Dans la nuit de dimanche à lundi aura lieu la 91e cérémonie des oscars – sans hôte, mais avec toutes les remises de prix diffusées en direct. L’occasion pour nous de faire un tour d’horizon des favoris des catégories les plus attendues de la soirée et d’encourager celles et ceux que nous aimerions bien voir gagner.
Les Oscars, cette année, ont plus fait parler pour leurs scandales que pour la compétition annoncée lors des nominations. En bref, la préparation de cette 91e cérémonie était plutôt folklorique : abandon de l’idée, bien sérieuse, d’un oscar du meilleur film « populaire », Kevin Hart rattrapé par ses tweets homophobes et évincé de la présentation, et enfin l’affaire des diffusions en différé, avant que l’Académie ne décide là encore de revenir sur sa décision.
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Alors, à l’approche du verdict final, il est encore temps de se concentrer sur la course aux statuettes. Si Roma et The Favourite s’annoncent comme les mieux placés de la soirée, quelques outsiders, comme Green Book ou Vice peuvent leur voler la vedette. Alors, oublions tous les problèmes, et lançons-nous dans les pronostics, tout en y ajoutant notre grain de sel en identifiant celles et ceux que nous aimerions voir gagner ou pas.
Meilleur film
Parmi les neuf films nommés à l’oscar du meilleur film, une dispute se prépare entre Roma et Green Book. Le premier, boosté par son Lion d’Or à Venise, a fait figure de favori tout au long de la saison des remises de prix, gagnant entre autres le BAFTA du meilleur film. Roma pourrait être par ailleurs le premier film de l’histoire des oscars à faire le doublé meilleur film et meilleur film étranger (catégorie où il est sûr à 100% de l’emporter). Mais puisque ça ne s’est jamais fait, on peut donc penser que Green Book pourrait en profiter, lui qui a en plus remporté le Golden Globe de la meilleure comédie et qui présente toutes les qualités nécessaires pour plaire à l’Académie (feel-good movie social, résonance politique, réalisateur apprécié outre-Atlantique…). De notre côté, on privilégie Green Book, cet hymne à l’amitié et au rire, plutôt que Roma, délire formel épris de lui-même.
Notre pronostic : Roma ou Green Book
Notre favori : Green Book
On pourrait éviter : Roma
Meilleure réalisation
L’ultra-favori de cette catégorie récompensant la meilleure réalisation est Alfonso Cuaron. Fort d’un premier succès dans cette catégorie en 2014 pour Gravity, Cuaron bénéficie aussi de cette tendance récente propre à l’Académie de distinguer des réalisateurs mexicains populaires aux Etats-Unis : A.G. Innaritu en 2015 (Birdman) et 2016 (The Revenant), puis Guillermo Del Toro l’an passé (The Shape of Water). Il rejoindra probablement la liste des dix-huit réalisateurs à avoir gagner deux fois l’Oscar du meilleur réalisateur (parmi lesquels Gus van Sant, Clint Eastwood et Quentin Tarantino). On voit mal le duo comico-politique Spike Lee (BlacKkKlansman) et Adam McKay (Vice) lui voler la vedette même si ce serait une façon pour l’Académie de reconnaître des auteurs précurseurs d’un cinéma post-Trump aussi engagé que corrosif par leur utilisation très caractéristique de la comédie. De notre côté, on pleure encore l’absence de Paul Schrader, oublié pour son magistral First Reformed…
Notre pronostic : Alfonso Cuaron pour Roma
Notre favori : Paul Schrader pour First Reformed (hors compétition)
On pourrait éviter : Yorgos Lanthimos pour The Favourite
https://www.youtube.com/watch?v=fp_i7cnOgbQ
Meilleur acteur
A l’image de la catégorie meilleur film, nous assisterons à un duel pour la statuette. La tendance actuellement va en faveur de Rami Malek, fascinant en Freddie Mercury dans Bohemian Rhapsody, qui a devancé son rival Christian Bale d’une courte tête dans la catégorie meilleur acteur aux BAFTA. De plus, Bale a déjà été récompensé d’un oscar pour son second rôle dans Fighter, paramètre qui pourrait profiter à Malek dont c’est la première nomination cette année. Toutefois, d’autres raisons nous font penser qu’il est difficile de les départager : les deux acteurs jouent dans le genre favori de l’Académie (un biopic) et ont été récompensés lors des Golden Globes (meilleur drame pour Malek, meilleure comédie pour Bale). Le rôle de Bale – Dick Cheney, monstre politique qui a influencé la politique gouvernementale de W. Bush – est aussi plus encré dans l’actualité. Imaginons, soyons fous, que la dispersion des votes entre les deux pourrait profiter à Viggo Mortensen, notre favori, magnifique en garde du corps/chauffeur aussi touchant que mange-tout dans Green Book.
Notre pronostic : Rami Malek (Bohemian Rhapsody) ou Christian Bale (Vice)
Notre favori : Viggo Mortensen (Green Book)
Meilleure actrice
C’est l’une des catégories les plus indécises de la soirée. Tout laisse à croire que l’oscar de la meilleure actrice fera l’objet d’un match à trois entre Olivia Colman, Glenn Close et Lady Gaga. La tendance actuelle donne un léger avantage à Olivia Colman (reine malade dans The Favourite et BAFTA + Golden Globe de la meilleure actrice dans une comédie) et Glenn Close, mariée rancunière dans The Wife et lauréate du GG de la meilleure actrice dans un drame. Pour la première, seule l’avantage pris aux BAFTA sur ses deux concurrentes peut la faire gagner. L’Académie serait toutefois bien inspiré de récompenser Glenn Close, figure récurrente du cinéma américain qui n’a jamais été lauréate d’un prix majeur dans sa carrière (à part donc aux GG récemment). Quant à la jeune première Lady Gaga, nouvelle aux oscars et magnétique dans A Star is Born, elle reste dans la course, mais un peu en retrait. Elle pourrait toutefois bénéficier d’une envie de l’Académie de récompenser les jeunes premiers, comme ce sera probablement le cas pour Rami Malek. On est pour.
Notre pronostic : Olivia Colman (The Favourite) ou Glenn Close (The Wife)
Nos favorites : Lady Gaga (A Star is Born) et Glenn Glose (The Wife).
Meilleur acteur dans un second rôle
Peu ou pas de suspense pour le meilleur acteur dans un second rôle puisque Mahershala Ali, magnifique en pianiste surdoué défiant le Sud de l’Amérique des années 60′, a jusqu’à présent toujours gagné dans cette catégorie lorsque son nom est apparu dans la liste des nommés. Une façon aussi de récompenser le début d’année prolifique (et de qualité) de l’acteur : il tient le rôle principal de la saison 3 de la série True Detective et d’antagoniste dans Alita : Battle Angel. Ce sera le deuxième oscar en l’espace de deux ans pour l’acteur, déjà primé dans la même catégorie pour son rôle dans Moonlight.
Notre pronostic et favori : Mahershala Ali dans Green Book
Meilleure actrice dans un second rôle
De loin la catégorie la moins excitante de la soirée tant les rôles et les performances des actrices nommées cette année sont dérisoires si l’on compare aux éditions précédentes. A l’image de Mahershala Ali chez les hommes, Regina King pour If Beale Street Could Talk fait figure de favorite dans cette catégorie. Elle peut toutefois se faire devancer par le duo de servantes du film The Favourite : soit Rachel Weisz (lauréate du BAFTA), que l’on désigne comme notre favorite puisqu’elle est la seule à s’en sortir dans ce gloubiboulga esthétique, soit Emma Stone (dont la performance tombe facilement dans l’oubli).
Notre pronostic : Regina King (If Beale Street Could Talk)
Notre favorite : Rachel Weisz (The Favourite)
Meilleur film d’animation
Sauf surprise, c’est le très pop Spider-Man New Generation qui sortira vainqueur de ce superbe match que nous réserve la catégorie animation. Il mettrait alors un terme au sept années de domination de Disney/Pixar, représenté cette année par Les Indestructibles 2 et Ralph 2.0. Donner l’oscar à cette déclinaison chaleureuse, énergique et audacieuse de l’homme araignée serait un choix fort en plus d’être mérité. On n’oublie pas Wes Anderson et son Isle of Dogs, l’un des autres temps forts de l’an passé, dont le succès est peu prévisible.
Notre pronostic et favori : Spider-Man New Generation
Meilleur scénario original
Passons aux catégories plus techniques avec pour commencer le scénario original. Notre pronostic se tourne vers Green Book, road-movie par excellence qui à chacune de ses étapes construit des situations drôles (la scène du KFC), dramatiques (la dispute sous la pluie) et bluffantes de poésie (la veille de Noël). Le film a notamment été récompensé par le GG du meilleur scénario, ce qui le conforte dans sa posture de favori. Si nous ne sommes absolument pas contre ce choix, celui de First Reformed, pas oublié cette fois-ci, serait une possibilité de rendre un hommage mérité à la plume de Paul Schrader… Par ailleurs, si l’Académie pouvait éviter de remettre cet oscar à Roma, film bien plus préoccupé par sa forme que par son histoire, on les remerciera.
Notre pronostic : Green Book
Notre favori : First Reformed
On pourrait éviter : Roma
Meilleure adaptation
Adapté du roman de James Baldwin, auteur reconnu dans le monde entier et particulièrement aux Etats-Unis pour ses luttes contre les distinctions raciales et sociales dans son oeuvre littéraire, If Beale Street Could Talk est le favori de cette catégorie et permettrait à Barry Jenkins de remporter un second oscar en deux après avoir gagné l’oscar du meilleur film pour Moonlight. On voit mal qui pourrait le devancer – peut-être la furia comique de Spike Lee dans BlacKkKlansman ? – mais on n’est pas contre un prix pour The Ballad of Buster Scruggs, épopée au coeur du farwest qui marquait le retour au premier plan de l’écriture incisive des frères Coen.
Notre pronostic : If Beale Street Could Talk
Notre favori : The Ballad of Buster Scruggs
Meilleure photographie
Écartée dans un premier temps de la diffusion en direct de la cérémonie avec le montage, les coiffures/maquillages et le court-métrage, la catégorie meilleure photo aura bien fait parler d’elle, aussi parce que c’est une catégorie essentielle pour mesurer le travail collaboratif sur un plateau de tournage. On assistera ici à un duel entre deux films en noir et blanc : Roma et Cold War. Peu de doutes cependant à avoir sur l’identité du vainqueur : Roma devrait s’en sortir haut la main puisque sa conception a fait l’objet de nombreuses curiosités, notamment sur l’utilisation du 70mm et sa capacité à allonger les plans-séquences, marque de fabrique d’Alfonso Cuaron qui, pour ce film, s’est chargé lui-même de la photographie, rompant sa collaboration avec le talentueux Emmanuel Lubezki, le chef opérateur des Fils de l’homme et Gravity. Pas de doutes non plus sur l’identité de notre favori : Cold War, antithèse parfaite de Roma sur l’utilisation de la caméra et du noir et blanc, préférant ainsi filmer les visages, les danses et les étreintes d’un couple fou amoureux dans le contexte si hostile de la Guerre Froide.
Notre pronostic : Roma
Notre favori : Cold War
On pourrait éviter : Roma
Meilleur montage
Véritable film de montage, Vice devrait s’en sortir avec les honneurs de l’Académie. Capable aussi bien de passer d’un moment à l’autre de la vie de Dick Cheney que d’incruster des images d’archives et d’illustrations – comme le fait Lars von Trier sur un ton presque similaire – le film d’Adam McKay est un tableau survitaminé, hilare et terrifiant sur le nouvel ordre mondial. Son principal challenger est Green Book, même si celui-ci repose sur un genre (le road-movie) qui utilise la technique du montage de manière plus linéaire, retraçant étape par étape le voyage des protagonistes. Forme de classicisme qui peut parfois porter préjudice, comme c’est le cas de Bohemian Rhapsody qui ne rend compte à aucun moment de l’histoire unique de Queen et son leader Freddie Mercury – un film en somme assez taiseux sur un groupe qui avait de la gueule. Il serait regrettable de le voir gagnant…
Notre pronostic : Vice
Notre favori : Vice
On pourrait éviter : Bohemian Rhapsody
Meilleure bande originale
Chose notable : l’Académie des oscars est passé à côté de deux des bandes originales les plus marquantes de ces derniers mois. Celles de A Star is Born (vainqueur aux BAFTA) et de First Man (vainqueur aux Golden Globes). Deux oublis notables qui laisse le champ libre à If Beale Street Could Talk – la musique accompagne partout, tout le temps les deux personnages – et la composition épique et tambour battante d’Alexandre Desplat, le frenchie préféré des oscars, pour Isle of Dogs. Le film de Wes Anderson peut bénéficier des deux oscars obtenus par Desplat en 2015 (The Grand Budapest Hotel, déjà avec Wes Anderson) et l’an passé (The Shape of Water) pour faire peser la balance de son côté. Sans hésitation, on choisit le made in France dans cette catégorie.
Notre pronostic : Isle of Dogs et If Beale Street Could Talk
Nos favoris : Isle of Dogs
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