Sorti le 25 mai, l’album « Daytona » de Pusha T s’est retrouvé avec une photo de la salle de bains de Whitney Houston en guise de pochette
Vous feriez quoi, vous, avec 85 000 dollars ? Kanye West, lui, a dépensé cette somme dans l’acquisition d’une photo de la salle de bains de Whitney Houston, décédée en 2012 d’une overdose médicamenteuse dans sa baignoire du Beverly Hilton Hotel. La photo atterrit sur la pochette de Daytona, l’album de Pusha T qu’il a entièrement produit (sept chansons parfaites). “C’est ce que les gens ont besoin de voir lorsqu’ils écoutent ta musique”, aurait-il déclaré à Pusha. La photo est choc : le chaos qui règne – s’entremêlent médocs, pipe à crack, cuillère remplie de poudre blanche, etc. – reflète celui qui régnait dans la vie de Whitney Houston, qui ne parvenait pas à se libérer de ses addictions. Sa mort rappellera celle d’Amy Winehouse, décédée d’une overdose d’alcool en 2011. Si la famille Houston a intenté un procès à Kanye West, nous, public, contemplons avec une fascination malsaine cette image qui symbolise le revers de la médaille. S’y expriment la solitude, la fragilité et la détresse torturant nombre d’artistes cramés par les spotlights tels des Icare modernes.
Que la photo date de 2006 ne fait qu’ajouter au malaise : qualifiée d’“accidentelle”, la mort de Houston n’en était pas moins prévisible. Le public assistait à sa descente aux enfers, impuissant et fasciné par la chute d’une étoile. Le 26 juillet 2015, Bobbi Kristina Houston, 22 ans, meurt dans les mêmes circonstances que sa mère. Une coïncidence qui n’en est pas vraiment une et qui inspira aux Insecure Men Whitney Houston and I. “Je n’essaie même pas de provoquer sur ce titre, j’y trouve une vraie résonance, un poids”, expliquait Saul Adamczewski au moment de sa sortie. Au-delà du buzz que Kanye West recherche inlassablement, l’utilisation de cette photo dépasse son caractère voyeuriste pour offrir une réflexion sur l’artiste, sur l’humain.