Rendez-vous est pris avec Sky Saxon chez Mars Bonfire. Sky Saxon ? Mars Bonfire ?? Le premier fut le chanteur-leader des Seeds, groupe de garage-rock psyché de la fin des années 60 qui eut avec Pushin’ Too Hard un hit figurant sur la légendaire compile Nuggets. Le second a écrit et composé Born to Be […]
Rendez-vous est pris avec Sky Saxon chez Mars Bonfire. Sky Saxon ? Mars Bonfire ?? Le premier fut le chanteur-leader des Seeds, groupe de garage-rock psyché de la fin des années 60 qui eut avec Pushin’ Too Hard un hit figurant sur la légendaire compile Nuggets. Le second a écrit et composé Born to Be Wild, hit biker de Steppenwolf remarqué sur la BO de Easy Rider et qui, outre son riff irrésistible, comprend la fameuse ligne “heavy metal thunder” qui donna son nom au genre heavy metal. Sky Saxon et Mars Bonfire sont quasiment inconnus mais ces deux chansons ont fait vibrer le monde entier.
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J’arrive devant la modeste maison de Mars Bonfire, dans une rue calme et anonyme, pas loin de Sunset Boulevard. Mars est un père de famille à la coule : barbiche, T-shirt, bermuda, tongs, il joue de la guitare au milieu de ses gosses, fume un petit pèt’ de temps à autre. Il continue la musique, mais tranquille, pour lui, sans enjeu professionnel. Il ne travaille pas, vit peinard des seules rentes de Born to Be Wild depuis des années. Pas dans le luxe, mais avec un petit confort et un lifestyle suffisamment ensoleillé pour ne pas avoir besoin de se bouger plus. Son pote Sky Saxon, c’est autre chose. Cheveux jusqu’aux épaules, barbe et moustache, regard injecté de folie, babil incessant et parfois proche d’un doux délire, il ressemble au croisement de Jésus-Christ et de Charles Manson. Sur les photos originelles des Seeds, il avait les cheveux courts, la coupe au bol des Beatles, portait le costard. Mais en écoutant les Seeds, on sentait dans son chant la teigne possédée, à mi-chemin du rhythm’n’blues et du psychédélisme. Les Seeds n’ont pas transformé l’essai Pushin’ Too Hard, dans la tradition des comètes rock de la mouvance Nuggets, et en vieillissant Saxon a continué en solo sous le nom de Sky Sunlight Saxon, vendu de moins en moins de disques, de plus en plus noyé dans son brouillard mystico-lysergique, jusqu’à sa mort en 2009.
Je le rencontre à l’occasion d’un album solo sur le label français New Rose, mais je veux surtout lui faire raconter les sixties-seventies, l’âge d’or du garage-rock et des riots sur Sunset Strip. Le chanteur parle, parle, parle, mais je comprends vite son surnom de Sky : il est perché tout là-haut, dans quelque nuage d’acide dont il n’est jamais redescendu. Cet après-midi-là, je rencontre deux typologies de spécimens rock’n’rolliens des sixties, deux façons de survivre à son seul et unique tube, deux manières de vieillir en rock. Sky Saxon, très Gloria Swanson dans Sunset Boulevard, grand brûlé du soleil de la gloire et des effets du LSD, condamné à radoter éternellement son moment warholien et ses illusions perdues. Mars Bonfire, heureux gagnant du loto rock, les pieds toujours en contact avec le sol, préférant mener une vie tranquille que se prendre pour la réincarnation de Dylan ou Leiber & Stoller. Entre le ciel et Mars, que préférer ? Sur le chemin du retour, j’enchaîne Born to Be Wild et Pushin’ Too Hard en chantant les refrains à tue-tête. Deux fucking morceaux. Merci, Sky et Mars, pour ces brèves mais précieuses étincelles.
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