Faussement statique, la musique de Glass Animals donne envie de danser pendant le sommeil. Critique.
Evaporée, intangible, toute une musique anglaise a totalement fui la réalité pour se réfugier, s’isoler dans un monde de plus en plus chimérique, déconnecté. On a connu le rock en mission, on se retrouve avec une electro de la démission. Une musique tellement informe et gazeuse que les étiquettes n’y adhèrent pas, du post-dubstep à la bass-music.
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Dans les années 90, l’Angleterre avait connu un tel appel du silence, avec un trip-hop qui entérinait la gueule de bois. Et là, déjà, pour un Portishead ou un Massive Attack, combien de suiveurs pleutres, de suceurs de roue sans imagination ? C’est un peu la même chose aujourd’hui derrière l’immense James Blake ou Jamie xx : une multitude de faussaires, de moines copistes se sont emparés de cette manière laconique, embrumée de composer – mais sans le moindre appétit pour le risque, le vertige, le vide. Combien triturent ainsi le son et les textures, étirent le tempo en un papier peint aussi chic que toc ?
Parmi cette génération de doux rêveurs, de compositeurs effilochés, Glass Animals séduit depuis son premier morceau, Golden Antlers. Car si le groupe a réduit le pouls du beat jusqu’à l’apnée, ça n’a jamais empêché sa musique de s’agiter, charnelle et vivante, en un psychédélisme éreinté, en une valse lente et noyée dans les échos.
Il faut dire qu’il tient en Dave Bayley un étrange crooner, à la chaleur presque déplacée dans cette musique de peu. A lui seul, propulsé par la production étonnamment effacée de Paul Epworth, il transforme en pop-songs des lavis délavés, érige des sommets et creuse des gouffres dans une musique plutôt horizontale, voire morne plaine.
Pendant que Londres et sa nuit s’agitent, Glass Animals se déploie avec lenteur, majesté, prenant de longues minutes pour installer ses humeurs fortes, son odeur humide. Ce qui offre, sur une version retravaillée de Black Mambo, sur Pools ou Intruxx, une vision améliorée de la mélancolie. On sort de cet album avec du roulis dans les jambes et du shimmy dans la tête.
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