Des chansons angéliques, où les rasoirs flirtent avec la gorge de chérubins (Succumb) histoire d’accélérer les présentations, on parlera de cousins californiens et calamistrés de Black Box Recorder. Après quoi, pour couper court à tout soupçon de plagiat, on précisera que Succumb est le passionnant second album de The Virgin-Whore Complex, princes san-franciscains de […]
Des chansons angéliques, où les rasoirs flirtent avec la gorge de chérubins (Succumb) histoire d’accélérer les présentations, on parlera de cousins californiens et calamistrés de Black Box Recorder. Après quoi, pour couper court à tout soupçon de plagiat, on précisera que Succumb est le passionnant second album de The Virgin-Whore Complex, princes san-franciscains de la perversité tirée à quatre épingles. Sur le livret, une gouape gominée côtoie une brunette en fourreau chinois, coiffée à la Louise Brooks. Deb Fox (beau nom pour une chanteuse de rock, avec ses séduisants échos des Runaways et de Blondie) chante d’une voix aussi pure qu’un ruisseau de la Sierra Nevada des mots sortis des égouts d’un red light district ; quand Spats Ransom, dandy sorti d’un roman de Fitzgerald, se regarde dans un miroir, il découvre la trogne torturée du Harry d’Hubert Selby. Chez The Virgin-Whore Complex, la soie s’imprègne de strychnine, le tintement du cristal cache mal des cris d’effroi. Les délicates tentures harmoniques tissées par le violon, le basson, la harpe et le glockenspiel craquent sous la poussée de pulsions meurtrières ; plus siphonnées que symphoniques, les mélodies molletonnées cachent un arsenal de scalpels. La première chanson, Speakerphone, revient en douce sur les navrants exploits d’un grossiste de l’assassinat (le Zodiac killer, jamais identifié) ; Succumb, c’est parfois Le Silence des agneaux mis en scène par James Ivory. Mais ces berceuses morbides (Lullaby) ne s’engluent jamais dans la sinistrose rance, innervées d’humour rosse et copieusement saupoudrées de pop primesautière. Jamais les Beach Boys n’avaient eu droit à hommage aussi pétillant que Papa Wilson, où une kyrielle de leurs chansons (de Wouldn’t it be nice à Heroes and villains) se retrouvent piratées au son d’une flûte divagante. Ailleurs, les choeurs haletants pillent les Zombies psychédéliques de l’inoubliable Odessey and oracle (sur Stay away from my mother), le Serge Gainsbourg d’Initiales BB encanaille le The Coldest night of the year de Barry Mann et Cynthia Weil, légendaire couple de songwriters new-yorkais. Avec Succumb, insolite édifice tenant autant du lupanar que du foyer pour chastes jouvencelles, la licence sensuelle se marie miraculeusement aux lys en fleur.
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