Un pas de géant doublé d’un “retour aux sources” : après plusieurs mixtapes, le rappeur belge Hamza propose un premier album ambitieux et riche en invités.
De son propre aveu, Hamza est un gars réservé, un peu timide, pas forcément à l’aise avec l’exercice promotionnel. Tout l’inverse, en somme, de ses clips où il domine l’espace, hausse les épaules et joue un personnage, sensible et charmeur, certes, mais surtout séducteur et intrépide. “Dans mes textes comme dans mes clips, précise-t-il, j’aime les mises en scène, les récits très imagés.”
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Il aurait pourtant des choses à raconter : son enfance à Laeken, une commune de Bruxelles, la disparition de son père l’année dernière, cette famille qu’il assume économiquement et moralement depuis, son rapport ambigu à la célébrité ou encore ses tourments “que l’alcool soigne”. Mais non, Hamza n’est pas du genre à faire larmoyer. Il a choisi d’interpréter un rôle. Bigger than life, forcément, quand on sait que le Belge n’a jamais vraiment été taillé pour les boulots ordinaires. À l’écouter parler, posé tranquillement sur un rooftop parisien, il donne l’impression d’être voué à quelque chose de plus grand. “À 14 ans, j’ai compris que je voulais dédier ma vie à la musique, rembobine le rappeur, comme pour justifier son ambition. J’ai bien fait quelques petits jobs, notamment dans le nettoyage, mais je me sentais trop confiant au moment de la sortie de H-24, en 2015. J’ai compris que c’était le moment de tenter ma chance et d’imposer mes idées.”
Une évolution ambitieuse
Des idées, celui qui rêve d’une carrière à la Drake en a plein la tête. A commencer par son label (Just Woke Up), sur lequel il se verrait bien à l’avenir signer des acteurs, des sportifs ou tout ce qui le passionne. Et puis surtout ces mixtapes, bourrées d’idées inédites de ce côté-ci de l’Atlantique : H-24, Zombie Life, 1994, toutes inventent le paradigme du r’n’b moderne, capable de réconcilier les fans de Michael Jackson et de Matt Houston. La comparaison le fait éclater de rire, mais Hamza se dit flatté. Visiblement, les deux artistes sont de vraies influences, même si Paradise, son premier véritable album, évite les codes éculés de ses héros. Lui-même en a pleinement conscience : il tient là son projet le plus ambitieux, celui qui devrait lui permettre de “taper plus haut en attendant la suite”. Et d’ajouter : “Etre méticuleux, j’ai appris à le devenir après ‘Zombie Life’, qui a été plutôt mal reçu. Parce qu’il était peut-être trop expérimental et parce que j’étais tout le temps défoncé en studio à cette époque… Depuis, je me suis remis en cause, je travaille beaucoup plus afin qu’un maximum de gens kiffent ma musique.”
Divin exile
Pour cela, Hamza s’est exilé quinze jours durant à Los Angeles en décembre dernier. C’est là, dans les rues idylliques de Venice Beach, qu’il prend du recul sur les morceaux accumulés depuis presque un an et capte “les bonnes vibes de la ville de GTA V”. Oz, membre actif du collectif de producteurs belges Street Fabulous est à ses côtés. Les potos Caballero & JeanJass, en vacances dans le coin, viennent également passer une tête en studio. Tous, à l’entendre, sont enthousiasmés par ce projet qui prend forme peu à peu. Celui d’un jeune homme bien conscient que le paysage musical mute en permanence et que “nous sommes obligés d’être en évolution constante. En s’ouvrant aux autres, notamment.”
Un éventail de collaborations
Sur Paradise, on retrouve ainsi SCH, Aya Nakamura le temps d’un Dale x Love Therapy à l’inventivité incroyable, mais aussi Chris(tine And The Queens) et Oxmo Puccino sur Minuit 13, ultime morceau fascinant d’émotion et de maîtrise mélodique. “L’année dernière, j’écoutais beaucoup ‘Everybody’s Got to Learn Sometime’ des Korgis. Plutôt que de simplement le sampler, j’ai demandé à Christine de chanter les paroles par-dessus. J’avais sa voix en tête… Pareil pour Oxmo. Je cherchais un narrateur, et sa présence me paraissait évidente.”
Un retour aux sources
Dans la foulée, on lui parle de ce duo avec Jaden Smith teasé sur les réseaux, mais Hamza n’a pas le droit d’en dire plus, confirmant simplement qu’un morceau a bel et bien été enregistré. Changement de sujet, évocation de cette pochette, magnifique, envisagée comme un clin d’œil à Nirvana. Une façon aussi, selon lui, d’appuyer l’idée du projet : “’Paradise’ symbolise une remise en question, un retour aux sources. C’est pour ça que la pochette a été réalisée au Maroc, mon pays d’origine, et qu’elle me montre seul sous l’eau, en train d’étouffer, un peu perdu, entre la vie et la mort.” Résonnent alors ces mots, à la fois lumineux et tourmentés, entonnés avec nonchalance sur la chanson titre : “Parfois je vis, demain je meurs.”
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