Le faux rockumentaire le plus drôle fête ses 25 ans. Anne-Claire Norot passe au peigne fin le petit chef d’oeuvre de Rob Reiner.
Spinal Tap le film est sorti en salles en 1984, et bien plus tard en France où il a circulé surtout en vidéo puis DVD, réservé aux initiés, aux happy few heureux de pouvoir s’échanger quelques bonnes blagues totalement hermétiques pour le profane – il faut avoir vu le bassiste Derek Smalls prisonnier de son cocon pour apprécier.
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Réalisé par Rob Reiner – Princess bride, Quand Harry rencontre Sally – qui n’a jamais plus été piqué par le même grain de folie hystérique depuis, Spinal tap relate la tournée 1982 de ce trio anglais grand guignolesque, hybride dégénéré de Van Halen, Iron Maiden, Guns’n’ Roses et Aerosmith, ainsi que la sortie chaotique de leur disque Smell the glove.
Dans ce grand et fictif rock’n’roll circus, tous les tics, manies, us& coutume de la rock star sont dépecés avec une précision chirurgicale, poussés à l’outrance, parfois jusqu’au non-sens. L’obsession pour la technique, la maîtrise des éléments autres que musicaux (décors, costumes, scènes, pochette), la crétine copine du leader qui s’impose manager, la prétention culturelle, l’imagerie cheap, les égos monstrueux, la tentation mystique, l’astrologie, l’incompréhension avec les maisons de disques, les paroles cul-beauf des chansons, tout y passe, et surtout, tout semble véridique. Même l’absurde et l’irrationnel, qui seuls prennent sens dans les têtes malades des trois rockers – comme la combustion spontanée des batteurs, par exemple – semblent trouver leur justification dans cet univers totalement barré. Sous ce sérieux quasi anthropologique, les faits paraissent à peine exagérés et tout devient hilarant, parce que tellement vrai, tellement vu et entendu des centaines de fois, de Manchester – et ses deux frères ridiculement ennemis – à Tampa Bay, Floride – et son clown gothico-morbide. Même pas la peine d’aller chercher les groupes de hard rock.
Dans Spinal tap, rien ne dérape jamais, la musique – basique, deux accords et beaucoup de solos – est insupportable mais plausible, les protagonistes sont parfaits – parfaitements crétins, parfaitement obsédés de musique, parfaitement incultes, parfaitement égotiques, parfaitement crédibles. Travail d’expert autant que parodie, Spinal tap est une énorme farce, une succession non stop de gags super cons, de dialogues de sourds, de réflexions absurdes. Tourné il y a vingt-cinq ans, Spinal Tap – qui a ensuite donné lieu à une plébiscitation insensée du groupe, qui a depuis fait de vraies tournées et sorti de vrais disques – est toujours aussi pertinent aujourd’hui – c’est bien connu, le rock conserve mieux que le formol.
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