A l’heure où Parasite de Bong Joon Ho marque l’histoire en devenant l’un des films étrangers les plus oscarisés, retour sur ces thrillers sud-coréens qui ont eux aussi marqué le cinéma.
D’abord utilisé comme outil de résistance pendant l’occupation japonaise jusqu’en 1945, le cinéma sud-coréen à très rapidement su s’expatrier dans les festivals internationaux. Aujourd’hui, l’industrie du cinéma coréen a réussi à s’émanciper des critères hollywoodiens et a prouvé qu’il était encore, sur son propre marché, l’un des rares à concurrencer les blockbusters américains, mais il est également présent à la pointe du cinéma d’auteur mondial avec le stakhanoviste Hong Sang-Soo. Nous nous concentrerons toutefois ici sur les thrillers coréens qui nous ont marqués.
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La Palme d’Or à Cannes et les quatre statuettes aux Oscars pour Parasite de Bong Joon Ho sacrent aussi le dynamisme du cinéma sud-coréen. Depuis une vingtaine d’années, une nouvelle vague de réalisateurs s’approprie avec singularité le genre du thriller : entre film fantastique et horreur. Figures de proue de cette nouvelle vague, Park Chan-wook, Kim Jee-woon ou encore Bong Joon-Ho réinventent le genre en le nourrissant du passé et des traumatismes politiques de leur pays.
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Voici dix thrillers coréens qui méritent d’être vus :
Burning de Lee Chang-Dong (2018)
Burning livre le récit étrange d’un jeune coursier, Jongsu, qui tombe par hasard sur son ancienne voisine Hae-Mi, et tente immédiatement de le séduire. Alors qu’elle rentre d’un voyage à l’étranger, celle-ci s’affiche aux côtés de Ben, un garçon fortuné, pervers, arrogant et narcissique. Peu de temps après qu’un triangle amoureux s’établit et que Ben révèle à Jongsu son obscur secret, Haemi disparaît… Entre motif hitchcockien et enquête paranoïaque, Burning, adaptation des “Granges Brûlées” – une nouvelle de Murakami – est un thriller métaphysique qui trouve sa force tant dans sa description du réel que dans son approche poétique à l’écriture.
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The Chaser de Na Hong-jin (2009)
Joong-ho, ex-flic désormais proxénète, comprend que ses employées disparaissent les unes après les autres. Très vite, il réalise qu’elles ont toutes rencontré le même client et qu’elles sont potentiellement toutes victimes d’un tueur en série. En concurrence avec la police, Joong-ho se lance alors dans une chasse à l’homme, persuadé qu’il peut encore venir en aide à Mi-jin, la dernière victime. The Chaser vient réveiller au plus profond de nous un mélange de sentiments fort et insupportable à la fois. Na Hong-jin irrigue son film entre légèreté et violence, sordide et jubilation, noirceur et comédie : bref, un équilibre remarquable.
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Memories of Murder de Bong Joon Ho (2004)
Bong Joon Ho aime mélanger les genres. Memories of Murder est un polar entremêlé d’une pointe de comédie, aussi foutraque et trivial que soutenu et poétique. Dans la province de Gyunggi, le cadavre d’une femme est retrouvé dans la campagne. Alors que plusieurs crimes identiques sont découverts peu de temps après, la rumeur de meurtre commis par un tueur en série s’installe. L’enquête est rapidement confiée à un policier local ainsi qu’un détective spécialement envoyé de Séoul à sa demande. Face au manque total de preuves concrètes, les deux hommes sombrent peu à peu dans le doute, l’obsession et l’impuissance… En plus d’une lumière et d’un décor magistral, le génie de Bong Joon Ho réside dans son approche méthodique à relater un fait divers des années 80. Si la notion de mémoire (présente dans le titre) fait appelle au traumatisme vécu, Memories of Murder se moque d’un système policier précaire et aveuglé.
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The Strangers de Na Hong-jin (2016)
Sélectionné Hors Compétition en 2016 au Festival de Cannes, The Strangers se déroule dans un petit village des montagnes coréennes. Tandis qu’une série de meurtres sauvages se produit et que l’enquête policière piétine, les soupçons vont se porter vers un vieil étranger vivant en ermite dans les bois attisant rumeurs et superstitions. Mais face à l’incompétence des autorités pour trouver une explication sensée, certains villageois demandent l’aide d’un chaman. Entre ésotérisme et surnaturel, Na Hong-jin pousse les codes du thriller vers le film d’horreur.
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Mademoiselle de Park Chan-Wook (2016)
Ne pas citer Park Chan-Wook n’aura pas de sens, depuis son succès avec Old Boy en 2004, le cinéaste s’est imposé tel l’icône de l’élan du “Hallyuwood” (nom donné à l’industrie du cinéma sud-coréen). Son récent thriller psychologico-érotique – trois fois nommés au Festival de Cannes en 2016 – pose son cadre en Corée dans les années 1930, et plus précisément lors de la colonisation japonaise. Sookee, une jeune femme, est engagée comme domestique pour être au service d’une riche japonaise, Hideko, vivant recluse dans un immense manoir. Sookee obéit aux ordres du comte Fujiwara, qui s’avère être un dandy malfaiteur. Son but : manipuler la princesse et la convaincre de se laisser épouser pour capter l’héritage. Park Chan-Wook, à travers une esthétique romanesque, filme avec une sensualité d’expert, non seulement un trio de protagonistes brillants, mais surtout un duo d’actrices qui en devient presque mystique.
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https://www.youtube.com/watch?v=40E5pL73yvM
Le Gangster, le Flic & l’Assassin de Lee Won-Tae (2019)
Présenté en Séance de minuit au Festival de Cannes l’année dernière, Le Gangster, le Flic & l’Assassin – contrairement à beaucoup de films sud-coréens – ne mélange pas les genres. Alors qu’un redoutable chef de gang a failli être assassiné, un inspecteur de police et le gangster en question vont unir leurs forces “contre nature” pour mettre la main sur l’assassin. Mais si le premier rêve de le voir derrière les barreaux, le deuxième n’a qu’une idée en tête : le voir mourir. Ici, pas de discours politique ou philosophique, Lee Won-Tae assume complètement une décomplexion du divertissement jubilatoire et généreux. Le Gangster, le Flic & l’Assassin incarne un cinéma d’action que l’on ne retrouve presque plus à Hollywood, des arguments scénaristiques sobre, simple et efficace.
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Dernier train pour Busan de Sang-Ho Yeon (2016)
L’état d’urgence est décrété, lorsqu’un mystérieux virus se répand en Corée du Sud. Les passagers du train KTX se lancent dans un combat sans répit afin de survivre jusqu’à Busan, l’unique ville où ils seront en sécurité. Le film, également présenté en Séance de minuit au Festival de Cannes en 2016, ne cherche pas pour autant à tomber dans le gore. Aucunement excessif dans l’action (fini les zombies The Walking Dead, les morts-vivants sont enfin plus athlétiques que cartoonesques), le cinéaste livre un récit lisible où la tension est savamment entretenue. Sang-Ho Yeon fabrique un film intelligent et dénonce les défauts de notre société.
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Hard Day de Kim Seong-hun (2015)
Nommé pas moins de quatre fois à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes en 2014, Hard Day jongle entre ton comique et macabre avec brio. Le film met en scène l’homicide involontaire du commissaire Ko Gun-Soo. Alors qu’il est en route pour assister aux funérailles de sa mère, il percute accidentellement un homme et décide de cacher le corps dans le cercueil de sa mère. L’enquête policière, menée par son partenaire, va se corser lorsque l’unique témoin de l’accident l’appelle pour le faire chanter. Scénario complexe, rythme extrêmement soutenu et esthétique épuré, Hard Day est à l’image du cinéma policier coréen, riche et florissant.
The Spy Gone North de Yoon Jong-bin (2018)
Décidément, les séances de minuit à Cannes pourraient constituer à elles-mêmes un festival réunissant le meilleur du cinéma sud-coréen. The Spy Gone North – projeté à une séance de minuit à Cannes en 2018 – se déroule à Séoul en 1993. Un ancien officier est recruté par les services secrets sud-coréens afin de rassembler des informations sur le programme nucléaire en Corée du Nord. Pour cela, il infiltre un groupe de hauts fonctionnaires de Pyongyang. Désormais pion des négociations politiques entre les gouvernements des deux Corées, l’espion va découvrir des secrets qui risqueraient de mettre en péril sa mission. Sans une once de manichéisme, Yoon Jong-bin représente un conflit politique entre Nord et Sud, mais surtout nous plonge dans ses coulisses.
J’ai rencontré le diable de Jee-Woon Kim (2011)
Un agent des services secrets se lance dans une expédition punitive afin de retrouver le tueur en série qui a tué sa fiancée enceinte. Avec un plan de vengeance diabolique en tête, l’homme de loi ne tardera pas à devenir le monstre qu’il traque. En 2011, le festival du film fantastique de Gérardmer a encensé le thriller de Jee-Woon Kim. Depuis, il a la réputation internationale du long-métrage ultra-violent et sanglant. Bien que machiavélique, J’ai rencontré le diable révèle par un scénario politisé et les dysfonctionnements du système policier.
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