Un accord a été trouvé ce vendredi 12 janvier entre les chrétiens-démocrates (CDU/CSU) d’Angela Merkel et les sociaux-démocrates (SPD) de Martin Schulz. Mais cette alliance -tant attendue- va-t-elle avoir une réelle influence sur la politique de fer menée par la Chancelière ?
C’est une nouvelle qui a dû soulager une bonne partie de l’Allemagne. Plus de trois mois après une victoire aux législatives – qui avait été qualifiée de « cauchemardesque » par la presse outre-Rhin –, Angela Merkel et les chrétiens-démocrates (CDU/CSU) viennent de trouver un terrain d’entente avec les sociaux-démocrates (SPD) pour former un nouveau gouvernement, après 24h non-stop de négociations. Avec pour principal objectif de « renforcer » et « réformer » la zone euro en compagnie de la France.
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Une issue qui s’apparente à une marche arrière pour Martin Schulz. Après la victoire fébrile de l’union CDU/CSU (32 %) porté par la Chancelière et le score historiquement bas du SPD (20,5 %) en septembre dernier, le leader des sociaux-démocrates martelait qu’il ne « repartirait pas en grande coalition » avec les conservateurs.
La montée en force de l’extrême droite
Une déclaration qui a logiquement mené à une tentative de coalition entre CDU/CSU, les écologistes (Verts) et les libéraux (FDP). Mais loin de s’entendre sur des questions essentielles comme l’immigration et la politique énergétique, cette initiative était alors tombée à l’eau.
Depuis l’Allemagne se retrouve sans majorité gouvernementale: une première depuis 1949. Et le contexte politique est particulièrement tendu: le parti d’extrême droite l’AfD a atteint un score de 13 % aux législatives (suffisant pour envoyer des députés au Bundestag), et poursuit depuis ses provocations médiatiques.
L’annonce de cet accord s’avère donc être une forme de soulagement pour CDU/CSU. Mais, s’il est validé par les instances dirigeantes des partis en question, il soulève également de nombreuses interrogations. À commencer par la politique que devra mener Angela Merkel.
L’étau se resserre
Car la Chancelière va se confronter à un sacré challenge: contenter à la fois les sociaux-démocrates (SPD) et l’Union chrétienne-sociale en Bavière (CSU), l’allié historique du CDU. Or ces deux parties se divisent sur de nombreux sujets, et nourrissent de grandes divergences. En particulier en matière d’immigration.
Les conservateurs bavarois de la CSU reprochent à la Chancelière d’appliquer depuis quelques années une politique bien trop centriste. Désormais, ils veulent appliquer une stratégie migratoire bien plus ferme: le regroupement familial sera limité à 1 000 personnes par mois et le nombre de réfugiés ne devra pas excéder 220 000 par an. Et ce alors même que plus d’un million de demandeurs d’asile sont entrés sur le territoire allemand en 2015 et 2016.
« Si nous acceptons de rentrer au gouvernement, ce ne sera qu’à la condition de renforcer l’Europe », avait avancé Martin Schulz avant le début des négociations. Mais les sociaux-démocrates ne veulent pas s’arrêter là et comptent bien profiter de la position délicate d’Angela Merkel. Ces derniers ont d’ores et déjà proposé une réforme de l’assurance maladie à leurs homologues. Une proposition rejetée par les chrétiens-démocrates, qui ont toutefois concédé une refonte du système de financement. La possibilité de mettre en place une assurance citoyenne -financée par l’ensemble des revenus- a également été évoqué.
Une position fragilisée
Angela Merkel, au pouvoir depuis douze ans maintenant, devrait donc être de retour pour une nouvelle mandature. Mais celle-ci va devoir jongler entre les exigences des uns et des autres, tout en affirmant son autorité. Et ce alors que la CSU se fait de plus en plus oppressante, et que le SPD attend beaucoup des concessions obtenues lors des négociations. Une sorte d’étau qui se referme sur la Chancelière, et qui pourrait provoquer plusieurs crises politiques internes une fois le nouveau gouvernement établi. Une mauvaise nouvelle pour Emmanuel Macron, qui attend toujours que la situation outre-Rhin se stabilise pour poursuivre les discussions européennes.
En attendant, la coalition doit encore être validée lors d’un congrès le 21 janvier. Pour -dans le meilleur des cas- mettre en place un nouvel exécutif d’ici le printemps prochain. Mais, comme l’explique Der Spiegel, « la réédition de la coalition ne fait pas l’unanimité dans les rangs des sociaux-démocrates ». Et si ce consensus venait à échouer, c’est tout le pays qui vacillerait à nouveau. Martin Schulz prendrait inévitablement la porte du SPD, et deux options se présenteraient alors à une Angela Merkel affaiblie, mais toujours aussi populaire : poursuivre avec une minorité gouvernementale (ce qu’elle a toujours refusé de faire), ou bien réorganiser des élections. Deux issues aussi périlleuses l’une que l’autre, dans la crainte permanente d’une nouvelle montée du nationalisme.
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