Invité sur France 2 mardi 10 avril, François Hollande a dressé un bilan positif de son mandat avant de dénoncer l’ « autoritarisme » du gouvernement d’Emmanuel Macron.
Presque un an après la fin de son mandat, François Hollande sort de l’ombre. L’ancien président de la République était l’invité du journal de 20 heures sur France 2, mardi 11 avril. Venu présenter son livre Les Leçons du pouvoir, qui paraît ce mercredi, il a répondu aux questions d’Anne-Sophie Lapix sur le bilan de son quinquennat et la politique d’Emmanuel Macron, qu’il a vivement critiquée.
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Baisse du chômage
« J’ai la responsabilité de ce bilan, je ne peux demander à d’autres de le faire à ma place », annonce d’entrée de jeu, l’ancien président, déterminé à défendre les avancées réalisées par son gouvernement dont la création d’emplois et la baisse du chômage.
Une victoire nuancée par Anne-Sophie Lapix qui rappelle que le nombre de personnes inscrites à Pôle-Emploi avait littéralement explosé avant que la courbe du chômage finisse enfin par s’inverser à la toute fin du mandat. « Ce qui compte c’est qu’il a baissé », martèle Hollande, soulignant le contexte « très dégradé » du paysage français lors de son arrivée à l’Elysée.
« Avec un taux de croissance supérieur à 2%, un déficit public inférieur à 3% et plus de 700 000 emplois créés depuis 2015, il y a des vérités qui relèvent de l’évidence », revendiquait-il déjà dans un entretien publié mardi 10 avril dans L’Obs.
📺 #LesLeconsDuPouvoir : @fhollande "Le sens de ce livre était de dire aux Français quelle a été ma responsabilité, mon action pendant une période de crises éprouvantes" @aslapix #JT20H pic.twitter.com/CUTvhICHa2
— Info France 2 (@infofrance2) April 10, 2018
Vers une progression des inégalités
Si les critiques à l’égard d’Emmanuel Macron sont légion dans l’ouvrage de l’ancien président qui lui reproche son « autoritarisme », comme le rapporte le Parisien qui en publie les bonnes feuilles, c’est sa politique fiscale qui est en ligne de mire.
» Comment accepter que les titulaires des gros patrimoines soient aujourd’hui ceux qui ont la redistribution que nous avons tous souhaitée ? «
Bien qu’il reconnaisse avoir lui-même appelé à la solidarité durant son mandat pour redresser les comptes de l’État, il juge désormais illégitime de « demander des prélèvements supplémentaires et encore moins aux moins favorisés », alors que la situation s’est stabilisée.
L’augmentation des impôts sur le tabac, l’énergie, la CSG ne peut qu’entériner le « creusement des inégalités », conclut-il.
Sur le statut des cheminots
Interrogé sur la réforme de la SNCF, dont il avait déjà validé l’ouverture à la concurrence, le président socialiste reste prudent. « Je ne suis pas en situation pour me prononcer », déclare-t-il, avant de mettre en garde le gouvernement actuel contre les réformes brutales.
« Chaque fois qu’une réforme se fait dans la négociation, elle passe et elle est comprise », poursuit-il. « Quand on ne prend pas le temps de la concertation […] on perd en légitimité. »
« C’était à l’Etat de faire passer un message de droit et de libertés »
Face au discours prononcé par Emmanuel Macron lundi 9 avril à la Conférence des évêques de France (CEF), durant lequel l’actuel chef de l’Etat a affirmé que le lien entre l’Église et l’État s’était « abîmé » et devait être « réparé », Hollande embrasse l’indignation de la gauche.
« Parler aux cultes, aux juifs, aux musulmans, aux catholiques, cela fait partie de l’exercice du pouvoir. Ce qui me surprend, ici, c’est qu’il ait pu dire qu’il y avait une relation ‘abîmée’ entre l’Eglise et l’Etat. [Parle-t-il] du mariage pour tous ? Du remboursement intégral de l’IVG ? De la loi sur la fin de vie ? […] c’était à l’Etat de faire passer un message de droit et de libertés », défend-il.
« Je ne dis pas qu’il n’a pas de talent »
Une rupture qui semble définitive envers celui que l’ancien président avait pourtant choisi comme membre de son gouvernement. Et dont il dénonce aujourd’hui la fracture idéologique avec la gauche, comme en témoigne son intervention dans L’Obs :
» Je le dis sans acrimonie : il ne s’est jamais inscrit dans l’histoire ni dans la culture de la social-démocratie. Il ne mène donc pas une politique qui s’en inspire. «
Des propos qu’il a tenu à expliciter sur le plateau de France 2.« Si je n’avais pas été séduit [par Emmanuel Macron], je ne l’aurais pas choisi comme conseiller ou ministre », nuance-t-il. « Je ne dis pas qu’il n’a pas de talent sinon je ne l’aurais pas appelé auprès de moi alors qu’il était un parfait inconnu. »
📺 #LesLeconsDuPouvoir : @fhollande "Je ne dis jamais que #Macron n'a pas de qualité, sinon je ne l'aurai pas choisi […] la séduction est nécessaire dans les relations mais de pouvoir mais la réalité ce sont les rapports de force, ce n'est pas qu'une poignée de main." #JT20H pic.twitter.com/vV9w8WjfCI
— Info France 2 (@infofrance2) April 10, 2018
Une aptitude dont il énonce aussitôt les limites. Si la capacité à convaincre, notamment dans le cadre des relations internationales, peut sembler indispensable « à un moment vous vous heurtez à une réalité, celle des rapports de force ». Allusion aux échanges tendus avec Vladimir Poutine et son soutien à Bachar el Assad.
Sur la guerre en Syrie
L’évocation de la guerre en Syrie conduit François Hollande à réaffirmer la nécessité d’une intervention française. Si l’utilisation d’armes chimiques par le président syrien en 2013 n’avait suscité aucun retour de la part de l’Occident, cette absence de réaction « a renforcé le régime de Bachar el-Assad », déplore-t-il, rappelant que le retrait de plusieurs pays dont les États-Unis face à leur promesse d’engagement, n’avait pas permis à la France d’intervenir seule.
#Syrie @fhollande "Ne pas avoir conduit une action, a produit une consolidation du régime de Bachar-El #Assad ! […]
Aujourd'hui quand une ligne rouge est franchie, la seule réaction possible ce sont des frappes et je fais confiance à @EmmanuelMacron et ses chefs d'Etat." #JT20H pic.twitter.com/NdaZzVVeEw— Info France 2 (@infofrance2) April 10, 2018
« Aujourd’hui, il y a eu une nouvelle utilisation des armes chimiques. Des lignes rouges avaient été fixées, elles ont été violées. Dans ces cas-là, la seule réaction à avoir est une frappe. Je fais confiance à Emmanuel Macron, mais ne rien faire serait une impunité pour Bachar al Assad », insiste-t-il.
« Les 7 minutes les plus longues de ma vie »
L’entretien s’est achevé sur un tournant plus personnel durant lequel l’ancien président a évoqué la polémique suscitée par sa relation avec l’actrice Julie Gayet :
» Je reconnais une responsabilité [dans la publication des photos dans Closer]. Mais ce qui s’est passé là a des conséquences : je suis pour la transparence, mais par pour le viol de l’intimité. Il y a là des leçons à tirer pour toute la presse. «
Et, enfin, sa décision de ne pas se présenter aux élections de 2017 qu’il décrit dans son livre comme « les 7 minutes les plus longues de ma vie ».
« Les raisons qui me poussaient à ne pas être candidat étaient politiques : une gauche divisée, la candidature d’Emmanuel Macron déclarée, une droite qui était assurée nous disait-on, d’être au second tour avec l’extrême droite », explique-t-il. « J’ai donc fait ce sacrifice en connaissance de cause [quand] j’aurais pu avoir cette obsession d’être candidat pour être candidat au détriment des conséquences. »
En conclusion, il a tenu à préciser qu’il ne poursuivait aujourd’hui « aucun intérêt partisan ni aucune ambition électorale. » Avant d’ajouter :
» Je suis un citoyen, mais pas comme les autres, car je suis un ancien président. «
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