A l’occasion de la sortie de « Red Sparrow », nous nous sommes penchés sur l’émergence ces dernières années d’un cinéma d’action dirigé par des personnages féminins forts. Ayant toutes comme ancêtre commun le personnage incarné par Sigourney Weaver dans la saga « Alien », voici les dix actrices qui incarnent aujourd’hui ce nouveau modèle de femme.
2017 est à marquer d’une pierre blanche dans l’histoire de la représentation des femmes dans l’entertainment hollywoodien. Pour la première fois, les trois plus gros succès du box-office américain sont des films avec une personnage principal féminin ; La Belle et la Bête, Star Wars 8 : Les Derniers Jedi et Wonder Woman. Si 2018 ne devrait pas faire aussi bien, la présence féminine dans les films d’action – genre populaire et masculin par excellence – est déjà perceptible à travers plusieurs titres à succès (Annihilation, Red Sparrow et Tomb Raider), en attendant Ocean’8 et son impressionnant casting.
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Tout commence avec Sigourney Weaver dans Alien
Derrière ces films se cache la popularisation d’un type d’héroïne inédit dans le cinéma d’action américain. Cette révolution à infusion lente a démarré en 1979 avec le personnage du Lieutenant Ripley incarné par Sigourney Weaver dans le premier Alien de Ridley Scott. Avec Ripley apparait un modèle de femme foncièrement nouveau : guerrière, sa sexualisation passe désormais par l’expression de la puissance de son corps athlétique et transpirant (et non pulpeux et lisse); indépendante, elle n’évolue dans l’ombre d’aucun personnage masculin; active, elle est le principal moteur du récit.
Si certains reprocheront à ce nouveau modèle sa forme uni-dimensionnelle – en se faisant guerrière, la femme perd plus souvent que les hommes son droit à une vie amoureuse -, il fera une première fois des émules au début des années 90 à travers Thelma et Louise (1991) – film à nouveau réalisé par ce féministe ignoré qu’est Ridley Scott – et avec le personnage incarné par Linda Hamilton dans Terminator 2 (1991) de James Cameron – autre réalisateur ayant très tôt intégré des personnages féminins forts dans ses films. Le phénomène prend de l’ampleur au tournant des années 2000 avec Michelle Yeoh dans Demain ne meurt jamais (1997) et Tigre et Dragon (2000) – le cinéma de Hong-Kong ayant généré des stars féminines de films d’action dès les années 60 – , Angelina Jolie dans les Lara Croft (2001 et 2003), Milla Jovovich dans la saga Resident Evil (2002-2016) et Uma Thurman dans le diptyque Kill Bill (2003 et 2004).
Combattantes sexualisées, héroïnes teen et CGI girl
Mais c’est paradoxalement à l’aube de ce siècle nouveau qu’il tombe sous le coup d’une double typologie de représentation encore en vogue aujourd’hui : d’un coté les combattantes sexualisées et de l’autre les héroïnes teen. Les premières ont pour mères Uma Thurman et Angelina Jolie (on pourrait même rajouter Britney Spears dans son clip Toxic). Tenues de cuir moulantes, grande habileté aux combats et plastiques irréprochables, elles proposent une mutation de la femme fatale en guerrière de choc, en arme létale. Les secondes, les héroïnes teen, ont pour ancêtre Hermione Granger de la saga Harry Potter (et peut-être aussi Jeanne d’Arc). Belles sans en être conscientes, autant vierges d’expérience sexuelle que combative, ces innocentes possèdent un don caché qui en fait des chefs de gang en puissance. A ces deux figures s’ajoute de nos jours celle de la femme virtuelle inaugurée avec Avatar (2009) du même James Cameron. Retravaillée en post-production par les effets spéciaux, cette CGI girl n’est jamais complètement humaine. Cette étrangeté entraine une mise à distance par rapport aux deux modèles déjà cités : elle est moins désirable que la combattante sexualisée et n’a pas le potentiel de leadership de l’héroïne teen.
Malgré l’emprise de ce stéréotype à trois visages, on ne peut que se réjouir de la multitude d’actrices aujourd’hui capables d’endosser le rôle principal d’un film d’action. D’autant que les années 2010 semblent enfin témoigner de l’avènement du genre dans sa déclinaison féminine. Nous avons donc sélectionné les dix actrices qui montrent que la femme est aujourd’hui l’avenir du cinéma d’action américain :
1. Scarlett Johansson
Type : 70% combattante sexualisée, 30% CGI girl
On l’a vu dans : The Island, Iron Man 2, Avengers, Avengers : l’ère d’Ultron, Ghost in the Shell, Lucy, Captain American : Le Soldat de l’hiver, Captain America : Civil War, Thor : Ragnarok
Et avant : L’américaine de 33 ans a été révélée par le cinéma indé de Sofia Coppola avec Lost in Translation (2003). En plus d’être l’égérie number one du cinéma d’action féminin, elle s’est taillée un joli CV dans le cinéma d’auteur en travaillant avec Woody Allen, Christopher Nolan, Spike Jonze, Brian De Palma, Jonathan Glazer et les frères Cohen.
Spécificité : Bien qu’êtremement sexualisée, Scarlett incarne véritablement la figure de la guerrière contemporaine. Aussi super-héroïne que cyborg, alien ou même intelligence artificielle à ses heures, elle est aussi la femme du futur et ce même dans ses films moins commerciaux comme Her ou Under the skin. A ce titre, elle est l’exemple type de l’actrice qui fait de sa carrière une oeuvre avec des effets de discours cohérents et articulés.
Poids économique : Pour le film à venir sur son personnage de la Veuve Noire, l’actrice devrait toucher un salaire record de 25 millions de dollars. Mais bon, il s’agit toujours de la moitié du salaire proposé à Robert Downey Jr. pour Avengers…
2. Jennifer Lawrence
Type : 33% héroïne teen, 33% CGI girl, 33% combattante sexualisée
On l’a vu dans : X-Men : le commencement, la saga Hunger Games (4 films), X-Men : Days of future past, X-Men : Apocalypse, Red Sparrow, Passengers
Et avant : Elle a également été révèlée par le cinéma indépendant pour son rôle dans Winter’s Bone (2010), avant de rapidement prendre part à la franchise X-Men et de devenir une star mondiale avec Hunger Games. A noter qu’elle a remporté un oscar de meilleure actrice en 2013 pour Happiness Therapy.
Spécificité : Elle est la seule à pouvoir contester à Scarlett Johansson son statut de reine du cinéma d’action féminin. Mais contrairement à Scarlett, Jennifer brille plus par sa polyvalence qu’à travers une spécificité propre. Avec Red Sparrow, elle achève sa mue d’héroïne teen (Hunger Games) en combattante sexualisée, corde qui manquait jusque-là à son arc.
Poids économique : La jeune femme se débrouille plutôt bien puisqu’elle aurait touché 20 millions de dollars une première fois pour Passengers et une seconde pour Red Sparrow, soit nettement plus que son partenaire masculin dans chaque film (Chris Prat aurait reçu 12 millions pour Passengers et Joel Edgerton seulement 6 pour Red Sparrow).
3. Gal Gadot
Type : 100% combattante sexualisée
On l’a vu dans : Batman vs. Superman : L’aube de la justice, Wonder Woman, Justice League
Et avant : Avant d’incarner Wonder Woman dans le film de Patty Jenkins, cette ex-Miss Israël aura longtemps joué des personnages féminins secondaires dans des films d’actions – la saga Fast and Furious, Triple 9 (2016) ou encore Night and Day avec Tom Cruise (2010).
Spécificité : Passée par le service militaire obligatoire en Israël mais également désignée femme la plus sexy l’an dernier par le magazine FHM, Gal Gadot est la parfaite illustration de la combattante sexualisée.
Poids économique : L’information selon laquelle Gal Gadot aurait été payée 46 fois moins qu’Henry Cavill (son pendant masculin dans Man of Steel, 2013) était fausse. Il semblerait que chacun des acteurs ait reçu un chèque « très modeste » de 300 000 dollars pour leur premier film de super-héros.
4. Charlize Theron
Type : 95% combattante sexualisée, 5% CGI girl (son bras manquant dans Mad Max : Fury Road)
On l’a vu dans : Prometheus, Mad Max : Fury Road, Atomic Blonde, Fast and Furious 8, Blanche Neige et le Chasseur I et II
Et avant : Comme beaucoup de combattantes sexualisées, Charlize Theron vient du mannequinat. Elle est révélée au cinéma en 1997 dans L’Associé du diable où elle partage la vedette avec Al Pacino et Keanu Reeves. Par la suite, elle s’illustrera soit avec de grands rôles dramatiques (son personnage dans Monster de Patty Jenkins lui permettra de remporter un oscar de meilleure actrice en 2004), soit avec des personnages féminins secondaires dans des films d’action.
Spécificité : A la croisée de deux figures du cinéma d’action féminin (Patty Jenkins pour Monster et Ridley Scott pour Prometheus), Charlize Theron a frappé un grand coup avec son personnage de Furiosa dans Mad Max : Fury Road de George Miller (2015). Furiosa constitue sans doute la seule figure de femme à se hisser à un niveau de complexité et de force égal au Lieutenant Ripley d’Alien. De plus, elle incarne dans Atomic Blonde le rôle d’une héroïne de film d’action non-seulement principale mais aussi bisexuelle. Fort.
Poids économique : Egalement productrice d’Atomic Blonde, l’actrice d’origine sud-africaine touche un pourcentage des recettes du film, ce qui lui permet d’atteindre un salaire de plus de 10 millions de dollars.
5. Alicia Vikander
Type : 50% combattante sexualisée, 50% héroïne teen
On l’a vu dans : Tomb Raider
Et avant : Cette suédoise de 29 ans a été révélée en 2012 dans Royal Affair avant de s’illustrer dans des films assez classieux comme Anna Karénine et The Danish Girl (pour lequel elle a remporté un oscar de meilleur second rôle féminin en 2016). Elle apparait également au second plan de films d’action et de science-fiction comme Ex-Machina, Le Septième Fils, Jason Bourne ou Agents très spéciaux : code UNCLE.
Spécificité : Dans Tomb Raider, elle dépoussière complètement Lara Croft. Moins femme fatale qu’Angelina Jolie, elle dote l’aventurière d’une dimension teen débarrassée de l’excessive sexualisation du personnage. Il lui reste encore à s’émanciper de son statut de petite fille pour trouver sa propre vision de l’héroïne la plus célèbre du jeu vidéo.
Poids économique : Pour son premier rôle principal dans un film d’action, elle aurait été payée 8 millions de dollars. Un chiffre qui devrait être revu à la hausse en cas de suite.
6. Margot Robbie
Type : 100% combattante sexualisée
On l’a vu dans : Suicide Squad
Et avant : C’est après son rôle de femme de Leonardo DiCaprio dans Le Loup de Wall Street que l’actrice est devenue une star mondiale. Par la suite on a pu la voir dans Tarzan, Diversion et cette année dans Moi, Tonya.
Spécificité : A seulement 27 ans, Margot Robbie est l’une des actrices les plus influentes et désirées d’Hollywood. Malgré un casting plutôt dense, elle est parvenue à s’imposer comme La star de Suicide Squad. Elle s’affirme comme l’héritière de Charlize Theron et devrait vite grimper dans ce classement.
Poids économique : Si Will Smith a été payé 20 millions de dollars pour Suicide Squad, Margot Robbie et ses 8 millions est un peu mieux lotie que Jared Leto et ses 7 millions, Là encore, son salaire devrait être revu à la hausse pour les prochains films de la franchise.
7. Daisy Ridley
Type : 80% héroïne teen, 20% combattante sexualisée
On l’a vu dans : Star Wars VII : Le Réveil de la Force et Star Wars VIII : Les Derniers Jedi
Et avant : Cette jeune londonienne était complètement inconnue avant d’être engagée par J. J. Abrams. A peine avait-elle tourné dans quelques court-métrages, un clip et un film d’horreur indépendant.
Spécificité : Après Felicity Jones dans Rogue One, elle prouve que la saga la plus célèbre de tous les temps met désormais les femmes au centre de l’action. Un signe.
Poids économique : Payée « seulement » 300 000 dollars pour Le Réveil de la Force, elle a vu son salaire multiplié par 20 pour Les Derniers Jedi. On vous laisse faire le calcul.
8. Zoe Saldana
Type : 100% CGI girl
On l’a vu dans : Avatar, Star Trek, Star Trek Into Darkness, Star Trek : Sans limites, Les Gardiens de la Galaxie, Les Gardiens de la Galaxie vol. 2
Et avant : Elle débute dans des teen movies dansant, où elle donnera notamment la réplique à Britney Spears et à Kirsten Dunst. Après avoir enchainé plusieurs petits rôles, elle sera révélée dans Star Trek en 2009.
Spécificité : En terme de films, Zoe Saldana rivalise avec Scarlett Johansson et Jennifer Lawrence. Son problème est d’avoir des rôles de moins grandes envergures et d’être surtout masquée par les effets spéciaux. Elle est la reine incontestée des CGI girl, mais une reine au vrai visage inconnu du grand public.
Poids économique : L’actrice aurait été payée 14 millions de dollars pour Les Gardiens de la Galaxie 2. Une somme tout à fait correcte au regard de sa notoriété relative par rapport aux autres actrices de ce classement.
9. Cara Delevingne
Type : 90% combattante sexualisée, 10% héroïne teen
On l’a vu dans : Suicide Squad, Valérian et la cité des milles planètes
Et avant : D’abord mannequin, elle a commencé sa carrière au cinéma avec une apparition dans Anna Karénine en 2012. Mais son premier vrai rôle principal, elle le décroche dans une comédie romantique intitulée La Face cachée de Margo (2015).
Spécificité : On sent chez Cara Delevingne un potentiel inexploité. Sans doute encore trop inexpérimentée au niveau de son jeu d’actrice, son visage androgyne et sa bisexualité revendiquée en font pourtant un modèle de femme assez singulier dans le paysage actuel.
Poids économique : Cette star de la presse people aurait été payée moins d’un million pour Valérian, une somme ridicule à cette échelle. Mais au regard de ce que lui rapporte son activité de modèle, s’en soucie-t-elle vraiment ?
10. Shailene Woodley
Type : 100% héroïne teen
On l’a vu dans : Divergent 1, 2 et 3
Et avant : Elle a été révélée dans The Descendants d’Alexander Payne en 2011. Elle y incarnait la fille de George Clooney. Elle a ensuite tourné dans le teen movie The Spectacular Now aux cotés de Miles Teller.
Spécificité : Si Jennifer Lawrence a changé de dimension après Hunger Games, ce n’est pas le cas de sa jumelle et à l’époque concurrente Shailene Woodley. L’actrice a depuis délaissé le genre du film d’action pour tourner chez Greg Araki (White Bird, 2014), Oliver Stone (Snowden, 2016) et surtout dans la série Big Little Lies où elle tient l’un des rôles principaux derrière Reese Witherspoon et Nicole Kidman.
Poids économique : Pour le premier Divergent, elle avait signé pour un montant situé entre 250 et 500 000 dollars, soit environ la même somme que Jennifer Lawrence pour le premier Hunger Games, une égalité qui se déséquilibrera par la suite au désavantage de Shailene Woodley.
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