Prenant à contre-pied la très réac britpop, centrée sur quelques brocanteurs à guitares incapables de voir plus loin que le bout de leurs Beatles, quelques groupes anglais ont su prendre la tangente et redonner des couleurs à un langage en voie de mortification avancée. Plusieurs viennent de Birmingham, ville sinistr(é)e du ventre mou de l’Angleterre […]
Prenant à contre-pied la très réac britpop, centrée sur quelques brocanteurs à guitares incapables de voir plus loin que le bout de leurs Beatles, quelques groupes anglais ont su prendre la tangente et redonner des couleurs à un langage en voie de mortification avancée. Plusieurs viennent de Birmingham, ville sinistr(é)e du ventre mou de l’Angleterre : de Plone aux élégiaques Broadcast, la cité a enfanté de sacrés monstres gentils. A coups d’injections homéopathiques d’expérimentation douce, de greffes d’invention discrète et d’ouverture d’esprit, ils ont su remettre leur (pop) art dans le sens de la marche.
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La tangente de Pram est carrément une déviance, la bancalité? d’une pop délicieusement tarabiscotée et imparfaite. Près d’une dizaine d’albums ont dessiné un territoire très personnel, passionnant, tout en zigzag et trompe-l’oreille, paysages faussement enfantins, petits barnums des curiosités mélodiques, présentés par la voix (parfois trop) chancelante et éclopée de Rosie Cuckston. Dark Island ne fait pas exception à la règle et déroule encore des saynètes parfaites pour la gymnastique d’esprits imaginatifs.
Ainsi, Track of the Cat, chevauchée féline ? chavauchée ? ?, ouvre l’album dans un Colorado Playmobil, drôle de décor en stuc et champ de cactus en toc. Et prouve le besoin urgent de réhabiliter enfin le sain usage des trompettes dans la musique moderne. Dans le morceau suivant, un Penny Arcade subtilement épique, les cactus se transforment en algues pour la BO d’un autre western, subaquatique cette fois ; à dos d’hippocampe dans ces ondes troublées, le mal de mer guette presque. Peepshow lorgne vers le lubrique, mais une grâce invisible transforme le glauque en comptine. Le beau Goodbye plonge le rêve dans la bizarrerie, lent déroulé d’imprévus saugrenus, presque angoissant. Leeward ou Sirocco font dans l’exotique rococo, lentes musiques à charmer les serpents. La comparaison entre Pram et sa lointaine descendance Broadcast est plus frappante sur le dernier morceau de l’album, Disant Island, où les mélopées de Rosie Cuckston savent se faire passionnantes. Belle clôture pour ce jardin bizarre et ses excroissances inédites.
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