Victime de cyberharcèlement après avoir tenu des propos ouvertement homophobes, la jeune actrice porno s’est suicidée à son domicile, à Camarillo en Californie.
Émoi sur les réseaux sociaux et dans le monde du porno. La célèbre actrice X August Ames, âgée de 23 ans, s’est pendue après avoir subi un harcèlement d’une rare violence, sur Twitter.
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Mercedes Grabowski, de son vrai nom, avait déclaré ne plus vouloir tourner avec des acteurs gays. Plusieurs internautes ont alors dénoncé des propos homophobes. Parmi la salve de messages virulents, celui du hardeur Jaxton Wheeler retient l’attention. Dans un tweet effacé depuis, il lui conseille d’« avaler du cyanure ».
Le dernier tweet de l’actrice, « allez tous vous faire foutre », sonne comme un cri teinté de désespoir et de colère.
fuck y’all
— August Ames (@AugustAmesxxx) December 5, 2017
Celle qui se présentait sur son compte comme une « meuf canadienne (…) toujours drôle » cachait une lourde dépression, selon son compagnon.
Prise à partie par de nombreux internautes, August Ames se fend d’une flopée de tweets laissant transparaître sa perte de contrôle face à l’ampleur de la polémique. La performeuse essaye tant bien que mal de démentir les accusations d’homophobie qui l’accablent.
Mauvais genre
Le compte Twitter d’August Ames n’avait a priori rien de très polémique. Lorsqu’elle n’était pas occupée à partager des photos promotionnelles, elle cajolait son public, partageait avec force smileys ses passions (« le café et la weed »), et répondait aux internautes qui la complimentaient. « Je pense que tu as les plus beaux sourcils de l’industrie du porno », se voit déclarer la jeune femme. « Et c’est tout ce qui compte », prenait-elle la peine de lui répondre.
This is all that matters https://t.co/NrGyX7z4Hy
— August Ames (@AugustAmesxxx) December 4, 2017
Le 3 décembre, l’actrice décide de partager un avis personnel sur le milieu du cinéma porno.
whichever (lady) performer is replacing me tomorrow for @EroticaXNews , you’re shooting with a guy who has shot gay porn, just to let cha know. BS is all I can say🤷🏽♀️ Do agents really not care about who they’re representing? #ladirect I do my homework for my body🤓✏️🔍
— August Ames (@AugustAmesxxx) December 3, 2017
« A l’attention de la performeuse qui me remplacera demain pour @EroticaXNews, sache que tu vas tourner avec un gars qui a fait du porno gay. Bullshit, c’est tout ce que je peux dire. Est-ce que les agents se foutent vraiment de qui ils représentent ? (…) », tweete-t-elle.
Le propos est limpide, même pour les non-initiés. L’actrice refuse de jouer une scène avec un acteur « crossover », c’est-à-dire un acteur qui fait à la fois des scènes hétéros et gays.
« Quand on est actrice aux Etats-Unis, on peut dire qu’on ne fait pas d’interracial, tout comme on peut dire qu’on ne fait pas de crossover. Les acteurs qui tournent du porno gay sont suspectés de mener une vie un peu plus débridée, et donc un peu plus à risque, que les autres acteurs. Il y a par exemple des producteurs qui demandent à certaines actrices de ne pas faire de crossover », décrypte Stephen des Aulnois, rédacteur en chef du site Le Tag Parfait, spécialisé dans la culture porn.
« L’interracial, c’est hyper mal vu » en France comme aux Etats-Unis, témoignait d’ailleurs Liza del Sierra dans le documentaire 21 jours classés X d’Alexandra Alévêque, en 2014.
https://www.youtube.com/watch?v=Qy5hIELMEco&t=3437s
(A la 57e minute)
Ce racisme et cette homophobie ordinaires dans laquelle baigne l’industrie sont bien peu connus en dehors du petit milieu du X. « August Ames a dit des choses que le grand public ne savait pas », résume Stephen des Aulnois.
La peur de contracter une IST
Aux yeux du grand public, les motifs avancés par la hardeuse pour ne pas tourner la scène ont de quoi surprendre.
NOT homophobic. Most girls don’t shoot with guys who have shot gay porn, for safety. That’s just how it is with me. I’m not putting my body at risk, i don’t know what they do in their private lives. https://t.co/MRKt2GrAU4
— August Ames (@AugustAmesxxx) December 3, 2017
« Je ne suis PAS homophobe. La plupart des actrices ne tournent pas avec des acteurs qui font du porno gay, par sécurité. C’est aussi mon cas. Je ne veux pas mettre mon corps en danger, je ne sais pas ce qu’ils font dans leur vie privée », lâche la pornstar.
Ces propos ne reflètent pourtant pas les conditions de sécurité dans lesquelles évoluent les acteurs américains. « Les protocoles de contrôle sont assez stricts aux Etats-Unis. Ils sont pratiqués environ toutes les deux semaines, contrairement à la France. Les dossiers médicaux sont accessibles et les producteurs peuvent y avoir accès. Les transmissions de VIH sont très rares », rappelle Stephen des Aulnois. L’argumentaire déployé par la hardeuse Sinn Sage va également dans ce sens.
bullshit. Before your shoot w said performer, for a bg shoot, he would have to get tested, by the same testing companies we all use.When the results are clear, you are clear to fuck him. AND you can ask to use a condom if you want. So there is literally no reason to discriminate
— Sinn Sage 🏳️🌈#BLM (@sinnsage) December 4, 2017
« Tu dis n’importe quoi. Avant de tourner avec ledit acteur, dans le cadre d’une grosse production, il aurait fait un test de dépistage, via une des entreprises de dépistage par lesquelles nous passons tous. Quand les résultats sont bons, tu as le feu vert pour le baiser. Et tu as le droit d’utiliser une capote si tu veux. Il n’y a donc aucune raison de discriminer [les crossovers] », détaille l’actrice X.
Entre 2004 et 2011, seuls 22 professionnels ont été testés positif au VIH aux Etats-Unis. En 2013, l’actrice Cameron May découvrait qu’elle avait contracté le VIH, après avoir tourné dans une scène avec des partenaires sans préservatifs. Un moratoire du monde du porno s’en était suivi, et avait débouché sur une remise en question collective.
Cyberharcèlement
Au-delà de la sphère pornographique, le suicide de Mercedes Grabowski apparaît comme une énième sonnette d’alarme. Le cyberharcèlement touche les personnes de tous âges, de tous sexes et de tous horizons. Mais surtout les femmes. Dans la ligne de mire : Twitter, qui cristallise de nombreuses tensions. La capacité du réseau social à se transformer en réceptacle à propos violents est souvent pointée du doigt.
« Il n’existe pas de monde virtuel. Tout ce qui se passe en ligne se passe aussi dans la vraie vie », rappelait avec justesse Marion Seclin dans une conférence TEDx consacrée au cyberharcèlement dont elle avait été victime.
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