Vous êtes en proie à des attaques de panique ? Le confinement vous donne envie de vous frapper la tête contre les murs ? Relax. Respirez. Et suivez nos conseils de films moelleux et doux comme de gros édredons, dans lesquels on a envie de se lover toute la vie.
1- The Party (Blake Edwards, 1968)
Indéniablement l’une des meilleures comédies jamais réalisées, The Party de Blake Edwards résonne étrangement avec l’actualité, quand on y pense bien. Comment en effet mieux se figurer l’extraordinaire effet domino provoqué par la consommation d’un steak de Pangolin à Wuhan qu’en revoyant Hrundi V. Bakshi (Peter Sellers en acteur-gaffeur indien), provoquer un implacable engrenage de catastrophes lors d’une grande fête hollywoodienne ? Et pour les petits malins qui ont pris leurs dispositions et croulent sous le papier toilette, Hrundi a fait un tutoriel pour vous montrer quoi en faire.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Dans la foulée, on ira perturber l’ordre avec Blake Edwards dans : Quand l’inspecteur s’en mêle (deuxième épisode de La Panthère Rose, le meilleur), Elle (ou 10, sur la crise de la quarantaine, avec Dudley Moore, Julie Andrews et Bo Derek), Victor Victoria (une des meilleures comédies queer)
2- Tous en scène (Vincente Minelli, 1953)
On pourrait évidemment chanter sous la pluie pour se réconforter, mais l’on va plutôt se déhancher sur la scène d’un jazz bar rose pétant, en compagnie de Fred Astaire et Cyd Charisse. Le danseur déchu et la danseuse étoile se détestent mais sont obligés de collaborer et d’accorder leurs pas, dans un Central Park déserté pour que le musical dans le musical fonctionne — et il fait mieux que ça : il crépite de toutes parts. Quintessence du style aquilin de Vincente Minnelli (et de son producteur Arthur Freed), The Band Wagon résume aussi sa morale : « le monde est une scène, la scène est un monde ».
Dans la foulée, on ira danser avec : Chantons sous la pluie (de Stanley Donen), Top Hat (le Astair-Rogers par excellence), et La la Land (qui pille intelligemment tout ça, et fait se sentir un peu mal mais bien quand même)
3- Les demoiselles de Rochefort (Jacques Demy, 1967)
S’il est un film de la Nouvelle Vague qui apporte du baume au cœur, c’est à l’évidence Les demoiselles de Rochefort de Jacques Demy. On aimerait parfois que le monde se résume à ce port militaire de Charente Maritime, à sa place carrée et à ses décors blancs rehaussés de couleurs pastel, où « deux sœurs jumelles nées sous le signe des Gémeaux » (Catherine Deneuve et Françoise Dorléac) cherchent le grand amour à l’occasion d’une fête foraine. C’est le film le plus joyeux de Demy, une féerie hollywoodienne transposée en France et mise en musique par Michel Legrand, par laquelle le cinéaste nantais paie son dû à Vincente Minelli, George Sidney, Stanley Donen, ou Robert Wise, et leur emprunte même deux acteurs cultes (Gene Kelly et George Chakiris).
https://www.youtube.com/watch?v=0S8_x-qOCBI
Dans la foulée, on ira écouter, comme des albums fétiches, quelques films issus ou apparentés à la Nouvelle Vague : Conte de Printemps (d’Eric Rohmer), On connaît la chanson (d’Alain Resnais), et Dans Paris (de Christophe Honoré)
4- Elle et lui (Leo McCarey, 1957)
Remakant son propre film de 1938 (A Love Affair), Leo McCarey appaire ici Cary Grant et Deborah Kerr, dans ce qui est peut-être la plus belle comédie romantique jamais réalisée. La rencontre réticente, le coup de foudre, la douloureuse séparation, l’impossible réunion : tous les motifs du genre sont ici déployés avec une absolue élégance. Pour se souvenir que les paquebots n’ont pas toujours été ces angoissantes machines à polluer et à diffuser des virus, on se lovera dans le cocon qu’y ont tissé Terry McKay et Nikkie Ferrante.
Dans la foulée, on ira s’encanailler avec Cary Grant, acteur réconfortant par excellence, dans : Cette sacrée vérité (de McCarey aussi), L’impossible Monsieur Bébé (d’Howard Hawks), Indiscrétions (de George Cukor)
5- Comment savoir (James L. Brooks, 2010)
Il y a plusieurs prétendants au titre d’héritier de Cary Grant, mais nous élisons pour notre part Paul Rudd, l’acteur avec lequel on aimerait rester le plus en quarantaine. Jamais il n’a été plus touchant que dans ce chef-d’œuvre de James L. Brooks, largement mésestimé à sa sortie, surtout aux Etats-Unis, mais peu à peu été réévalué au cours de la décennie (grâce à un noyau de fan dont beaucoup travaillent pour ce journal, il faut le dire). Comédie existentielle particulièrement difficile à résumer (ce qui est toujours bon signe), Comment savoir réunit aux côtés de Paul Rudd un casting de luxe : Reese Witherspoone, Owen Wilson et Jack Nicholson (dans son dernier grand rôle). Pour l’amour du Playdoh.
Dans la foulée, on ira se réchauffer le cœur avec les films que James L. Brooks a produit, notamment Jerry Maguire (et franchement, tous les films de Cameron Crowe), Bottle Rocket (et bon nombre de Wes Anderson), et le plus rare Ecarts de conduites (avec Drew Barrymore)
6- Amour et Amnésie (Peter Segal, 2004)
Pour rester avec Drew Barrymore, regardons Amour et Amnésie, où son duo avec Adam Sandler fait des miracles. Ce dernier, tombé amoureux d’elle après l’avoir rencontré dans un café à Hawaï, doit chaque jour trouver de nouveaux stratagèmes pour la séduire, puisque sa mémoire, endommagée à la suite d’un grave accident, se reformate à chaque réveil. Moins mauvais cinéaste de la bande à Adam Sandler, Peter Segal est ici en état de grâce, réalisant une des plus belles rom’com des années 2000.
Dans la foulée, on minaudera avec Drew Barrymore dans : Never Been Kissed (prodigieux college movie), Terrain d’entente (des Frères Farrelly), et Bliss (qu’elle a réalisé).
7- Le Come-Back (Mark Lawrence, 2007)
Drew Barrymore, décidément, nous réconforte. Et particulièrement quand elle compose des tubes pour une simili-Britney, en compagnie de Hugh Grant, star déchue de New Romantic Pop des eighties, en quête de rédemption. Réalisé par le trop peu acclamé Mark Lawrence, qui semble avoir décidé de consacrer sa carrière à filmer les rides de Hugh Grant, Music and Lyrics est de ces films qu’on peut voir encore et encore, sans se lasser, comme une bonne pop-song. Pop Goes My Heart !
Dans la foulée, on regardera les autres collaborations Lawrence-Grant, par ordre chronologique : L’amour sans préavis (avec Sandra Bullock), Où sont passés les Morgan (avec Sarah Jessica Parker), et The Rewrite (Marisa Tomei).
8- 40 ans toujours puceau (Judd Apatow, 2004)
C’est le plus évident mais on ne s’en lasse pas : le premier long-métrage de Judd Apatow demeure un modèle du genre. Steve Carrell, alors inconnu, y révélait son incroyable capacité à être adorable ; Paul Rudd et Seth Rogen excellaient en side-kick, quelques années avant de prendre eux-mêmes le volant (En cloque mode d’emploi, puis 40 ans : mode d’emploi) ; Katherine Keener nous faisait tomber amoureux avec sa voix cassée ; et Jonah Hill nous faisait pour la première fois hurler de rire avec un bonnet et des platform shoes. This is comedy.
Dans la foulée, on traînera avec le Apatow gang, ces nerds qui ont révolutionné la comédie américaine contemporaine, avec : Présentateur vedette : La légende de Ron Burgundy (Adam McKay et Will Ferrell dans leurs premiers exploits), SuperGrave (l’adolescence de Seth Rogen et Evan Goldberg), Cinq ans de réflexion (parfaite comédie de remariage de Nicholas Stoller et Jason Segel)
9- Rendez-vous au paradis (Albert Brooks, 1991)
C’est le quatrième film d’Albert Brooks, acteur chez son homonyme James L. (dans Broadcast News par exemple) ou dans Drive (le garagiste), mais aussi, et surtout, grand cinéaste méconnu hors des frontières américaines (et de toute façon largement oublié dans son propre pays). Dans Defending Your Life, il passe l’essentiel du film au purgatoire, devant « défendre sa vie » lors d’un procès, pour savoir s’il ira au paradis ou retournera sur terre, dans une autre enveloppe, où peut-être il sera plus vertueux. Pensant avoir été lâche toute sa vie, il se fait une raison, mais lorsqu’il tombe amoureux de l’impeccable Meryl Street, il décide de tout faire pour s’élever à son niveau. Une des plus belles comédies sur l’idée de perfectionnisme moral.
Dans la foulée, on ira juger sa vie (et tenter de l’améliorer) avec : La vie est belle (évidemment), Peggy Sue s’est mariée (de Francis Ford Coppola), et Camille Redouble (son quasi-remake de et avec Noémie Lvovsky)
10- Une histoire vraie (David Lynch, 1999)
David Lynch n’est pas le premier cinéaste qu’on associe à l’idée de réconfort, certes. Il a pourtant réalisé un des meilleurs films à cet effet : un road movie en tracteur, par un vieil homme soucieux de rejoindre son frère, avec qui il est en froid, avant qu’il ne soit trop tard pour se réconcilier. A straight story (straight signifiant « droit ») est le film le plus linéaire, et le moins torturé de son auteur, ainsi que celui où il s’adonne le plus abondamment à son amour de l’Americana.
Dans la foulée, on pourra faire quelques traversées de l’Amérique en bonne compagnie avec : New York Miami (Frank Capra, Gary Cooper, Claudette Colbert), Dumb and Dumber (les Farrelly, Jim Carrey, Jeff Daniels) ou Magic Mike XXL (Channing Tatum et sa bande dans cette suite formidable du hit de Soderbergh).
11- Fous d’Irène (Peter et Bobby Farrelly, 2000)
Restons sur la route, en compagnie d’un des plus grands comiques contemporains : Jim Carrey. Dirigé pour la seconde fois par les frères Farrelly, six ans après Dumb and Dumber, où était déjà exploité son potentiel burlesque (dans sa dimension idiote), il va encore plus loin cette fois, en appuyant sur son caractère proprement monstrueux. Interprétant un flic à la double personnalité, Mr Charlie et Dr Hank, chargé d’escorter une témoin (Renée Zellwegger) dans un autre Etat pour un procès, Carrey, il change constamment de visage et de registre, dans un comique aussi régressif que libérateur.
Dans la foulée, on fera quelques miles de plus avec les Farrelly : dans Kingpin (autre road movie avec Woody Harrelson et Bill Murray), et Deux en Un (peut-être leur plus beau film, sur la fraternité siamoise, avec Matt Damon et Greg Kinnear). Puis on prendra un embranchement pour retrouver Jim Carrey (et Zooey Deschanel) dans Yes Man de Peyton Reed.
12- Bonjour (Ozu, 1959)
Parce que leurs parents leur interdisent de regarder la télé, des adolescents vivant en banlieue de Tokyo décident de faire la grève de la parole. Seule expression qu’ils s’autorisent : le pet. En cette fin de décennie annonciatrice de grands bouleversements sociaux, Yasujiro Ozu enregistre paisiblement, avec un humour inhabituellement débridé, proche de celui de Jacques Tati, les effets de la modernité sur le Japon désormais loin du désastre de la seconde guerre mondiale. Bonjour est le film idéal pour se plonger dans son œuvre gigantesque.
Dans la foulée, on goûtera quelques délicieux mets japonais avec : Le goût du riz au thé vert (autre film d’Ozu, doux-amer, sur le couple), The Taste of tea (Katsuhito Ishii, un bijou de 2005), Notre petite sœur (de Kore Eda)
13- Mon voisin Totoro (Hayao Miyazaki, 1993)
Restons au Japon, mais côté animation, avec Mon voisin Totoro d’Hayao Miyazaki. Deux petites filles partent vivre à la campagne avec leur père, non loin de l’hôpital où leur mère est alitée, malade. Dans cette nouvelle maison, elles font tôt la connaissance de l’habitant ancestral des lieux, la créature la plus kawaï jamais créée. Un fabuleux récit d’initiation, capable d’émouvoir tout être humain sensible à partir de 4 ans.
Dans la foulée, on se plongera dans les méandres du temps avec les maîtres de l’animation japonais : Pompoko (Isao Takahata), Millenium Actress (Satoshi Kon), La traversée du temps (Mamoru Hosoda)
14- Le grand blond avec une chaussure noire (Yves Robert, 1972)
Parmi toutes les comédies françaises, c’est celle-ci que nous avons choisie, parce qu’elle n’a jamais cessé de nous obséder, depuis l’enfance, jouant son rôle de doudou comme nulle autre. Pourquoi celle-ci plutôt qu’une autre ? Ca revient à demander à Louis Toulouse (Jean Rochefort), patron des services de renseignement français, pourquoi il choisit François Perrin (Pierre Richard), dans la foule d’Orly, pour piéger son adversaire Bernard Milan (Bertrand Blier), en faisant passer ce maladroit violoniste pour le meilleur des agents secrets : c’est comme ça. Il portait une chaussure noire à un pied, une marron à l’autre — c’est bien suffisant. On ajoutera tout de même, s’il fallait une raison supplémentaire, que c’est la plus hitchcockienne des comédies françaises, qui cite aussi bien La mort aux trousses que L’homme qui en savait trop.
Dans la foulée, on ira rejoindre quelques autres losers magnifiques de la comédie française avec : Dieu seul me voit (les frères Podalydès — préférez la version longue Versailles Chantiers), Les apprentis (Pierre Salvadori, Guillaume Depardieu et François Cluzet), Les beaux gosses (Riad Sattouf, Vincent Lacoste).
15- Problemos (Eric Judor, 2017)
Tant qu’il est encore permis de rire de la situation, recommandons ce film réalisé et interprété par Eric Judor, et écrit par Blanche Gardin. Ils imaginent ce que serait la fin du monde du point de vue d’un Parisien arrogant, passant le week-end dans une ZAD, tandis que le monde est décimé par une pandémie fulgurante. Judor réussit une comédie politique d’équilibriste, qui parvient à titiller les susceptibilités de chacun sans s’acharner sur personne.
Dans la foulée, on ira se contaminer avec : The Big Sick (excellente comédie produite par Judd Apatow qui a révélé Kumail Nanjiani), Osmosis Jones (film d’animation des Frères Farrelly sur un virus envahissant le corps de Bill Murray), et Sacré Graal (Monthy Python vs. La Peste noire).
{"type":"Banniere-Basse"}