Aux élections régionales partielles du 30 août dernier, le parti Die Linke (La Gauche) a réalisé une percée surprenante, qui pourrait se confirmer aux élections législatives du 27 septembre. Le parti, comme la gauche radicale française, est parcouru de débats sur la stratégie d’alliance.
Le 30 août dernier, l’Allemagne votait. Toute ? Non. Des élections régionales avaient lieu dans trois Länder (Etats fédérés) : la Sarre, la Saxe et la Thuringe. Ce dimanche électoral a été marqué par la percée de Die Linke (« La Gauche »), petit parti de gauche né en 2005, regroupant des anciens membres du parti unique de RDA et des déçus du SPD. 27,4% en Thuringe, 20,6% en Sarre : ces deux Etats de l’ex-RDA avaient déjà montré leur sympathie pour Die Linke lors de précédents scrutins. En Sarre, près de la frontière française, le score est inédit : 21,3% et tient en partie à la personnalité d’Oskar Lafontaine, leader national de Die Linke bien implanté dans ce länd.
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Surnommé « le Napoléon de la Sarre », Lafontaine en a été le ministre-président de 1985 à 1998. Il appartenait alors au SPD, le parti socialiste « de gouvernement » allemand, dont il a été président de 1995 à 1999. Lassé du virage libéral de son parti, il décide de claquer la porte en 2005 (après 39 ans de militantisme) et fonde Die Linke.
Louis-Marie Clouet, chercheur au Comité d’étude des relations franco-allemandes de l’IFRI, explique qu’outre-Rhin Oskar Lafontaine a une image « très contrastée ». « Au sein de Die Linke, il a vraiment le charisme, c’est le leader, même si une nouvelle génération est en train d’arriver aux commandes. Pour le SPD il est encore considéré comme un traître, le principal responsable de la crise du parti. A droite il est présenté comme très arrogant, brutal, gauchiste et pas fiable pour gouverner. »
En France, Jean-Luc Mélenchon est l’héritier direct d’Oskar Lafontaine. Les deux hommes se connaissent bien et le Parti de Gauche s’est construit sur le modèle de Die Linke. Jean-Luc Mélenchon prend ces bons résultats pour « un encouragement ». « Die Linke fait son chemin et pour nous c’est la locomotive de tête. Une gauche à la fois radicale et gouvernementale, capable de bâtir une compétition avec la social démocratie », se réjouit-il. Conscient, tout de même, des difficultés qui l’attendent : « Personne ne peut croire que ce genre de parcours est une période de santé. Ca correspond à une étape de décomposition et de recomposition de la gauche. Tous les processus sont instables. »
Olivier Besancenot, lui aussi, reconnaît que Die Linke « crée de l’espoir ». « Dans le cadre de la crise économique, il peut y avoir une contestation sur des bases radicales et une sanction des politiques libérales », analyse-t-il. La question qui se pose à ces partis, en Allemagne comme en France, c’est l’attitude à adopter. Refuser toute participation au gouvernement ? Attendre que les partis de gauche « traditionnels » se rapprochent de leur programme ? Faire pression de l’intérieur ou de l’extérieur ?
En Allemagne, Die Linke est de moins en moins isolée, selon Louis-Marie Clouet. « Le SPD, contraint et forcé, est de plus en plus ouvert à l’alliance au niveau local. La nouvelle direction veut conjurer l’érosion des voix. » Au niveau national par contre, le SPD assure que Die Linke n’est pas un partenaire envisageable. Une telle alliance n’est de toute façon pas souhaitable, du point de vue d’Olivier Besancenot. « Il peut y avoir une opposition de gauche extrêmement forte, capable d’imposer des mesures. Le problème est d’asseoir un parti qui va contester au SPD son hégémonie sur le restant de la gauche. Et ça se passe sur plusieurs années. »
Jean-Luc Mélenchon raconte que les débats sont « très agités » au sein de Die Linke. « Le parti regroupe un arc de force qui va des anciens communistes au mouvement social, au gauchisme, au trotskisme. Par définition la discussion va être assez chaude. » En Allemagne, les élections législatives auront lieu le 27 septembre. Die Linke est pour l’instant crédité de 12% des voix.
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