Après le flop de « Elysium », Neill Blomkamp déçoit encore dans une fable transhumaniste informe et sans ampleur.
Drôle de trajectoire que celle de Neill Blomkamp, ancien spécialiste des effets-spéciaux propulsé à seulement 29 ans «nouvel espoir du cinéma d’anticipation» par la grâce d’un beau premier film, District 9. Fabriqué avec des bouts de ficelle et un sens du marketing redoutable, ce galop d’essai en forme de vrai-faux documentaire réveillait le genre SF tombé quelque peu en désuétude, auquel il redonnait toute sa dimension spectaculaire et politique. La suite de l’histoire fut plus compliquée. Débarqué à Hollywood, Neill Blomkamp trébucha en 2013 aux commandes du projet ambitieux Elysium (100 millions de dollars de budget, casting all stars mené par Matt Damon) qui, tout en restant fidèle à l’univers balisé par le cinéaste, accusait une sérieuse crise d’inspiration. Chappie semble prendre acte de cet échec.
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Visiblement échaudé par sa première expérience hollywoodienne, Neill Blomkamp tente ici un retour aux sources, à une science-fiction bricolée et brutale dans les bas-fonds de Johannesburg, décors d’une fragile révolution technologique. Dans un futur (très) proche, le film imagine une société sud-africaine en proie à une criminalité grimpante, contre laquelle la police se dote de nouvelles armes, des robots fabriqués à la chaîne. Les problèmes surviennent lorsqu’un ingénieur invente une machine plus sophistiquée, enrichie d’une conscience : soit Chappie, humanoïde ultime qui finira par tomber dans les mains de vilains gangsters.
Puisant son inspiration aux sources vives de la SF (un peu d’A.I. : Intelligence Artificielle, beaucoup de Robocop) Neill Blomkamp délaisse donc ses habituelles paraboles politiques au profit d’une fable existentielle, surfant sur la problématique du transhumanisme : faut-il faire confiance à l’intelligence artificielle ? À cette question, le film apporte une réponse singulière, qui prend à rebours plus d’un demi-siècle d’anticipation paranoïaque et rêve d’une utopie robotique, où l’humanité serait complètement déliée des chairs, et les consciences réduites à de simples clés USB. L’idée est belle, mais elle n’intervient qu’au terme d’un laborieux blockbuster qui accumule les pires poncifs du genre et peine à trouver sa juste tonalité.
Fuyant sans cesse d’un registre à l’autre, de la parodie au sentimentalisme, du gore au mélo sentencieux, Chappie ressemble à une greffe ratée entre la science-fiction radicale de District 9 et les conventions hollywoodiennes, un objet paradoxal dont la bizarrerie, charmante au premier abord, vire rapidement à la déroute. Jusque dans son casting, qui associe les freaks majestueux de Die Antwoord (très mauvais acteurs) à un duo de stars (Hugh Jackman, Sigourney Weaver), Neill Blomkamp semble un peu perdu entre ses rêves de grandeur et ses instincts alternatifs, dérivant de plus en plus vers un statut de petit malin, inventeur de concepts forts mais à courte vue. Pas très rassurant dans la perspective de son prochain film : le cinquième épisode d’Alien.
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