Depuis l’annonce de la réforme de la SNCF par ordonnances, un sujet fâche plus que d’autres : le statut de cheminot. Instauré en 1920 suite à une lutte de longue haleine, celui-ci permet à 92% du personnel de la SNCF de jouir de quelques avantages. A y voir de plus près, ces avantages s’avèrent très relatifs par rapport à la particularité de la profession.
Il s’agit sans doute du passage le plus commenté depuis l’annonce d’Edouard Philippe de réformer la SNCF par ordonnances : “Le statut [de cheminot, ndlr.] est cependant particulièrement rigide (…) Face à ses concurrents, la SNCF ne peut rester la seule à recruter au statut, annonce le Premier ministre, avant de conclure, aux nouvelles générations, aux apprentis, à tous ceux qui veulent s’engager à la SNCF, nous disons qu’ils bénéficieront des conditions de travail de tous les Français, celles du Code du travail.”
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Fruit de rudes luttes sociales et réponse logique à des conditions de travail particulièrement pénibles, le statut de cheminot permet depuis des décennies à cette corporation de bénéficier d’un certain nombre d’avantages.
Aux sources du statut de cheminot
Riche histoire que celle du statut de cheminot ! Au début du XXe siècle, le cheminot fut longtemps mis au ban de la société. Pendant la Grande Guerre, il était notamment considéré comme un “embusqué”, autrement dit, aux yeux de l’opinion public, le cheminot était épargné de tout danger ou risque pendant la guerre. Il fallait attendre 1920 pour que la corporation soit reconnue par l’Etat à travers un statut unique du personnel, ce qui “lui apporte de sérieuses garanties en matière d’avancement (un minimum à l’ancienneté est acquis) et entérine la reconnaissance des syndicats dans les compagnies” rappelle l’historien Georges Ribeill.
Il serait néanmoins réducteur d’avancer que le statut fut accordé uniquement en guise de réhabilitation. A cet aspect plutôt d’ordre symbolique, se conjugue un autre d’ordre matériel. “Il faut avoir en tête que le métier de cheminot était alors très éprouvant. Chauffeurs et mécaniciens étaient exposés aux brûlures. Les cheminots développaient des problèmes oculaires liés au froid, aux intempéries”, tient à rappeler Christian Chevandier, professeur d’Histoire à l’université du Havre, dans le HuffPost.
Un salaire légèrement au-dessus de la moyenne en France :
“Les cheminots de la SNCF gagnent 100 euros de plus que le salaire moyen en France, qui s’est élevé à 2.988 euros brut mensuels en 2015”, observe Marianne. Mais s’il est vrai que la paye d’un cheminot est au-dessus du salaire moyen en France, il ne faut pas perdre de vue l’hétérogénéité de toutes les catégories qu’englobe la profession de cheminot. Le même hebdomadaire attire l’attention sur le fait que “les cadres supérieurs touchent de confortables émoluments quand 60% des cheminots gagnent en réalité moins de 3.000 euros brut par mois.”
L’âge de départ à la retraite :
Directement impacté par la réforme des régimes spéciaux en 2008, l’âge minimum de départ à la retraite a été continuellement relevé depuis 1909. “En 2015, l’âge moyen de départ en retraite était de 53 ans pour les agents de conduite et 57 ans pour les autres”, rapporte Le Point.
Les congés :
Les congés octroyés aux cheminots nourrissent aussi nombre de fantasmes. Les calculs de franceinfo à ce sujet permettent de nuancer cette idée reçue : “l’ensemble des salariés est soumis aux 35 heures de travail hebdomadaires et dispose de 28 jours de congés annuels (soit trois jours de plus que les cinq semaines légales)”.
Accès au logement :
Selon la direction des ressources humaines de la SNCF, l’entreprise “peut proposer à ses salariés l’accès à trois types de logement, en fonction de leurs contraintes professionnelles, de leurs ressources et de leur situation familiale”. Au total, des dizaines de milliers de logements sont mis à disposition des cheminots.
Gratuité des billets :
La SNCF met à disposition des cheminots un “Pass Carmillon”. Il s’agit d’une carte de libre circulation dans tout le réseau SNCF. Leurs conjoints bénéficient également d’“une carte donnant droit à 90 % de réduction sur l’ensemble des lignes SNCF”, selon le groupe.
“La dette est colossale, il faut réformer !”
Un leitmotiv revient très souvent depuis l’annonce du gouvernement de réformer la SNCF par ordonnances : “la dette est colossale, il faut réformer !”, serinent en chœur éditocrates établis et médias libéraux. Trois jours de congé de plus que les cinq semaines légales, 100 euros de plus que le salaire moyen en France, et un accès au logement. Voilà en gros les fameux avantages dont peuvent – ou pouvaient, dira-t-on sans doute bientôt – jouir ceux qui assurent la circulation de plus de 67 millions de personnes sur plus de 30 000 km de lignes. On laisse le lecteur juge !
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