Pascal Brutal revient pour le premier livre sorti par Riad Sattouf depuis le triomphe de ses Beaux Gosses au cinéma : viril, mais pas correct. Parfait.
Dans ce troisième volume des aventures de Pascal Brutal, Riad Sattouf fait son George Lucas et offre à sa saga une prélogie – et en profite pour se livrer à un révisionnisme malfaisant. Dans “Le Nourrisson Pascal”, premier chapitre, il revient ainsi sur la naissance trouble de ce superhéros qui fait de Rennes la capitale lubrique de la France de Madelin (Alain, pas le cartel). On y apprend que Pascal y serait né de père inconnu (un punk à chien) et d’une mère teufeuse. Faux : Pascal est le fils de Pantagruel, d’Obélix, de San Antonio, de Jamel Debbouze, des frères Thémistècle (Pierre La Police) et de Jean-Claude Van Damme.
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Personnage de poids dans la BD à ligne pas très claire, volontiers binouzée et enfumée, Pascal Brutal revient donc tout en suavité, pour le premier livre sorti par Riad Sattouf depuis le triomphe de ses Beaux Gosses au cinéma. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce flirt torride avec le grand public n’a en rien entamé son mauvais esprit, sa cinglante incorrection politique, son appétit pour l’outrance, l’hénaurme, l’indicible. Car derrière les facéties et provocations surréalistes de “l’homme le plus viril du monde”, Riad Sattouf fait partie de ces vicieux avocats du diable, démontrant sans rémission par l’absurde.
Ce Plus fort que les forts porte ainsi le même sourire couillon et goguenard que les films d’Apatow : même comique de répétition, mêmes digressions irrationnelles, même façon de démolir, par le ridicule et la démesure, les codes sociaux et les dogmes.
Pascal porte toujours la gourmette, la chaussette blanche Sporteuf dans la basket Adidas Torsion 1992 avec une classe folle : il pense avec sa bite, qui ne possède pas un QI haut de gamme. Sa vie est minable, sa sexualité effarante, sa moto bling-bling : Pascal est la caricature la plus drôle et violente jamais réalisée du über-macho. Une bêtise qui, alliée à la naïveté savante du trait, permet à Sattouf de deviser en douce, ricanant et espiègle, sur des sujets aussi complexes que l’islam, l’homosexualité, le désoeuvrement qui vire au cancer de l’âme, l’ultracatholicisme breton (Quimper, devenu “une ville exclusivement habitée par les gays”, jolie réponse au scandale local provoqué par une fausse affiche de gay pride, “Breizh gay”, dans son film).
Cette France au futur proche (Jean Sarkozy y est ministre de l’Education et des Sports) rend juste un peu plus navrante celle de 2009. Mais comme le dit la fin haletante d’une des aventures : “Pascal Brutal sauve la France tous les jours, mais presque personne ne le sait.” Rejoignez le camp des Lumières.
Pascal Brutal – Plus fort que les forts (Fluide Glacial), 46 pages, 9,95€ /// www.myspace.com/pascalbrutal
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