L’identité nationale se décline en livres, signés par Eric Besson (eh oui !) et le nauséabond Richard Millet, qui vantent notre beau pays. Bienvenue en terre chrétienne !
Cette année, on oublie les bonnes résolutions ; c’est has been. En 2010, pour être tendance, on ne cherche pas désespérément à arrêter de fumer ni à se mettre au footing avec un joli T-shirt NYPD. Non, on ne change rien.
Même un accro à la volte-face comme Eric Besson l’a compris. Entre la dinde et la bûche aux marrons, le ministre de l’Immigration aurait pu être tenté de se dire : “Le 1er janvier, c’est décidé, j’en finis avec la droitisation.” Mais non, il persiste et signe Pour la Nation, une sorte d’“Ernest Renan pour les nuls” qui lui vaut d’ailleurs d’être assigné en contrefaçon, le titre ayant déjà été utilisé par un autre auteur très à droite.
Son éloge de la France de Clovis et de Charlemagne s’apparente surtout à un fascinant exercice d’autojustification. Alors que le débat sur l’identité nationale qu’il a lancé le 2 novembre tourne clairement à la catharsis nauséabonde et raciste et que de plus en plus de voix s’élèvent pour demander d’y mettre un terme, Besson, droit dans ses bottes de bon petit soldat du sarkozysme, s’entête à vanter un débat “ouvert, chaleureux et fraternel”.
Et s’il avoue n’éprouver aucun plaisir à engager une procédure de reconduite à la frontière (la précision était-elle vraiment utile ?), il défend bec et ongles sa politique répressive, en cherchant même à la parer de vertus humanistes.
Besson le traître est désormais fidèle à une certaine idée de la France, figée et rance, formolée dans une imagerie très IIIe République, comme dans ces lignes où il loue “la beauté et l’hospitalité” des paysages de “notre territoire” et “la douceur de son climat”.
C’est bien connu, la terre ne ment pas, et il fait tellement bon vivre en Sarkozie. Un auteur comme Richard Millet, écrivain du terroir à la prose faisandée, doit s’y sentir moins seul. Il pourrait même en être l’un des hérauts, lui qui dans son précédent livre, L’Opprobre, déclarait qu’une “immigration chrétienne” est préférable à une “immigration musulmane” et que la paix civile est menacée par les minorités.
En cette rentrée de janvier, il publie simultanément un récit et un roman. Dans ces textes ennuyeux, pas de saillies ouvertement xénophobes. Pour autant, Millet se montre lui aussi fidèle à sa ligne réactionnaire, encore capable d’écrire dans son style compassé qu’“(…) un pays où les prêtres ne se voient pas, ou ont honte d’eux-mêmes, est un pays perdu” et de déplorer à longueur de pages la mort de la langue française et le déclin de la civilisation occidentale. C’est un peu sa façon à lui de contribuer au si “chaleureux débat” sur l’identité nationale.