Le ministère de l’intérieur a déposé des demandes officielles auprès de Twitter et Facebook afin de dissimuler une photo choquante prise à l’intérieur du Bataclan, qui circule depuis les attentats du vendredi 13 novembre. Mais les réseaux sociaux peinent à la faire disparaître.
Mercredi 18 novembre à 9 h du matin, il était encore possible de voir la photo insoutenable prise dans le Bataclan après que des terroristes y ont assassiné plus de 80 personnes. Cette image, extrêmement choquante, a été partagée sur plusieurs sites français – que nous ne nommerons pas ici – mais également sur les réseaux sociaux depuis samedi. A tel point que la police a demandé, dès le 15 novembre sur Twitter, de ne pas contribuer à sa diffusion.
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Par respect pour les victimes et leurs familles, ne contribuez pas à la diffusion des photos des scènes de crime #AttackParis #fusillade
— Police Nationale (@PNationale) 15 Novembre 2015
« Ce tweet a été caché en France »
Pourtant, le gouvernement et les autorités ont tout tenté pour faire disparaître cette image. Mardi, certains tweets qui partageaient ce contenu (comme ceux du compte identitaire « Rémigration », mouvement associatif de Laurent Ozon, un ancien membre du bureau politique du Front national ndlr), n’étaient plus visibles par les internautes dont l’adresse IP correspond à celle d’un utilisateur présent sur le territoire français. « Ce tweet a été caché en France », peut-on lire lorsque l’on clique sur le lien vers le gazouillis en question (cf photo à la Une).
Cette mesure est rare : elle correspond à la politique du « contenu retiré en fonction d’un pays » de Twitter, qui détaille sur son site officiel les critères pour qu’une image ou un texte soit banni d’un pays tout entier. Il faut que la demande émane d’un « gouvernement ou des autorités policières ou judiciaires » en justifiant d’une violation de la loi – dans ce cas, la loi française.
Sur le site Lumen Database, qui recense les plaintes juridiques déposées à l’encontre de contenus en ligne, on peut voir que c’est le ministère de l’Intérieur français qui a effectué une demande de retrait de cette image. Les motifs invoqués : « Atteinte grave à la dignité humaine (images de cadavres) » et « atteinte au secret de l’enquête ». La plainte s’appuie sur les articles « 6 de la loi 2004-575 du 21 juin 2004, article 227-24 du code pénal et Article 35 quater de la loi de 1881 sur la liberté de la presse ».
La photo circule pourtant encore sur Twitter et Facebook
Entre le 1er janvier et le 30 juin 2015, seuls 2 tweets ont été « retirés » par Twitter après des demandes émanant de la France, sur 32 envoyées au total, comme le rapporte la firme dans son rapport bi-annuel dit « de transparence« . Ces gazouillis restent toutefois visibles par les internautes qui se trouvent dans un autre pays, ou qui ont recours à un VPN, qui change l’adresse IP d’un utilisateur.
Le souci : la plainte des autorités concernant des contenus illégaux doit être formulée à l’encontre de comptes bien précis. Aussi, si @Remigration, le compte pris en exemple ci-dessus, a été signalé par le ministère, d’autres – que nous préférons ne pas mentionner – ne figurent pas dans la réquisition judiciaire. Leur contenu n’était, à la date du 18 novembre, toujours pas dissimulé. Seule « consolation »: la photo a été taggée comme un « contenu sensible » par Twitter, elle ne s’affiche donc pas directement dans les fils d’actualité de ses membres. Il faut cliquer sur le bouton « voir le contenu » pour qu’il s’affiche.
Même combat sur Facebook
Sur Facebook, le combat est le même. Selon nos informations, que le Figaro a également confirmées, le ministère de l’Intérieur a signalé au réseau social que la photographie supposément prise à l’intérieur du Bataclan était illégale, après qu’elle a été dénoncée sur la plateforme Pharos (portail officiel de signalement de contenus illicites de l’Internet).
Par conséquent, comme pour Twitter, à chaque fois qu’un internaute croise la photo sur son fil Facebook et qu’il la signale, le réseau social devrait être obligé de la dissimuler sur le territoire français. Par exemple, sur le compte Facebook d’un certain « Renaud Hennequin », qui avait partagé une capture d’écran de l’image le 15 novembre, l’image n’est plus visible (nous ne savons pas si le contenu a été retiré par le manager de la page ou bloqué par Facebook).
Pourtant, sur d’autres comptes Facebook, comme celui des « Bobards d’Or », une cérémonie anti-médias organisée par Jean-Yves Le Gallou (ancien cadre du FN, théoricien de la « préférence nationale » ndlr) et malgré les nombreux signalements des internautes, la photo est toujours en ligne, et compte plus de 2 900 commentaires d’internautes indignés.
[Mise à jour à 17h45] Si le 18 novembre à midi, la photo était encore visible sur le Facebook des Bobards d’Or, toute la page de ce compte a depuis été suspendue sur le territoire français. Elle reste visible, ainsi que la photo, sur les autres territoires.
Capture d’écran de la page Facebook des Bobards d’or le 18/11 à 17h45
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