La légende du film qui n’existait pas se disloque totalement à sa naissance.
Si, selon le vieil adage rivettien, tout film est le documentaire de son tournage, L’homme qui tua Don Quichotte a ceci de particulier que ce documentaire (de son tournage interrompu) existe déjà. Il a même devancé de quinze ans le film repris et terminé (Lost in La Mancha, 2002). Comble de l’ironie : le scénario, depuis l’origine, raconte le tournage impossible d’un film sur Don Quichotte.
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Si le film recycle sans grande inspiration tous le vernis du film de tournage moderniste avec cinéaste en crise puis en fugue (filiation Huit et demi), quelque chose fascine dans la façon dont le récit anticipe, prophétise, commente sa chaotique genèse. A la fin, le film de la fiction ne se fera jamais et le metteur en scène, aliéné a son personnage, erre à jamais dans la pampa de ses fictions.
Le film de Terry Gilliam en revanche a fini par se faire. Mais avec son souffle époumoné, son imagerie désuette, son rêve contrarié de gigantisme, il apparaît hélas comme l’élément surnuméraire et incongru d’une légende qui se déployait jusque-là sur son inexistence.
L’homme qui tua Don Quichotte de Terry Gilliam (Esp., G.-B., Fr., Port., Bel., 2018, 2 h 12)
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