nouvelle étape. Et puis finalement, on accepte.” Elle sèche ses yeux. “En fait, on passe par des étapes où on accepte tout.” Aujourd’hui, Lydie l’affirme : “Je préférerais que ma fille soit emprisonnée en France.”
Après chaque attentat viennent les réactions politiques. La déchéance de nationalité, puis la question du retour des petits-enfants, à laquelle le gouvernement Macron semble opposer une fin de non-recevoir camouflée sous une appréciation “au cas par cas”.
“On n’est plus des citoyens”
Toutes en veulent au nouveau président, qui ne les a toujours pas reçues. “On n’est plus des citoyens, déglutit Isabelle. Ce n’est pas normal de n’avoir aucune considération pour nous.” “Ils vont dans le sens de l’opinion publique, s’attriste Sophie. Et c’est terrible parce que quand je vais sur les réseaux sociaux, sur 150 commentaires, 148 nous disent d’aller mourir.”
Parallèlement, la législation se durcit et les parents, longtemps ignorés, sont de plus en plus mis en cause pour financement du terrorisme. Trois ans après le départ de leur fille, Lydie et son mari sont pour la première fois perquisitionnés à leur domicile, quelques jours après avoir fait un virement. “On l’avait dit. On a toujours tout dit, on a toujours coopéré”, s’agace celle qui avait en vain, dès 2014, signalé sa fille. “Quand mon fils me dit qu’il n’a plus de couches pour ses enfants, plus rien à leur donner à manger, je fais quoi ? s’interroge Sophie. Quand je me retourne, que mon frigo est plein, je ne peux pas ne rien faire. Je suis une mère.”
Peu à peu, là-bas, le rapport de force s’inverse et le territoire contrôlé par l’EI se réduit. L’espoir de revoir leurs enfants s’estompe. Les histoires de jihadistes français tués ou condamnés sur place se multiplient. En Irak, Mélina Boughedir, 27 ans, vient d’être condamnée à vingt ans de prison avec la bénédiction de la France, qui a salué “une justice légitime”. Le procès a duré cinquante minutes, le délibéré moins de cinq. Lors de l’audience, la jeune femme tenait sa petite fille de 16 mois.
“Elle nous a privés de joies de la vie, de nos petits-enfants”
Des enfants, il y en a aussi aux mains des Kurdes dont la France refuse l’extradition. Avec le délitement de Daech, les familles comprennent qu’un nouveau front s’est ouvert : le retour de leurs petits-enfants. Alors il faut prendre des avocats. Si Lydie et Sophie en ont les moyens, Isabelle se ruine en frais de justice. En montrant une photo d’un de ses trois petits-enfants, né là-bas, cette dernière éclate en sanglots. “Je ne crois pas que ce soit un danger, ce petit bout.” Elle tremble. “On ne demande pas un tapis rouge pour nos enfants. On ne demande même pas d’aller se faire tuer pour eux. Mais ma petite-fille, mes bébés ? On leur doit secours et protection.”
Aucune n’estime que ceux partis en Syrie doivent être absous. Loin de là. “Même si je considère qu’elle a été embrigadée, ma fille doit répondre de ses actes, s’écrit Lydie. Je lui en veux, je voudrais lui dire tout le mal qu’elle nous a fait. Elle nous a privés de joies de la vie, de nos petits-enfants. Je n’ai jamais eu cette chance de les prendre dans mes bras. Pour eux, je serai une inconnue, il va falloir les apprivoiser, se faire aimer par eux.”
Sophie s’allume une cigarette. “Je sais que mon fils prendra vingt ans s’il rentre, et d’ailleurs je pense qu’il ne rentrera pas, je n’ai plus d’espoir pour lui. Les seules pour qui je me bats, c’est ses deux gamines. Ce sont des bébés. Il faudra une armada de psys pour les remettre droites, mais on n’a pas le droit de ne pas essayer.” Elle lève ses yeux verts. “Si je mourais demain, je serais soulagée. Mais, pour elles, je ne peux pas.” Et d’ajouter, la voix brisée : “Daech a entraîné beaucoup plus que nos enfants. Moi aussi, il m’a bouffé le cerveau. J’ai tout perdu.”