Visionnaire et extravagante, Diana Vreeland, ex-rédactrice en chef de Vogue, a révolutionné l’idée même du magazine de mode. Le 22 août dernier marquait le 28ème anniversaire de sa mort. Voici cinq choses à savoir sur sa carrière.
Elle était au service de la beauté, de la création, de la modernité. Bien née et mariée à un banquier fortuné, Thomas Reed Vreeland, la jeune Diana aurait pu ne pas travailler. Trop brillante pour se laisser vivre, elle est devenue l’une des rédactrices de mode les plus influentes du XXème siècle. En 26 ans chez Harper’s Bazaar et une dizaine d’années chez Vogue, la vision, l’extravagance et l’humour de Diana Vreeland ont transformé le visage de la presse mode. Le 22 août 1989, il y a tout juste 28 ans, cette grande dame s’éteignait dans son appartement rouge flamboyant de Park Avenue à New York. Retour sur quelques uns des grands moments de sa carrière.
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Elle a décoincé la presse féminine
C’est en 1936, embauchée par la très respectée Carmel Snow, que Diana Vreeland intègre Harper’s Bazaar. Dès son arrivée, elle injecte à ce magazine encore quelque peu traditionnel une bonne dose d’humour et d’audace. Elle y imagine une rubrique baptisée Why don’t you…, loin du ton habituel des parutions de l’époque, qui ont davantage pour ligne directrice d’apprendre aux femmes à être des épouses et maîtresses de maison exemplaires et élégantes. Cette colonne rassemble une liste d’idées totalement extravagantes : Pourquoi ne pas… Peindre une carte du monde sur les murs de la chambre de vos enfants, afin qu’ils ne grandissent pas avec une vision trop étriquée ? Rincer les cheveux de vos petites têtes blondes avec du champagne pour les faire briller ? Transformer votre vieux manteau d’hermine en robe de chambre ?
Elle a dépensé sans compter pour faire voyager son lecteur
Cinq semaines au bout du monde pour photographier de quoi remplir une vingtaine de pages, des milliers de dollars dépensés. Pas d’importance, pourvu que le lecteur de Vogue puisse voyage depuis son canapé. A l’hiver 1966, c’est au nord du Japon encore enneigé que Diana Vreeland s’envole avec son équipe. Elle a en tête le Dit du Genji, chef-d’œuvre de la littérature nippone, conte ancestral, le premier écrit par la main d’une femme : l’histoire d’une femme occidentale fortunée, qui part explorer les montagnes du Pays du Soleil Levant vêtue de fourrures opulentes. C’est là qu’elle rencontre et tombe amoureuse d’un Japonais. Pour donner corps à cette histoire, la rédactrice réquisitionne Richard Avedon, fait empaqueter des kilos de vêtements dans une quinzaine de valises pleines à craquer. C’est le mannequin allemand Veruschka et son mètre quatre-vingt dix qu’elle choisit pour poser. Il faut alors trouver un homme plus grand qu’elle, sur place, pour l’accompagner. Plusieurs jours durant, l’équipe inspecte les tournois de sumos pour satisfaire les exigences de Madame Vreeland. La légende raconte que cette série éblouissante aurait coûté plus d’un million de dollars.
Elle a célébré l’imperfection
Saisir la particularité, le caractère, l’unique enfoui en chacun et percevoir la beauté dans la différence. Diana Vreeland a maintes fois photographiée la chanteuse Barbra Streisand, de profil surtout, afin que les lecteurs puissent admirer son nez digne d’une Néfertiti moderne. Elle a incité Lauren Hutton à rire, dévoilant ainsi ses dents du bonheur. Idem pour le front large et les yeux tristes et tombants de Penelope Tree. La rédactrice accentue ce regard d’enfant abandonnée en lui faisant maquiller les cils du bas de façon exagérée. Elle fait de ce visage mal proportionné l’une des figures les plus iconiques des années 60. Pour Diana Vreeland, c’est dans l’originalité et la bizarrerie que réside le meilleur atout de chacun. Les beautés évidentes ne l’ont que peu intéressée.
Elle a embrassé la création dans son ensemble
Diana Vreeland fut l’une des premières à comprendre et exploiter les liens entre mode, cinéma, art et musique, qui se renforcèrent dans les années 60. Elle recherche des allures, des attitudes, à 360 degrés autour d’elle. Prise de fascination pour Mick Jagger, elle est la première à publier son portrait en 1964, alors que les Rolling Stones viennent à peine de se former. Elle se saisit de l’effervescence artistique et créative de l’époque, faisant entrer Maria Callas, Luchino Visconti, Serge Gainsbourg, les Beatles et Jackson Pollock dans les pages d’un magazine de mode. Elle lance la frimousse juvénile et androgyne de Twiggy, capte son énergie, encourage Diane Von Furstenberg dont elle aime la féminité simple, ouvre à la famille Missoni les portes de l’Amérique. Un flair et une sensibilité créative infaillible : tous sont devenus des icônes.
Elle a donné ses lettres de noblesse à l’exposition de mode
En 1971, ses idées brillantes et fantasques lui coûtent sa place chez Vogue. Le magazine est ruiné et Diana Vreeland est incapable de gérer ses dépenses. Elle est remplacée par son assistante, Grace Mirabella. Accablée, elle s’exile quelques temps en Europe, puis l’été suivant, elle est approchée par le Metropolitan Museum of Art de la ville de New York. Elle prend en charge le Costume Institute, aile du musée un peu endormie, et dépoussière l’exposition de mode. Exit les robes d’époque : pour le Met, elle imagine des expositions d’un autre genre, et consacre cet espace au travail d’Yves Saint Laurent et de Balenciaga, deux créateurs encore vivants. Musique, mises en scène flamboyantes, décors somptueux. Ses expositions s’imposent comme des shows incontournables, les soirées d’ouverture sont grandioses et les gens font la queue le long du musée pour venir admirer son travail.
Pour découvrir plus amplement la vie et l’oeuvre de cette mythique rédactrice de mode : le documentaire Diana Vreeland:The eyes has to travel réalisé par Lisa Immordino Vreeland, Frédéric Tcheng et Bent-Jorgen Perlmutt, est disponible ici.
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