Songwriter parmi les plus influents de l’histoire, le trop méconnu Tim Hardin fait l’objet d’un album-hommage plus de trente ans après sa disparition. Critique et écoute.
Après Nick Drake, Leonard Cohen ou Tim Buckley, le regretté Tim Hardin est aujourd’hui le père spirituel d’une des plus grandes familles nombreuses de musiciens. Disparu avec les années 70, l’artiste a nourri des dizaines de vocations, de Ron Sexsmith à Paul Weller, d’Aimee Mann aux Shins. Les treize artistes qui ont répondu à l’appel du label londonien Full Time Hobby pour un album-hommage ont pioché dans tous les chapitres de la discographie de l’Américain. Ils ont bien entendu choisi les classiques (Reason to Believe, How Can We Hang on to a Dream ou l’inusable If I Were a Carpenter, déjà repris cent fois, par les Four Tops, Johnny Cash, Robert Plant, Johnny Hallyday…). Ils ont aussi revisité quelques morceaux moins connus (If I Knew, Lenny’s Tune).
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Si l’initiative est remarquable, le disque reste inégal. Difficile de rendre justice à la musique de Tim Hardin tant l’émotion reposait avant tout sur cette voix déchirante, sur ce timbre soul bouleversant, sur ce chant d’homme piégé par les drogues et l’alcool, blessé par les chagrins d’amour. Pour éviter de se confronter à cette voix, certains artistes – Diagrams, The Phoenix Foundations – semblent ainsi avoir voulu dissimuler leur interprétation en multipliant les arrangements. Il suffisait pourtant, chez Hardin, de très peu pour que la chanson fonctionne.
Interviewé dans le Melody Maker en 1972, le musicien avait du reste décrit ses créations comme “des simples chansons d’amour, des vraies chansons, très nues”. Celui qui respecte le mieux ce cahier des charges est sans conteste Mark Lanegan, qui offre une splendide version de Red Balloon. On saluera aussi les interprétations de The Sand Band, de l’Islandais Snorri Helgason et d’Okkervil River. Habitués à piocher dans les vieilles bandes psychédéliques asiatiques, les Danois de Pinkunoizu ont décoré le morceau I Can’t Slow down de parures orientales comme échappées du Melody Nelson de Gainsbourg – ils signent la reprise la plus audacieuse. Mauvais point, en revanche, pour Alela Diane qui frôle le massacre sur le mythique How Can We Hang on to a Dream.
Si la copie reste fatalement inférieure à l’original, ce disque a le mérite de réhabiliter l’oeuvre de celui qui, malgré le talent et l’influence, fut condamné à l’ombre jusque dans sa disparition : Hardin mourut d’une overdose le 29 décembre 1980, soit trois semaines après l’assassinat, autrement plus médiatisé, de John Lennon.
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