Menés par la frénétique Karen O, les Yeah Yeah Yeahs donnaient hier soir leur premier concert en France depuis la sortie de l’album Fever To Tell. Expérience colorée et ancrée avec passion dans un rock sans prétention.
Le petit monde du rock ? le vrai, le seul, le dur -, pris au piège de ce nouveau mouvement déferlant de groupes en « The », annoncée par la presse spécialisée comme la vague la plus « in » de la planète musicale indépendante actuelle, devait tenir un ultime concile mardi soir, avec le concert des Yeah Yeah Yeahs.
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Un buzz a précédé la sortie des maxis, l’album Fever To Tell récemment sorti, et même ce concert ; On dit que Karen O est une brute de scène, une nana chevronnée, sexy, délirante, et que ses prestations sont généreuses. Et puis, pour augmenter de quelques degrés une marmite déjà chaude bouillante, le trio new-yorkais a fait un méchant faux bond au public parisien il y a quelques mois, annulant le jour même un concert largement attendu.
Stratégie marketing, ou véritable événement scénique, le public demande visiblement à savoir ce qu’il en est. Le Trabendo, à 21h, affiche complet. Adolescents surexcités, ou peuplade parisienne branchée, on compte quelques t-shirts des Kills et quelques mini-jupe colorées. Une faune qui attend le groupe au tournant.
Elle arrive, habillée d’un short court, et d’un débardeur bariolé, vert, rose et jaune, la coupe de cheveux rappelant Chrissie Hynde, et le sourire intarissable, – peut-être dû au champagne qu’elle tient dans la main. « Shake Shake Shaking », Karen s’époumone et se dandine, donnant le ton de la soirée, secouée et sexy.
On comprend vite que le nom du groupe ne tient pas du hasard. Ou que si il en est un, le hasard fait bien les choses. Karen dit des Yeah à en perdre le souffle, les entrecoupe de Oh!, Eh!, Ah!, tous plus extasiés les uns que les autres. Elle fait de son micro son meilleur ami, s’en sert comme d’un bâton de majorette, le balance en rythme, le porte à sa bouche, le remue, et s’enveloppe dans le fil pour mieux tourner sur elle-même. Elle est indiscutablement le centre du spectacle, et même plus, elle est le spectacle. Le batteur Brain Chase parfois un peu limite, le guitariste Nicolas Zinner, efficace, mais scéniquement inexistant, font office de faire valoir, et balancent les morceaux sans folie, mais avec rythme.
Les titres Rich (dont l’intro déboule avec une clarté saisissante), Date With The Night, Pin, ou Y Control sont propices à des déchaînements. On hésite. Est-elle bourrée, droguée, en pleine introspection psychique ? Tout simplement, elle semble vivre intensément chacun de ses cris stridents, toujours justes, même si parfois, le souffle manquant, sa voix perd de l’intensité.
Elle dédie Maps à Angus, leader des Liars ? qui possède une folie similaire à la sienne, peut-être prennent-ils des cours ensemble -, qu’elle appelle « son amour », et se pose enfin, fixant le public de son visage transpirant.
En une heure de concert, on entendra les morceaux des deux premiers et uniques maxis du groupe, dont l’excellent Art Star, pendant lequel elle braillera le micro calée entre les dents, mais aussi le trépidant Machine.
Suivra un rappel terne, qui démontre les limites du groupe. Bardé de quelques excellents titres, il survit sur des morceaux moins ficelés avec l’unique charisme de Karen, qui ? on a pas encore crée de robots pour remplacer les chanteuses – finit logiquement par s’essouffler.
Les Yeah Yeah Yeahs font de la technique et de la précision une variable aléatoire Mais avec cette fièvre féminine qui semble affoler les garçons du premier rang, et avec cette joie évidente qu’ils ont à jouer, le groupe pose son rock brut et frénétique comme un événement à vivre un jour sur scène. Au moins pour Karen.
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