Reportage dans l’important cortège parisien de la grève mondiale de la jeunesse pour le climat, vendredi 15 mars. Collégien.ne.s, lycéen.ne.s et étudiant.e.s sont plus « déter » que jamais pour faire pression sur la classe politique et « sauver la planète ».
La date était très attendue : ce vendredi 15 mars, rendez-vous était pris un peu partout sur Terre pour la grève mondiale de la jeunesse pour le climat, dans le sillage de Greta Thumberg. Lancée à l’initiative de lycéen.ne.s et d’étudiant.e.s, aux avant-postes de cette lutte depuis maintenant plusieurs mois et soutenu.e.s par plusieurs ONG et assos, elle a finalement réuni plus de 2 000 manifestations dans 125 pays. “Nous sommes le futur. Nous sommes la dernière génération, la dernière chance donnée au monde”, écrivent les auteurs du manifeste de la génération climat, dont Les Inrocks ont publié les bonnes feuilles.
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A Paris, c’est d’une place du Panthéon (Ve arrondissement) ultra remplie qu’est partie la marche, direction Les Invalides. Et, le moins que l’on puisse dire, c’est que les jeunes étaient “déter” comme jamais à sauver la planète et à mettre les politiques face à leurs responsabilités, comme ils et elles l’ont chanté, avant d’entamer un énergique “clapping”.
« La planète, ce n’est pas de la poudre de perlimpinpin”
“Et 1, et 2, et 3 degrés, c’est un crime, contre l’humanité!”, “On est plus chauds, plus chauds, plus chauds que le climat” ou encore “anti, anti, anti-capitalisme” : voilà ce qu’on pouvait entendre dans ce cortège massif, joyeux, un peu bordélique aussi, des milliers de jeunes gens ayant fait le déplacement (29 000 selon la police, 50 000 selon les organisateurs).
Beaucoup avaient amené des pancartes portant des inscriptions toutes plus créatives les unes que les autres : “On a gagné la coupe du monde avec Giroud. On peut sauver la planète”, “Un seul hêtre vous manque, et la Terre est dépeuplée”, “The planet is getting hotter than young Johnny Depp”, “Sauvez-la planète : mangez un riche”, “La planète, ce n’est pas de la poudre de perlimpinpin”. D’ailleurs, de nombreux messages dénoncent – moquent – Emmanuel Macron et sa politique.
Leur projet à eux et elles ? Sauver la planète. Des jeunes marchent vers le Panthéon, à Paris, pour la grève mondiale pour le climat #Youth4Climate pic.twitter.com/mrA7JUjd0E
— Amélie Quentel (@ameliequentel) March 15, 2019
“Le gouvernement ne fait absolument rien”
Tania, Pauline et Elsa, trois lycéennes en banlieue parisienne, expliquent ainsi que “comme le gouvernement ne fait absolument rien”, c’est aux jeunes d’agir. Dont acte : arborant des gants de protection, les jeunes filles de 16 ans ramassent les déchets qui se présentent sur leur chemin, joignant ainsi l’utile – manifester – à l’utile – rendre nos rues plus propres.
Tania, Pauline et Elsa manifestent tout en ramassant les déchets sur leur chemin. C’est déjà leur deuxième sac rempli depuis la place du Panthéon… située à peine à 5 min à pieds #YouthForClimate pic.twitter.com/8FYvUWKnkq
— Amélie Quentel (@ameliequentel) March 15, 2019
Elsa, qui cite le récent et alarmant rapport du Giec (voir ce papier de L’Huma), regrette que les politiques “privilégient l’argent à l’environnement”, et estime que c’est tout le système qu’il s’agit de revoir. “On voit bien que le capitalisme, ça ne fonctionne pas.” Les trois amies sont venues avec conviction manifester, dénonçant le fait que le ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer ait demandé l’organisation de débats dans tous les lycées sur le changement climatique… Le même jour que la grève mondiale pour le climat, prévue de longue date. “C’est n’importe quoi. C’est pour nous empêcher de manifester.”
“Cela donne vraiment de l’espoir”
Elles seront demain à la “Marche du siècle” organisée par les associations de “l’Affaire du siècle”, qui viennent de déposer un recours administratif contre l’Etat pour “inaction climatique”. On croise d’ailleurs dans le cortège Marie Toussaint, la présidente de l’ONG “Notre Affaire à tous” à l’origine de cette action en justice. Elle est “hyper contente et émue” de voir autant de jeunes dans la rue aujourd’hui : “Cela donne vraiment de l’espoir. Il y a une vraie colère, mais aussi une réelle détermination à agir, et à affirmer que l’on peut y arriver ensemble.” La militante rappelle que, pour la “Marche du siècle”, le printemps sera “climatique et social”, une convergence avec la manifestation des gilets jaunes étant prévue.
D’autres aimeraient aussi une convergence entre les différentes générations, à l’image d’Elisabeth, 72 ans, venue manifester avec les jeunes. Cette membre de Greenpeace, estime qu’il “est important de faire le lien entre les personnes de tous les âges », de façon à ce qu’il y ait une prise de relai. Elle est par ailleurs impressionnée de la foule de jeunes “très jeunes” s’étant déplacé.e.s : “Ces derniers temps, on avait l’impression d’être anesthésiés. Ce qui se passe est vraiment super.”
“On n’a pas le choix”
Robinson, élève de cinquième âgé de 15 ans, ne pouvait pas manquer la manifestation d’aujourd’hui : “On n’a pas le choix, on doit tout faire pour que la pollution diminue.” Pour rappel, un nouveau rapport de la Société européenne de cardiologie affirme que 9 millions de personnes décèdent tous les ans dans le monde à cause de l’air pollué. L’adolescent, qui tient fermement une pancarte montrant un globe terrestre avec le message “Souriez, vous allez crever”, tance : “On ne veut pas mourir alors que ça fait très peu de temps que l’on est sur Terre.” Et d’évoquer la déforestation massive en Amazonie ou la disparition d’espèces animales – “si elles disparaissent toutes, cela va être notre cas aussi”… Pour lui, il s’agirait à la fois que tout le monde adopte de meilleurs comportements – “faire du compost, consommer local…” – mais aussi “que le gouvernement agisse”.
En fait, ces jeunes gens sont impressionnants de connaissances, de lucidité et de maturité sur le sujet. Voilà qu’un petit garçon de douze ans, venu avec sa babysitter, nous parle du climato-scepticisme de Jair Bolsonaro, au Brésil, ou de celui deTrump, aux Etats-Unis. “En classe, j’ai un professeur d’histoire-géo très impliqué sur la question du changement climatique. Du coup, je suis stressé, c’est la dèche, c’est pour ça que je suis venu manifester.” L’est-il moins à présent, en voyant tous ces gens venus partager le même combat que lui ? “Il faudra voir les retours de la manifestation.” Selon un communiqué de presse des organisateurs et organisatrices de l’initiative, il y aurait eu 150 000 jeunes en grève aujourd’hui en France, pour plus de 750 000 dans le monde.
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