Ce 20 mars, quelques heures après l’annonce de la dissolution de l’Université Jean-Jaurès à Toulouse par la ministre de l’Enseignement supérieur, des étudiants parisiens sont partis en manifestation sauvage dans le Quartier latin.
En déclarant l’Université Toulouse-Jean Jaurès “ingouvernable” ce 20 mars, la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, ne pensait sans doute pas si bien dire. Sa décision de mettre sous tutelle ce bastion de la contestation étudiante plus connu sous le nom du Mirail, en raison de son blocage depuis deux semaines par des étudiants et des membres du personnel opposés à la sélection et à la fusion de l’université, a mis le feu aux poudres.
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“Autour du 22 mars, il commence à y avoir une réaction”
“Toulouse-2 vivra, Toulouse-2 vaincra !”, “Du fric pour les facs, et les lycées, pas pour la Bac, ni pour l’armée !”, “Flics, hors de nos facs !” A 19h, place de La Sorbonne à Paris, quelque 150 étudiants parisiens donnent de la voix pour manifester leur solidarité avec leurs camarades, à l’appel de Solidaires étudiant-e-s, de l’Unef, des Jeunes Insoumis, du NPA Jeunes et du MJCF. Alors que le mouvement étudiant s’était assoupi avec les vacances de février, la dissolution des conseils de l’établissement toulousain, la destitution de son président par l’Etat et la menace d’une intervention policière ont fait l’effet d’un électrochoc. Mégaphone à la main, Arthur, étudiant en M1 d’histoire à la Sorbonne et membre du NPA Jeunes, s’en réjouit : “Le mouvement étudiant est assez inégal depuis début février, mais cette décision peut créer un rebond. Les facs de Montpellier, Toulouse, Bordeaux, Nantes sont très mobilisées. Autour du 22 mars, il commence à y avoir une réaction”.
À la #Sorbonne rassemblement de soutien à la fac de Toulouse dissoute par le ministère pic.twitter.com/Gd3bcDTQOL
— Mathieu Dejean (@Mathieu2jean) March 20, 2018
A l’approche de la mobilisation des fonctionnaires et des cheminots ce 22 mars, les rangs des manifestants pourraient en effet s’élargir avec l’arrivée massive des étudiants, soudés par l’offensive toulousaine. “Le Mirail, c’est la fac la plus mobilisée de France. En la déclarant ingouvernable, le gouvernement tente symboliquement de casser le mouvement, mais c’est l’inverse qui pourrait se produire, même si les étudiants peinent encore à se mobiliser”, avance un étudiant à Jussieu membre de Solidaires étudiant-e-s, qui souhaite rester anonyme.
“Toulouse montre la voie, Paris suivra !”
Malgré leur faible nombre, les étudiants parisiens se montrent déterminés. Sur les coups de 20h, ils reprennent un slogan en chœur : “Grève, blocage, manif sauvage !” En cortège improvisé, ils partent en direction de la rue Descartes, à quelques encablures de là, siège du ministère de l’Enseignement supérieur – qui s’avérera protégé par un cordon de policiers. “Vidal, prends garde, t’as oublié tes chiens !”, “Flic, bourgeois, la rue n’est pas à toi !”, “Toulouse montre la voie, Paris suivra !”, scandent les jeunes révoltés, avant de se diriger vers la place de la Contrescarpe.
En soutien aux étudiants de #Toulouse, cx de Paris st partis en manif jusqu'au ministère de l'enseignement sup. Prochaine étape le #22mars pic.twitter.com/AMUJlk6kVW
— Mathieu Dejean (@Mathieu2jean) March 20, 2018
Après l’évacuation musclée d’une assemblée générale étudiante par des CRS à l’université de Bordeaux début mars, le monde estudiantin est à fleur de peau. Pour Arthur, du NPA Jeunes, cette dissolution est une apothéose : “C’est un tournant autoritaire de l’Etat. Toutes les résistances étudiantes sont durement réprimées : à Dijon, Bordeaux, Toulouse… Le gouvernement a clairement peur que les étudiants sortent dans la rue”.
https://twitter.com/CoordJeunesBdx/status/971338105411330048
Le 22 mars 1968 avait donné naissance à Nanterre au mouvement qui avait enflammé la France sous l’égide de Daniel Cohn-Bendit. Le 22 mars 2018 verra-t-il de nouveaux enragés secouer le pays ? Lors d’une conférence de presse unitaire des organisations politiques de gauche ce 21 mars, Olivier Besancenot en sourit : “L’Etat n’a pas retenu les leçons de l’histoire”.
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