La proposition de loi Robinet, adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale, introduit le vote électronique à l’université pour l’élection de représentants. A droite, certains voudraient aller plus loin et organiser des consultations sur les blocages.
Le 28 septembre, l’Assemblée nationale a voté en première lecture la proposition de loi d’Arnaud Robinet, visant à autoriser le vote électronique lors d’élections internes aux universités. Celles qui le souhaitent pourraient mettre en place un scrutin par Internet pour désigner les membres de leurs différents conseils. Le député de la Marne, benjamin du groupe UMP à l’Assemblée et maître de conférence à la faculté de médecine de Rennes, a expliqué que sa proposition visait à renforcer la participation aux élections universitaires, souvent inférieure à 20%, et à limiter les fraudes. [Voir la vidéo]
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Outre les désaccords sur le principe même du vote électronique, l’opposition pressent d’autres motivations de la part du gouvernement : le but de cette loi ne serait-il pas de consulter les étudiants en cas de blocage de l’université ? Patrick Bloche, député socialiste de Paris, faisait partie de ceux qui ont soulevé la question. « Si on met en place un corps électoral et un dispositif de vote, rien n’empêche de mener des consultations pour faire appel à cette fameuse « majorité silencieuse qui veut étudier » », estime-t-il.
Arnaud Robinet réfute la « confusion » et le « prétexte » de l’opposition. « Le titre de la loi est clair : il s’agit de permettre aux universités d’utiliser le vote électronique pour les élections, et non d’organiser des consultations ». Il n’y a selon lui « aucun rapport » entre sa loi et les blocages. Il est vrai que la proposition ne mentionne pas cette possibilité.
Le déroulement du vote à l’Assemblée interpelle pourtant. Déposée le 8 juillet, la proposition de loi a été inscrite à l’ordre du jour en un temps record. Un traitement réservé aux initiatives téléguidées par le gouvernement ou qu’il juge prioritaires.
Lors de la discussion, le président socialiste de la commission des Finances, Didier Migaud, a soulevé l’irrecevabilité financière. D’après l’article 40 de la Constitution, un député ne peut pas prendre d’initiative qui crée une dépense publique. « Pour une proposition déposée par un député d’opposition, ça se serait arrêté là », juge Patrick Bloche. Mais malgré l’intervention de Bernard Accoyer, président UMP de l’Assemblée, qui s’est rangé à l’avis de Didier Migaud, Valérie Pécresse a surgi à la rescousse. La ministre de l’enseignement supérieur a repris les articles posant problème à son compte pour leur permettre de passer. Il faut vraiment que le gouvernement y tienne.
Les Jeunes populaires favorables aux consultations électroniques
A l’occasion de la loi Robinet, qui n’a donc rien à voir avec la question du blocage des facs, les Jeunes Populaires (UMP Jeunes) défendent… le vote électronique en cas de blocage. Une subtilité qui nous échappe.
Benjamin Lancar, président des Jeunes populaires, laisse entendre que même si la loi n’en parle pas, elle ouvre la porte à ce genre de consultations. « Les fichiers peuvent permettre que ce système ait lieu », explique-t-il. « Ce n’est pas à la loi de fixer ça, nous nous sommes battus pour l’autonomie des universités ! Si nous l’avions fait, on nous aurait reproché un texte anti-UNEF, anti-syndicats… » Il précise cependant que les Jeunes UMP « proposent le vote systématique en cas de blocage. En assemblée générale, les bloqueurs font venir des gens qui ne sont pas étudiants, et les urnes sont parfois cassées comme à Lyon ».
Arnaud Robinet lui-même ne s’oppose pas à ce que les procédures de vote électronique prévues par sa loi – qui n’a aucun rapport – soient utilisées dans des consultations sur le blocage. « Il est nécessaire de pouvoir consulter dans la confidentialité. Si le vote électronique présente toutes les précautions de sécurité, il peut être utilisé. Le président d’université peut l’utiliser pour ça, mais à ses frais. »
Pour Camille Bedin, des Jeunes UMP, « l’objectif premier » est de « faire passer cette loi avant les élections syndicales du mois de mars », « le plus vite possible », pour mettre fin à « un système peu représentatif ». Le blocage est « une autre question, plus difficile » et « déconnectée » de la loi actuelle.
L’UNI, syndicat étudiant de droite, a tout de suite fait le lien. Dans un communiqué sur la loi Robinet, l’UNI affirme son opposition au « vote électronique en cas de blocage, qui fait débat » Le syndicat est favorable à l’intervention des forces de l’ordre, et considère que le simple fait de voter sur le blocage donne de la valeur à un procédé illégal. « Ca risque d’être un corollaire de la loi et de venir sur le devant de la scène bientôt. Le débat existe chez les parlementaires UMP et dans les partis jeunes. L’idée est revenue pendant les blocages de l’an dernier », estime Rémi Martial, délégué national de l’UNI. « Le débat n’a jamais eu lieu en commission ou avec des parlementaires UMP à l’occasion de la loi », rétorque Arnaud Robinet.
Le député socialiste Régis Juanico le rappelait pendant les débats : le 17 juin, une proposition de loi avait été déposée sur le bureau de l’Assemblée par des députés UMP. Elle prévoyait une amende de 1000 euros pour les lycéens bloqueurs et la convocation d’une assemblée générale, avec vote à bulletin secret. Et Valérie Pécresse, qui a poussé pour l’adoption de la loi Robinet, avait prôné en mai dernier la consultation des étudiants par internet.
« Les consultations directes par internet des étudiants qui ont eu lieu au cours des dernières semaines ont toutes donné le même résultat : « contre les blocages ». Je souhaite qu'(elles) soient généralisées dans toutes les universités », avait-elle déclaré devant l’Assemblée nationale. Mais puisqu’on vous dit qu’il n’y a aucun rapport…
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