C’est fait. Sefyu vient d’être sacré « révélation du public » lors de la 24ème cérémonie des Victoires de la musique. Retour sur une interview donnée quelques heures avant son triomphe. De Julien Doré au rap français.
Quel est ton souvenir des Victoires de la musique à la télé ?
Le 113 en 2000, un sacré souvenir. C’était une des premières fois qu’on voyait des rappeurs à une heure de forte audience. Ça avait donnée beaucoup d’espoir au rap et à la jeunesse des quartiers.
Aujourd’hui, le rap est un style musical reconnu, et c’est très rare de le voir représenté ailleurs que dans la catégorie musiques urbaines.
C’est le gros problème. On est des artistes à part entière, et on a envie de se mélanger avec les autres artistes. Quand je suis allé à la soirée des Victoires de la musique, après que les nommés aient été annoncés, j’avais envie de rencontrer des gens comme Julien Doré ou les BB Brunes, qui sont comme moi dans la catégorie « révélation ». Les gens du rap ont envie de se mélanger, et on ne nous en donne pas forcément les moyens c’est dommage. Les mecs de BB Brunes, quand je les ai vus, ils m’ont parle de mon morceau Senegalo Ruskov. Le rap n’est plus en marge chez les jeunes. C’est les gens des médias qui n’ont pas encore pigé le truc.
Cette distinction entre le hip-hop et les autres musiques n’existe plus du tout aux Etats-Unis par exemple…
Oui et ça fait longtemps. Quelqu’un comme Jay-Z n’est plus aujourd’hui considéré comme un artiste « rap » là-bas, mais comme un artiste tout court. Les rappeurs et les autres font des morceaux ensemble, tout le monde fait partie de l’entertainment. En France, les médias et donc souvent le public voient le hip-hop comme une musique « politique ». Quand on voit un rappeur, forcément on lui demande comment ça se passe dans les cités, on lui demande sa réaction sur le dernier fait-divers en banlieue ; hop on met tout dans le même sac. Alors que c’est de la musique ce qu’on fait. Il y a des gens comme Orelsan par exemple aujourd’hui qui font du rap et qui ne viennent pas forcément de banlieue.
En France, tout le monde était focalisé sur la gué-guerre Booba/Rohff, du coup tu as eu le champ libre pour t’imposer discrètement non ?
Je crois que la surprise vient des médias. Pour le public on est là depuis longtemps, on est lancés depuis une paye. On a tourné, on a croisé des gens, on a sorti deux disques. On a vu les choses se passer, loin des médias parfois, mais elles se passaient. Nous on a toujours été conscients de l’engouement autour de notre musique. On est heureux d’avoir fait notre truc de notre côté, et ce côté surprise ma plaît assez, j’aime bien mettre un coup de pompe dans la fourmilière de façon discrète.
Qu’est ce que tu penses de Julien Doré qui est nommé comme toi dans la catégorie « révélation masculine » ?
J’aime bien ce qu’il fait, c’est super original du point de vue de l’interprétation et de l’image. Ce que j’aime avec ce mec c’est qu’il prend des risques. J’aime bien son clip en plan fixe, et l’autre plus sophistiqué avec Catherine Deneuve. C’est vraiment bien fichu, c’est dark et un peu bizarre, ça me surprend.
NTM t’a choisi pour assurer ses premières parties lors de son retour sur scène ? C’était un honneur ?
Je pense qu’ils nous ont choisi parce qu’artistiquement on leur plaisait bien. Joeystarr était venu nous voir en concert une ou deux fois, il m’avait appelé pour faire sa première partie à l’Olympia et pour son album solo. Donc au moment de la reformation d’NTM, forcément, il a fait appel à nous. C’était un honneur, parce que j’ai commencé à faire du rap en écoutant NTM.
Comment s’est passé la tournée ?
Un vrai bonheur. Ils venaient nous motiver dans notre loge, on allait les motiver dans la leur. C’était un grand moment. Je me souviens avoir passé des heures à discuter avec Joeystarr, des discussions très profondes, sur le hip-hop et sur d’autres choses. Non pour moi c’était une tournée légendaire.
Et tu vas bientôt entamer ta propre tournée ?
Oui, je serai au Zénith le 30 avril prochain, et dans toute la France le mois qui précède. Je suis impatient que ça arrive.