On avait quitté Suede sur l’étrange impression d’un groupe désemparé, cherchant à donner une nouvelle direction à sa musique et peinant à la trouver. Fallait-il être moins pop ? Ajouter des machines ? des guitares ? Head Music, ainsi que son titre le suggérait, semblait avoir demandé beaucoup de réflexion pour un résultat mitigé. Malgré […]
On avait quitté Suede sur l’étrange impression d’un groupe désemparé, cherchant à donner une nouvelle direction à sa musique et peinant à la trouver. Fallait-il être moins pop ? Ajouter des machines ? des guitares ? Head Music, ainsi que son titre le suggérait, semblait avoir demandé beaucoup de réflexion pour un résultat mitigé.
Malgré les efforts déployés, il apparaissait clair au final que ce que ce que Suede faisait encore le mieux, c’est ce que Suede avait toujours fait : du Suede. Et ce New Morning, s’il semble annoncer une nouvelle ère, n’est pas plus que la reconnaissance de ce constat par le groupe lui-même : à compter de ce jour, Suede ne cherchera plus à faire grand, nouveau ou différent, mais seulement à cultiver son petit lopin d’inspiration, celui qui satisfait la nature obsessionnelle de Brett Anderson. On peut attendre plus d’un groupe qui a sauvé une fois la pop ? en 1993, en lui rendant fierté et glamour alors qu’elle s’embourbait dans le marigot grunge ?, et légué à la postérité l’inégalable Dog Man Star. Libéré du poids des attentes excessives, Suede ne joue donc plus que pour lui et son afición.
Sans complexes et sans honte, ce sont donc toujours les mêmes morceaux (Obsessions, c’est New Generation, et Untitled’ Morning, Saturday Night), toujours les mêmes titres (Street Life, Lonely Girls, Beautiful Loser, c’est plus que du déjà vu) et toujours les mêmes mots (« magazine », « TV », « cigarette », usés jusqu’à la corde). Le cœur et les arrangements y sont seulement plus légers, offrant à Brett Anderson un cadre plus apaisé, taillé sur mesure pour son chant (impeccable) et la chronique de son immuable univers personnel où, depuis dix ans, les personnages trash-paillettes de Bret Easton Ellis évoluent dans l’oppressante modernité urbaine seventies de J. G. Ballard.