Deux mois après le début mouvementé de la rétrospective Roman Polanski à la Cinémathèque française, son directeur, Frédéric Bonnaud est revenu, avec provocation, sur ses choix lors d’une interview pour Première.
Fin octobre, le début de la rétrospective de la Cinémathèque française consacrée à Roman Polanski avait fait polémique, quelques semaines après l’affaire Weinstein et la sortie de nouvelles accusations de viols à l’encontre du réalisateur franco-polonais, et a suscité des manifestations organisées par des associations féministes.
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“Un choc totalitaire” de “demi-folles”
Quelques semaines plus tard, l’institution parisienne annonçait le report de la rétrospective Jean-Claude Brisseau, condamné pour harcèlement sexuel, qui devait s’ouvrir le 10 janvier prochain. Une rétrospective qui devrait finalement avoir lieu “au cours de la saison 2018-2019” selon le directeur de la Cinémathèque française (et ancien directeur de la rédaction des Inrockuptibles), Frédéric Bonnaud. Quelques jours plus tard, le réalisateur lituanien Sharunas Bartas également programmé à la Cinémathèque, était accusé à son tour par deux femmes de harcèlement sexuel et d’agression.
Suite à ces polémiques, le patron de la Cinémathèque avait regretté le retour de “l’ordre moral” et des “ligues de vertu”. Il avait également dénoncé un “choc totalitaire” de “demi-folles”. Sous-entendu, les associations féministes. Dans un communiqué, la Société des réalisateurs lui a répondu en regrettant que l’institution ne soit pas à la hauteur des événements. Dans ce texte signé par Céline Sciamma, Rebecca Zlotowski, Jacques Audiard ou bien encore Bertrand Bonello, on pouvait ainsi lire : “D’abord, qu’en mettant à l’honneur à quelques semaines d’écart deux auteurs condamnés pour crimes sexuels, puis en n’en reportant qu’un sur les deux – qui par un effet de chronologie des faits tombe fort inopportunément sur le moins reconnu des deux – elle nous semble contribuer à initier puis hystériser un débat auquel elle n’apporte hélas aucune perspective.” Une invective à laquelle le directeur de la Cinémathèque oppose qu’on reproche à son institution de “tenir une position claire”.
Bonnaud assume ses engagements
Dans une nouvelle interview publiée dans le numéro de janvier du magazine Première, Frédéric Bonnaud a repris certains arguments qu’il avait mis en avant lors de son intervention chez Mediapart, où il se rappelle avoir dû “défendre vigoureusement la position de la Cinémathèque” face à deux journalistes expérimentés et amis, “dont [il a] découvert avec effarement qu’ils semblaient prêts à croire par principe toutes les accusations proférées contre Roman Polanski, même les plus tardives et les plus loufoques”. Frédéric Bonnaud semble ne pas vouloir céder et défend ses choix avec provocation. Il assume avoir tenu sa position et maintenu la rétrospective Roman Polanski.
“C’est l’honneur de la Cinémathèque française, je dis bien l’honneur, dans un moment d’hystérie collective où l’on mélange tout et où tout le monde a peur d’être lynché médiatiquement en cas de position non-conforme, d’avoir tenu bon sur ses principes et ses engagements”
“Faire des amalgames ne sert à rien”
Pour Frédéric Bonnaud, Roman Polanski est, surtout, victime d’amalgames liées à l’affaire Weinstein : “Faire des amalgames ne sert à rien sinon à clouer des gens célèbres au pilori en les assimilant à des criminels qu’ils ne sont pas.”
Le directeur de la Cinémathèque dénonce “une escroquerie intellectuelle et une mauvaise action politique” concernant le cas de la polémique entourant les rétrospectives Polanski et Brisseau et “qu’il convenait désormais de s’autocensurer en permanence”. Et d’ajouter “[qu’il] ne voulait plus organiser de rétrospective avec un cinéaste qui passe par le parking”.
Une interview “ahurissante” pour Twitter
Sur Twitter, cette attitude jusqu’au-boutiste n’a pas manqué d’être critiquée. Certains lui reprochant notamment d’absoudre totalement Roman Polanski accusé à plusieurs reprises de viols sur mineures.
Entre autres petits arrangements avec les faits dans les réponses de Frédéric Bonnaud, non, Brisseau n’a pas reçu de «Léopard d’honneur» à Locarno, mais l’un de ses films a reçu le Léopard d’or en 2012, et la différence est de taille.
— Julien Gester (@juliengester) January 3, 2018
Frédéric Bonnaud, directeur de la Cinémathèque française, revient pour Première sur les polémiques Polanski et Brisseau, l'affaire Weinstein… https://t.co/VjuBXHJHBO Une interview dont je retiens ce passage ahurissant dédouanant Polanski de tout reproche en raison de son passé pic.twitter.com/MwSp9CkGI8
— Fabien Randanne (@fabrandanne) January 3, 2018
https://twitter.com/citroncool/status/948557489733324802
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