La jeune marque parisienne, plutôt discrète, a donné son quatrième défilé pendant la dernière fashion week parisienne : des silhouettes street de luxe, élaborées à partir d’anciens vêtements twistés par la patte de ses créateurs, confirmant son statut de label à suivre.
« Tout a déjà été fait. » Ces propos, que l’on pourrait très bien imaginer sortir tout droit du manifeste Anti Fashion, sont tenus par Lenny Guerrier, l’un des créateurs derrière la marque de prêt-à-porter unisexe Nïuku. Cet ancien collectionneur de mode, après des années plongées dans les archives des plus grands créateurs, s’est rendu à l’évidence que les plus belles silhouettes avait déjà été imaginées. Le plissé d’Issey Miyake, la déconstruction de Margiela, les tailles soulignées d’Azzedine Alaïa… Impossible selon lui de dépasser les maîtres.
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Quelle place alors pour la jeune création ? Nïuku esquisse le visage d’une nouvelle phase de la mode, où la création ne se limite plus à la conception de vêtements ex nihilo, mais s’élargit à la renaissance de pièces iconiques, réassemblées suivant un certain air du temps. Déroutant et rafraîchissant. Voilà ce qu’il faut savoir sur ce label pas comme les autres.
A l’origine, un collectionneur
Avant de lancer sa marque, Lenny Guerrier était plongé dans les archives des plus grands créateurs de mode : il s’associe avec un archiviste pour fonder BassCoutur, traquant les plus belles pièces Yves Saint Laurent, Balenciaga, Martin Margiela. Au début des années 2000, les friperies sont à leurs balbutiements. Son impressionnante archive de pièces attire l’oeil des musées : il prête ses archives pour plusieurs grands événements et rétrospectives de maisons. Il puise ses connaissances de la mode dans les silhouettes qu’il accumule. « Les jupes portefeuilles, les manches comme-ci ou comme-ça, les mises en place de bouton… Tout a été déjà fait, explique Lenny Guerrier. Celui qui a le pouvoir aujourd’hui, c’est celui qui possède le savoir – et donc des archives conséquentes. »
Une boutique d’avant-garde
De 2012 à 2014, Lenny Guerrier tient Coïncidences, boutique de mode rue Chapon dans le Marais. C’est une des premières fois qu’une boutique mélange jeune création – dont le tout jeune label Etudes Studio – et sélection vintage, présentées au sous-sol de la boutique. A ses côtés travaille Kadiata Diallo, jeune styliste diplômée du Studio Berçot. Inspirée par une collection Helmut Lang entièrement en jean, reçue à la boutique, elle imagine pour les employés de Coïncidences un uniforme inspiré du workwear traditionnel, réalisé en denim. Une idée prend forme : pourquoi ne pas faire leurs propres créations ? La marque Nïuku, qui tire son nom du deuxième prénom de Kadiata, est née.
Une « mode d’archives »
Après un défilé dans un parking, au club parisien Salo et à la boutique Marché Noir, c’est dans un hôtel particulier près de la place de l’Etoile que Nïuku présente sa collection automne-hiver 2018, durant la semaine de la mode masculine. Les 32 silhouettes, travaillées en collaboration avec le troisième membre de la team Nïuku, Riad, sont un habile mélange de neuf et de vieux : des vêtements anciens découpés et réassemblés pour former de nouvelles associations, aux inspirations résolument street.
Les maîtres-mots ? Déconstruction et réemploi. Au détour d’un passage, on remarque un logo Reebok sur un haut de jogging… agrémenté d’un imprimé « BassCoutur » sous une manche : une pièce clairement et fièrement upcyclée. Mention spéciale au t-shirt « Azzedine » porté par l’un des mannequins, hommage au créateur de mode Azzedine Alaïa disparu en novembre dernier. Une renaissance irrévérencieuse que le couturier anticonformiste aurait sûrement beaucoup appréciée.
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