S’il déroule son récit à Lesbos au pic de la crise migratoire, ce premier film déjoue le pathos et séduit grâce à la drôlerie de ses personnages.
La perspective d’un film sur une jeune Franco-Grecque retournant à Lesbos pour y croiser pêle-mêle les fantômes d’une famille divisée (un beau-père mal-aimé occupant seul la maison qu’il partageait avec la mère jusqu’au décès de cette dernière) et la ligne de front de la crise migratoire (l’action se passe pendant l’été 2015, où des dizaines de milliers de réfugiés s’entassèrent sur l’île et lui valurent le surnom de “Lampedusa grecque”) n’augurait rien de bon : on voyait déjà venir les soliloques vaseux sur la condition exilée et la culture traversant les frontières, les regards perdus vers l’horizon et les cours improvisés de sirtaki aux réfugiés.
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Certes, on mentirait si l’on prétendait que Meltem est vierge de tout cliché et autres clins d’œil lourdauds : on y observe les oiseaux (qui déménagent en Afrique, eux, comme quoi, hein !), on se crêpe le chignon sur la nationalité de Zizou (français ou algérien ?) et il y a, bel et bien, une scène ou un grand garçon Noir se joint à une danse traditionnelle. Mais ces banals excès de sérieux y sont sans cesse mis à mal par Nassim et Sekou, pieds nickelés banlieusards qu’Elena, l’héroïne, semble avoir embarqués par erreur dans ses bagages : deux grelots de drôlerie comme exfiltrés d’un autre film, qui viennent égayer et hérisser celui-ci, teinter d’insolence la fable contemporaine.
À l’image de leur rencontre avec Elyas, réfugié syrien dont l’apparition est une caricature de mélancolie : en pleine impro de clarinette sur une plage, le regard perdu vers l’horizon (on vous avait prévenus), avant que Sekou ne l’interrompe : “Nous aussi, on sait être romantiques, la mer, les poèmes et tout…” Il a failli dire Le Ciel, les oiseaux et… ta mère !, et on avoue y avoir vaguement pensé face à ce cocktail de vacances, de lascars périurbains et de frictions culturelles, qui a fort heureusement mais de justesse su éviter la gravité.
Meltem de Basile Doganis (Fr., Gr., 2017, 1 h 27)
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