Un fait divers tragique traité sur un mode romantique qui lui ôte de la force.
Fabio Grassadonia et Antonio Piazza confirment ici les promesses de leur premier film, Salvo. Mais, d’une certaine manière, ils excèdent nos attentes en surenchérissant formellement sur une situation donnée, liée, comme dans Salvo, à la Mafia, Sicile oblige. S’appuyant sur un fait divers réel – la longue séquestration et l’assassinat d’un adolescent fils de repenti dans les années 1990 –, ils le tirent vers le conte de fées, émaillant les recherches de la petite amie du disparu de notations oniriques et d’effets décoratifs.
Dramatiquement, c’est déroutant ; cela déréalise cette histoire sombre et cruelle au point de la rendre presque factice. Une connivence magique s’établit entre les deux adolescents séparés et le monde qui les entoure. C’est très beau, mais parfois on se demande pourquoi les réalisateurs ne se sont pas essayés carrément au cinéma fantastique ou d’horreur vers lequel ils lorgnent constamment. Telle quelle, la sordide histoire de Mafia semble noyée dans un brouillard irréel. Si on avait vraiment voulu traiter cette conséquence malheureuse de la lutte anti-Mafia, il aurait fallu garder un regard clinique, éviter les fioritures de l’imaginaire ou de la nature qu’on voit ici.
Dans l’ensemble, malgré quelques moments sublimes, le film s’enferme dans une imagerie impalpable et évanescente évoquant un rêve de jeune sylphide gothique.
Sicilian Ghost Story de Fabio Grassadonia et Antonio Piazza (It., Fr., Sui., 2017, 1 h 57)