Suite aux polémiques autour des rétrospectives Polanski et Brisseau, le patron de la Cinémathèque française avait regretté le retour de « l’ordre moral » et des « ligues de vertu ». Dans un communiqué, la Société des Réalisateurs lui a répondu en regrettant que l’institution ne soit pas à la hauteur des événements.
A quoi joue la Cinémathèque française ? Après la polémique née de l’annonce d’une rétrospective Polanski puis Brisseau en pleine affaire Weinstein, la Société des Réalisateurs de Films s’interroge sur les prises de position récentes de l’institution.
« Hystériser le débat »
Dans un communiqué signé par Céline Sciamma, Rebecca Zlotowski, Jacques Audiard ou bien encore Bertrand Bonello, on peut ainsi lire :
« D’abord, qu’en mettant à l’honneur à quelques semaines d’écart deux auteurs condamnés pour crimes sexuels, puis en n’en reportant qu’un sur les deux – qui par un effet de chronologie des faits tombe fort inopportunément sur le moins reconnu des deux – elle nous semble contribuer à initier puis hystériser un débat auquel elle n’apporte hélas aucune perspective. »
« La Cinémathèque ne nous semble pas à la hauteur du moment »
La SRF s’interroge ensuite sur les déclarations publiques du directeur de la Cinémathèque, M. Frédéric Bonnaud. Invité sur le plateau de Mediapart, le patron de l’institution avait regretté le retour de « l’ordre moral » et des « ligues de vertu ». Il avait également dénoncé un « choc totalitaire » de « demi-folles ». Sous-entendu, les associations féministes.
« Un échec à produire de la pensée »
« A travers ses deux communiqués et la prise de parole publique de son directeur, ne remettant jamais en cause, ni en profondeur ni même en surface, sa position, nous déplorons que la Cinémathèque joue la fuite, l’hostilité ou la résistance au débat qu’elle n’arrive manifestement pas à penser dans sa complexité ni même ses grandes lignes. Comme si sa dynamique de rétrospective la condamnait au passé, au seul musée. La Cinémathèque ne nous semble pas à la hauteur du moment. C’est d’autant plus dommage qu’elle a toujours été un lieu de contestation, de manifestation. Parfois dans la salle, parfois à l’extérieur. Pourquoi s’y dérober aujourd’hui? », peut-on ainsi lire de la part de la SRF.
« Cet échec à produire de la pensée nous engage tous car il est celui d’une institution culturelle qui possède à nos yeux les moyens d’agir, d’éditorialiser, de transmettre, de participer aux enjeux de ce moment. La Cinémathèque a déclaré se sentir seule dans cette crise. Nous affirmons ici notre présence pour l’aider à penser la suite », conclut le communiqué.