Pressentie pour devenir la nouvelle patronne de la CIA, le profil de Gina Haspel, 61 ans, interpelle la presse américaine. Plusieurs titres ont exhumé son passé, notamment la supervision d’une prison secrète où des actes de torture ont été perpétrés.
La candidate proposée par Donald Trump pour prendre la relève de Mike Pompeo – nommé chef de la diplomatie américaine – à la tête de la CIA est loin d’être une inconnue. Gina Haspel, 61 ans dont la moitié dans les services de renseignements américains, était déjà la directrice adjointe de l’institution depuis un an.
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Cette nomination quasi-acquise fait grand bruit outre-Atlantique. Non pas parce qu’il s’agirait de la première femme à accéder à ce poste mais pour son curriculum vitae.« Le genre de Gina Haspel est la chose la moins importante la concernant », a ironisé le magazine The Atlantic. Plusieurs médias américains ont en effet rappelé qu’elle avait participé au programme de prisons secrètes et de torture mis en place par la CIA après les attentats du 11-Septembre.
Gina Haspel rejoint la CIA en 1985, comme espionne. A la fin des années 2000, elle est notamment en poste à Londres en Angleterre. Le Los Angeles Times rappelle qu’elle « a adroitement navigué entre les postes difficiles à l’étranger et la vaste bureaucratie du siège de l’agence à Langley ».
Torture et destruction de preuves
Un an après le 11-Septembre, selon le New York Times, elle est envoyée en Thaïlande pour superviser l’instauration d’une prison secrète. Selon plusieurs documents consultés par le quotidien américain ainsi que par le Washington Post, des dizaines de cas de water boarding (« simulacre de noyade », une technique de torture) vont être recensés entre 2003 et 2005. Pour le magazine Time, elle n’a pas seulement supervisé ces actes mais elle a aussi organisé leur camouflage : « Elle est liée à l’initiative, au sein de l’agence, de détruire les preuves des interrogatoires. »
Ces actes controversés ne sont découverts qu’en 2007 après la publications d’articles de la part des deux grands quotidiens américains. Un an plus tard, l’élection de Barack Obama, coïncidant avec le retour des Démocrates au pouvoir, va accélérer les investigations. La sénatrice Diane Feinstein, présidente de la commission du renseignement de la haute assemblée entre 2006 et 2015, va débuter une longue enquête sur les pratiques perpétrées dans cette prison secrète. En 2014, elle publie son rapport, accablant pour la CIA :
« A aucun moment les techniques d’interrogatoire renforcées de la CIA n’ont permis de recueillir des renseignements relatifs à des menaces imminentes, tels que des informations concernant d’hypothétiques ‘bombes à retardement’ dont beaucoup estimaient qu’elles justifiaient ces techniques. »
« Des méthodes de renseignement inhumaines et inefficaces »
Le magazine The Atlantic résume finalement assez bien l’ambivalence de celle qui pourrait devenir la femme la plus puissante du renseignement mondial :
« Certains la voient comme une professionnelle loyale appliquant des méthodes qui avaient été validées et jugées légales après la pire attaque terroriste de l’histoire du pays, d’autres la voient comme partie prenante de l’adoption inconsidérée, après le 11-Septembre de méthodes de renseignement inhumaines et inefficaces. »
Gina Haspel devrait retrouver Diane Feinstein lors de son audition au Congrès. Comme le rapport le NYT, Mme Feinstein est cependant restée silencieuse sur le fait de savoir si elle allait bloquer ou non sa nomination. Elle a toutefois déclaré qu’elles avaient travaillé ensemble depuis que Mme Haspel a été nommée directrice adjointe de la CIA : « Depuis que mes inquiétudes ont été soulevées au sujet de la situation de torture, je l’ai beaucoup rencontrée, j’ai parlé avec elle. Elle a été, je crois, un bon directeur adjoint. Elle semble avoir la confiance de l’agence, ce qui est bien. «
Quoiqu’il en soit, si l’on se réfère a l’enthousiasme de Donald Trump dans son tweet de félicitations, on imagine que le président américain est un fan de la première heure. Après tout, lui-même déclarait l’année dernière avoir le sentiment que « la torture, ça fonctionne. »
Mike Pompeo, Director of the CIA, will become our new Secretary of State. He will do a fantastic job! Thank you to Rex Tillerson for his service! Gina Haspel will become the new Director of the CIA, and the first woman so chosen. Congratulations to all!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) March 13, 2018
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