Retour sur la carrière de l’un des beaux gosses modernes de la télé américaine, connu pour son rôle dans “Beverly Hills” et vu récemment dans “Riverdale”. Luke Perry avait 52 ans.
Un peu partout sur les réseaux sociaux, les timelines de quadras se répandent en messages d’amour sincère et éploré pour l’une des plus grandes idoles des années 90, disparue à cinquante-deux ans. Luke Perry, terrassé par un AVC jeudi 28 février à son domicile de Sherman Oaks, et mort ce lundi 4 mars à Burbank, a incarné pour une génération le beau gosse idéal, version moderne et faussement clean du bad boy hollywoodien éternel et irrésistible. Il était Dylan dans Beverly Hills (1990-2000) : un lycéen intelligent et solitaire conduisant sa Porsche et laissant plus que de raison sa chemise ouverte, voire tombant carrément le haut comme pour cette couverture mythique de Vanity Fair en 1992, où l’acteur apparaissait en post-James Dean à la cool, flingue à la main. Le titre de une, impitoyable, posait la question “Is Luke a Fluke ?” – Luke est-il un simple chanceux ? – pour s’interroger sur la capacité du cool kid à durer.
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Parmi les couples les plus adulés de l’histoire
Venu de l’Ohio, Perry avait été imposé par le producteur Aaron Spelling comme l’un des rôles principaux de la série ado (même s’il avait près de vingt-cinq ans !) contre l’avis de la chaîne Fox et ne faisait d’ailleurs pas partie du casting du pilote. Son parcours dans Beverly Hills devait au départ s’achever très vite. Mais il a fini par rester six saisons complètes, avant un comeback lors des deux dernières, largement pour raisons financières. Le temps de laisser une trace profonde dans ce rôle d’enfants de parents divorcés et toxiques, lui-même alcoolique et drogué, formant parmi les couples les plus adulés de l’histoire du petit écran avec Brenda (Shannon Doherty) puis Kelly (Jennie Garth).
Dans la vie, Perry était aussi le fils de parents séparés et d’un patriarche alcoolique et violent. S’il n’a jamais complètement réussi à s’imposer au cinéma dans des rôles prestigieux – il était apparu notamment dans Le Cinquième élément et a tourné une scène du prochain Tarantino, Once Upon A Time in Hollywood –, Perry a néanmoins largement survécu à Dylan et à la télé populaire très blanche et très riche concoctée par Aaron Spelling, également producteur de Dynastie. Le beau Luke avait déjà de bonnes bases dans la vie pour s’émanciper et connaitre d’autres expériences. Au début des années 90, l’une de ses meilleures amies s’appelait Eva Destruction. Ce qui fit dire à Madonna (dont il fut proche) cette phrase parfaite : “Quiconque traîne avec des drag queens est mon ami”.
De Beverly Hills à John From Cincinnati
Le premier à voir en lui un acteur compatible avec les séries dites “adultes” de l’âge d’or contemporain fut Tom Fontana, le showrunner de Oz, essentielle série de prison diffusée sur HBO. Lors de la quatrième saison, en 2001, Perry interprétait un ex-révérend emprisonné pour détournement de fonds, maltraité par des bikers, et qui finirait très mal. Après un détour par la concurrente Showtime pour la série post-apocalyptique Jeremiah (2002-2004), Perry a retrouvé HBO quelques années plus tard et entamé alors l’une des expériences sérielles les plus barrées des années 2000 : John From Cincinnati, un drame centré sur des surfeurs au bout du rouleau co-crée par l’inénarrable David Milch (NYPD Blue, Deadwood). Dans une atmosphère mystique et cabossée, Perry jouait un agent inquiétant. A quelques kilomètres des fastes de Los Angeles, au bord du Pacifique, il apportait une touche définitivement noircie au rêve californien. Dix épisodes plus tard, cet OVNI absolu était annulé. De Beverly Hills à John From Cincinnati, peu d’acteurs peuvent se targuer comme Luke Perry d’avoir participé à l’une des séries les plus populaires de l’ère moderne, et à l’une des plus cultes…
Ces dernières années, amaigri et fragile, Perry était réapparu dans le rôle d’un père émouvant en chemise de bucheron dans Riverdale, une série ado qui a avalé toutes les séries ado pour en sortir un remix assez stylé et très regardé – on la trouve en France sur Netflix. C’est ainsi que ce père de deux enfants s’est fait connaitre des millennials après avoir ensorcelé leurs parents, mais à travers une version plus triste de lui-même. L’AVC l’a frappé le jour où venait d’être annoncé un reboot à venir de Beverly Hills avec le casting original… sauf Shannen Doherty et lui. Luke Perry avait refusé d’y apparaitre, évoquant un agenda trop chargé. Comme s’il n’avait pas souhaité retoucher l’image née un quart de siècle plus tôt, ce symbole d’une époque où nous demandions à la fois beaucoup plus et beaucoup moins qu’aujourd’hui aux séries : nous tenir pendant des années en attente du prochain drame, du prochain baiser, du prochain rire, de la prochaine mort, avec la certitude que chaque épisode se ressemblerait un peu.
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