Voici notre sélection musicale de la semaine, toujours plus éclectique et qualitative.
Kali Uchis – Isolation
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C’est peu dire que le premier véritable album de Kali Uchis était attendu. Précédé de quelques singles envoyés en éclaireur parmi lesquels le fantastique After The Storm en collaboration avec Tyler, The Creator et Bootsy Collins, Isolation est enfin là : une collection de 15 titres qui oscillent lascivement entre soul, musique latine, rap, reggaeton et r’n’b. Impossible de rester indifférent face à ce patchwork qui concilie Angleterre et Etats-Unis, Amérique du Nord et Amérique du Sud, passé, présent et pourquoi pas futur en accumulant un casting qui donne le tournis : Jorja Smith, Damon Albarn, Kevin Parker de Tame Impala, Sounwave (producteur de Kendrick Lamar), Thundercat ou encore Steve Lacy. La voix élastique et sensuelle de Kali Uchis, souvent en anglais parfois en espagnol, enrobe ces productions élégantes. En résulte un album de pop exquis où chaque morceau est potentiellement un tube qui trouverait sa place dans vos playlists les plus festives et/ou suggestives.
Isolation est à écouter sur Apple Music.
13 Block – Triple S
Triple S pour « la sueur, la soif et les sous », plus que des rappeurs, Zed, Oldpee, Zefor et Detess sont des trappeurs. Partisan de l’oppressante drill qui s’est élevée des ghettos d’Englewood à Chicago, 13 Block s’est progressivement tourné vers la trap d’Atlanta, moins cloisonnée et plus élégante. Cet EP de 11 titres qui précède le premier album, prévu pour courant 2018, confirme et sublime les belles promesses issues de ULTRAP, troisième effort du 13. La rencontre avec le beatmaker Ikaz Boi a accéléré cette transition musicale. Le producteur parisien a aidé le quatuor de Sevran à épurer, parfaire leurs créations : les instrumentales écrasantes de Binks Beatz laissent place aux productions élevées et éthérées d’Ikaz, les flows intenses, parfois étouffants, se substituent à des couplets aérés et les refrains agressifs se muent en mélodies entêtantes. Même s’il est de plus en plus mélancolique, seul le propos reste le même, vrai, cru, terre-à-terre. Triple S n’est pas seulement l’un des meilleurs projets de ce premier trimestre 2018, c’est aussi l’un des meilleurs projets de trap française de ces 5 dernières françaises.
Triple S est à écouter sur Apple Music.
Clara Luciani – Sainte-Victoire
Découverte avec l’impressionnant EP, Monstre d’Amour, Clara Luciani imposait en 4 morceaux un univers partagé entre grande chanson française et Ennio Morricone. Pour son premier album, Sainte-Victoire, elle repousse les frontières de ses territoires musicaux. Sacrifiant une partie de son originalité, Clara Luciani accouche d’un album diablement efficace en partie composé par Ambroise Willaume (Sage, Revolver) et Benjamin Lebeau (The Shoes). S’accompagnant parfois de cuivres (le très beau Les Fleurs), les morceaux de Sainte-Victoire n’ont pour autant pas abandonnés ces chœurs et ces guitares qui convoquent les déserts américains. Une esthétique qui culmine sur le dépouillé Drôle d’Epoque, délicat portrait de femme qu’on jurerait sortir d’une bande-originale de Tarantino. Sainte–Victoire est, certes, un album perfectible par instants, mais chaque refrain qui le parcoure est une élégie, un miracle où la voix profonde de Clara Luciani prend l’ampleur qu’elle mérite.
Sainte-Victoire est à écouter sur Apple Music.
Hinds – I Don’t Run
Chez les groupes de rock, plus qu’ailleurs, l’épreuve du deuxième album est un véritable casse-tête. Trop souvent, la fougue du premier essai s’est retrouvée balayée par les ambitions d’un second disque pompier aux guitares bodybuildées qui cédait aux sirènes des stades. Le succès d’estime de Leave Me Alone, premier album très lo-fi de Hinds, laissait penser que les madrilènes muscleraient leur son en studio pour leur second opus, c’était mal connaître les connaître. Se vautrant avec une euphorie intacte dans le son crado qui les a révélées au monde, les 4 filles de Hinds réitèrent, avec I Don’t Run, le miracle du premier album. Et même si l’effet de surprise s’est dissipée impossible d’en vouloir à ses 11 nouveaux morceaux, d’autant que les Hinds se sont considérablement améliorées : des structures de chansons plus audacieuses, une énergie mieux canalisée, des harmonies vocales plus abouties et des moments d’accalmies salvateurs. I Don’t Run est un bouquet garni de chansons qui capture les odeurs évanescentes (agréables ou non) du sentiment amoureux. Une chose est sûre, nous, on aime Hinds.
I Don’t Run est à écouter sur Apple Music.
Alpha Wann – Alph Lauren 3
Jeudi dernier, Alpha Wann sortait de sa torpeur pour annoncer le troisième volet de son triptyque Alph Lauren. À minuit, Alph Lauren 3 était dans nos écouteurs, deux ans après le numéro 2. Mais autant dire que Le Don n’a pas chômé. Chevauchant les productions de son acolyte de Don Dada Hologram Lo’, de VM The Don, de JayJay et de Hugz Hefner avec cette aisance qui le caractérise depuis ses débuts, les assonances et les allitérations tombent comme les adversaires. Car peu, très peu, peuvent débiter cet ego-trip affiné, raffiné sans finir dans la démonstration. Si beaucoup transpirent à grosses gouttes pour arriver à un tel niveau de maîtrise, Alpha n’en est qu’à l’échauffement. Loin d’être essoufflé, le fringant soldat de L’Entourage livre son meilleur projet solo au meilleur des moments, quelques mois avant la sortie de son tant attendu nouvel album. Une attente qui n’est atténuée que pour quelques semaines tant on redemande de ce rap parisien de luxe. « Tout ce qui brille hypnotise ».
Alph Lauren 3 est à écouter sur Apple Music.
Flatbush Zombies – Vacation In Hell
Le ciel se couvre de nuages noirs, l’atmosphère s’alourdit pour devenir pratiquement insoutenable, la température monte anormalement vite : les Flatbush Zombies arrivent. À l’écoute de leur deuxième album, Vacation In Hell, notre vision se trouble, notre esprit s’obscurcit et notre lucidité nous échappe. Au travers d’intenses et longs morceaux, le trio new-yorkais oscille entre phrasés rugueux, sombres, qui sonnent comme de virulentes protestations, et chants plus ou moins difformes qui résonnent comme d’irrésistibles incantations. Alors que la musicalité des précédentes ébauches étaient parfois altérée par un univers trop vaporeux, qui trempait dans trop d’inspirations et de sonorités différentes voire dissonantes, ici les productions sont plus justes, et plongent l’album dans les ténèbres. Vacation in Hell, un périple musical torturé, transcendantal, où Meechy Darko, Zombie Juice et Erick Arc Elliott rappellent que même les vacances des Flatbush Zombies sont infernales.
Vacation In Hell est à écouter sur Apple Music.
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