Publiée fin novembre par une spectatrice interloquée par le tableau « Thérèse Rêvant » du peintre Balthus, la pétition a rassemblé plus de 10 000 signatures. Cette semaine, le Metropolitain Museum of New York a fait savoir qu’il ne retirera pas le tableau de ses murs.
Dans sa critique d’une exposition de Balthus en 2013, qui portait sur sa passion pour les chats, le Guardian pointe une composante supplémentaire du travail du peintre polonais : sa « fascination excessive pour les jeunes filles tout justes pubères. » Présentés au Metropolitan Museum of Art de New York, certains tableaux de l’exposition étaient accompagnés de pancartes mettant en garde contre leur nature « perturbante ».
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C’est une mise en contexte similaire que demande Mia Merrill, entrepreneuse new-yorkaise de 30 ans interpellée par un tableau de Balthus, de son vrai nom Balthasar Klossowski, qu’elle découvre un weekend lors d’une visite au Metropolitan Museum of Art. Le tableau de 1938 Therèse Rêvant dépeint Thérèse Blanchard, voisine du peintre à Paris âgée à l’époque d’une douzaine d’années. Elle est représentée étendue sur une chaise, les mains sur la tête, sa jupe se relevant pour dévoiler l’intérieur de sa cuisse et sa culotte en coton blanc. « J’ai été choquée de voir un tableau dépeignant une très jeune fille dans une position sexuellement suggestive, écrit Mia Merill dans une pétition postée sur le site Care2 le 30 novembre. Le tableau de Balthus Thérèse Rêvant est un portrait évocateur d’une jeune fille pré-pubère se détendant sur une chaise avec les jambes en l’air et ses sous-vêtements en pleine vue. »
« Une opportunité de conversation »
La pétition, qui a déjà récolté plus de 10 000 signatures, s’intitule « Retirez le tableau suggestif de Balthus représentant une fille à peine pubère, Thérèse Rêvant. » Mia Merrill met en parallèle cet événement avec le mouvement #MeToo et le « climat actuel d’agressions sexuelles et d’accusations d’agressions qui deviennent de plus en plus publiques », accusant le Met de soutenir le voyeurisme et l’érotisation des jeunes enfants. Interrogé par le New York Post, un porte-parole du Met a annoncé que le musée ne pliera pas à la demande de Mia Merrill : « Des moments comme ceux-ci ouvrent une opportunité de conversation, a déclaré Kenneth Weine. Notre mission est de collecter, étudier, conserver et présenter des oeuvres d’art significatives de toutes les époques et toutes les cultures afin de connecter les gens à la créativité, à la connaissance et aux idées. »
Cette prise de position a été soutenue par la Coalition Nationale contre la Censure, qui qualifie cette demande de censure de « contre-productive » : « Historiquement, le corps féminin, nu ou habillé, a été un sujet central dans le monde de l’art à travers toutes les cultures, rappelle un rapport de la Coalition, publié le 4 décembre. Il a aussi généré de nombreuses protestations et mises en gardes contre son risque de corruption. Attaquer des oeuvres d’art ne fait qu’entraver la discussion globale qui doit avoir lieu afin de se confronter à la réalité du harcèlement sexuel et des abus. »
La Coalition rappelle aussi le rôle des institutions culturelles, qui est de « faciliter un engagement du public diversifié grâce à un riche panel de cultures et d’objets, en les présentant et les contextualisant (…) Nous continuerons de soutenir les institutions culturelles qui permettent aux membres du public de se faire leur propre avis sur ce qu’ils considèrent comme « ‘choquant.' » Une position largement partagée sur les réseaux sociaux : parmi les 230 commentaires sous la pétition de Mia Merrill, une utilisatrice l’interpelle en lui demandant si elle souhaite « un retour au Moyen-Age ».
Seriously?! Is it the most adept way to critically question the history of art and its darkest aspects? You should also censure the Greek and Italian sculptures and paintings where you can you see young boys penis and girls breast. Are you bringing us back into the middle age?
— Eimear O'Shea ☘️🇮🇪🏳️🌈🇺🇸🐶💚 (@Eimear_Shea) December 5, 2017
https://twitter.com/dave__miranda/status/937637084357124096
La demande d’une mise en contexte plus précise
En réponse au refus du Met, Mia Merrill a publié une mise à jour de sa pétition initiale, insistant sur le fait qu’elle ne souhaite pas la censure du tableau mais une présentation plus éclairée : « Je ne demande pas que ce tableau soit censuré, détruit ou banni du public. Je demande au Met de sérieusement considérer les conséquences qu’a la présentation de certaines oeuvres d’art sur leurs murs, et d’être plus consciencieux dans la contextualisation de leurs pièces pour le public. » Elle préconise la mise en place d’une phrase supplémentaire dans la description du tableau, comme « certains visiteurs peuvent trouver cette oeuvre choquante et perturbante, à la lumière de la fascination artistique de Balthus pour les fillettes. »
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