A Montreuil, l’exposition “J’aime regarder les filles” nous plonge en plein voyeurisme : travaux plastiques, photographies d’anonymes ou d’artistes dévoilent les femmes capturées à la volée, la jupe relevée… Art ou luxure ?
On qualifie de « photographie anonyme » les images issues des albums personnels du quidam qui les a prises. Elles sont recherchées par les collectionneurs parce qu’elles sont souvent drôles, vintage à souhait et parfois même des femmes s’y dénudent. Enfin, plutôt, on y trouve des portraits volés de femmes, captées par des amateurs aguerris ou des passants surpris qui dégainent leur appareil au “bon” moment. Coup d’oeil opportun pour celui qui voit, ou regard obscène d’un passant malavisé ?
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L’exposition J’aime regarder les filles à la galerie Lumière des Roses, à Montreuil, regroupe les œuvres d’art ignorées des anonymes qui se sont un jour essayés au voyeurisme, aux côtés de travaux d’artistes reconnus. La galerie Lumière des Roses questionne ainsi notre rapport au voyeurisme : sommes-nous d’innocents et opportuns spectateurs ou bien ces photographes étaient-ils de dangereux pervers ? Où se situe la limite entre l’oeil qui remarque et celui qui observe avec concupiscence ?
“J’aime regarder les filles”
… ou plutôt sous les jupes des filles. Les images présentées à l’exposition J’aime regarder les filles sont drôles, osées mais aussi dérangeantes : les femmes sont dévoilées à leur insu. Sur le papier glacé s’illustre leur perception par le photographe, qui est entré sans permission dans l’intimité de ces mannequins d’une seconde. En témoignent les images d’un photographe amateur à Brighton à la fin du XIXème siècle, grand aficionado de jupons relevés.
Ces images volées côtoient les travail de photographes professionnels qui se sont penchés sur le voyeurisme à l’occasion de cette exposition : on note la présence de L.O.R, dont les œuvres sont des composés de tissus et photographies anciennes, ou encore les images du parisien Olivier Kern. On y croise aussi la photographe Merry Alpern, présente au catalogue du MoMa et dont le projet Dirty Windows sur les prostituées à Manhattan a été réalisé à travers des fenêtres où l’on entrevoit la passe, en bons voyeurs. Ces femmes saisies à la volée exposent et vendent leur nudité, mais c’est ici leur image qui leur est dérobée.
J’aime regarder les filles questionne le concept même du voyeurisme, le passage de simple observateur à celui de regard concupiscent qui marque le virage du coup d’oeil déplacé à l’obscène ou l’obsessionnel. Parmi les dizaines d’images, on se forge une réponse de toutes les visions présentes… pour finalement se demander si l’on était pas nous-même le voyeur au cœur de cette galerie.
« J’aime regarder les filles », jusqu’au 9 décembre à la galerie Lumière des Roses (12-14 rue Jean-Jacques Rousseau 93100 Montreuil)
France, 2017. Lightbox. 24 x 35 cm
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