Obligées de cesser leur activité pour cause de pandémie, les libraires craignent qu’Amazon en profite pour rafler le marché. Si Bruno Le Maire envisage une possible réouverture, les professionnel·les évoquent des risques sanitaires.
La crise due à la pandémie du coronavirus touche de plein fouet le secteur du livre. Alors que les librairies ont été contraintes de fermer suite aux mesures de confinement édictées par le gouvernement – ce qui a plongé par ricochet les maisons d’édition, les agences de communication spécialisées dans le livre et les attaché·es de presse indépendant·es dans l’incertitude -, une réflexion est engagée au niveau du gouvernement.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
“Un commerce de première nécessité”
Ce 19 mars, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, interrogé par France Inter, a déclaré qu’il envisageait de concevoir des règles strictes qui “permettraient aux librairies de continuer à ouvrir”. En cause, les inquiétudes des libraires face à la concurrence du géant d’internet Amazon, qui va recruter massivement pour répondre à une demande accrue liée au confinement. “Je ne vois pas pourquoi ce serait uniquement Amazon qui pourrait récupérer le marché, au risque effectivement de fragiliser les libraires”, a déclaré le ministre, précisant qu’il estimait que les librairies étaient “un commerce de première nécessité”.
>> A lire aussi : Le Covid-19 va fragiliser un peu plus le secteur du livre (qui n’avait vraiment pas besoin de ça)
“Je propose qu’avec le ministère de la Culture, sous l’autorité du Premier ministre, nous regardions cette question spécifique des librairies et s’il est possible de définir des règles strictes qui permettraient aux librairies de continuer à ouvrir sous réserve (…) que les clients viennent un par un, qu’ils ne soient pas nombreux dans la libraire, qu’ils se contentent d’acheter le livre et de ressortir immédiatement”, a enfin expliqué Bruno Le Maire.
Rien n’est simple
Seulement voilà, rien n’est simple dans cette période de crise. En effet, dans un communiqué, le Syndicat de la librairie française (SLF) a fait part de ses craintes vis-à-vis d’une possible réouverture, en raison des “contacts inévitables qu’elle entraînerait entre libraires et clients”. Pour les mêmes raisons, le Syndicat s’interdit les services de retrait et de livraison : “Le coût économique pour notre profession sera considérable et nous avons tous hâte de rouvrir et de retrouver les lecteurs mais, aujourd’hui, la priorité sanitaire prime sur tout autre enjeu, y compris financier.”
Réouverture des #librairies : "Le coût économique pour notre profession sera considérable et nous avons hâte de retrouver les lecteurs mais, aujourd’hui, la priorité sanitaire prime sur tout autre enjeu, y compris financier." Lire le CP ➡️ https://t.co/OlQs7DdsY9
📷 Thaïs Breton pic.twitter.com/x2dPBYHHUq— Syndicat de la librairie française (SLF) (@SLF_Librairie) March 19, 2020
La situation est donc complexe, et pour tout dire, bloquée. En effet, les lecteurs qui voudraient soutenir les librairies indépendantes pourraient avoir envie de commander leurs livres sur des sites comme librairiesindependantes.com (qui regroupe 1000 enseignes), Lalibrairie.com, leslibraires.fr, Emmaüs ou autres (comme le conseille cet article d’Actualitté). Mais là encore, les risques sanitaires pour les travailleurs du livre et les lecteurs sont non négligeables.
On me recommande le site librairies indépendantes pour se faire livrer des livres pendant le #ConfinementLecture. Mais la poste fonctionne ? Et est ce qu'on voudrait pas éviter de donner du taf et risques en rab aux facteurices pendant le #confinement ? pic.twitter.com/o0uM8gvAXI
— Paprika (@Paprikaf) March 15, 2020
Amazon en profite
Dans la période actuelle, tout est donc mis en sourdine. Et Amazon en profite, en exerçant même sur ses salarié·es des pressions jugées “inacceptables” par Bruno Le Maire. C’est pourquoi le Syndicat de la librairie française demande “que les conditions strictes imposées par le gouvernement, dont la limitation maximale des contacts, s’imposent également aux opérateurs qui continuent, comme si de rien n’était, de vendre et de livrer des produits définis comme ‘non indispensables’dans la période actuelle”. Selon l’économiste Daniel Cohen, interrogé par Les Inrocks, Amazon pourrait d’ailleurs à long terme profiter de la situation : “Ce virus est la validation de leur business model : plus besoin de se voir !”
En attendant que la situation se débloque, par solidarité avec les libraires, au lieu de commander sur Amazon, vous pouvez toujours parcourir vos étagères et profiter du temps qui vous échoit pour lire les romans ou essais que vous aviez laissés de côté en attendant la bonne occasion.
{"type":"Banniere-Basse"}