Le Mucem de Marseille accueille, jusqu’au 4 février 2018, l’exposition « Nous sommes foot ». Riche – plus de 400 oeuvres – elle se veut également ambitieuse en déconstruisant les a priori liés au sport le plus populaire au monde.
On pourrait citer la glacière de Marcelo Bielsa, la publicité de Zinedine Zidane pour la chaîne de magasins Leader Price ou les incroyables photos de tifosi qu’a collectées le sociologue italien Daniele Segre. On pourrait aussi évoquer l’histoire de la formation de l’équipe du Front de libération nationale algérien de football le 13 octobre 1958 ou celle du match Serbie-Albanie du 15 octobre 2014 où une bagarre éclata entre les joueurs après l’irruption d’un drone sur le terrain.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
On pourrait aussi ne parler que de Patrice de Peretti, dit « Depé », l’un des seuls supporters au monde (de l’OM en l’occurrence) à avoir donné son nom à une tribune, le célèbre virage Nord du stade Vélodrome de Marseille. Depé était l’ultra parmi les ultras, celui qui était torse nu, mégaphone à la main, même par – 12 degrés à Berlin, rappelle Vice. Il vécut pour sa passion jusqu’à ce qu’elle finisse par lui ôter la vie. Mais pas son statut d’icône. C’est après avoir jeté un œil curieux à tout cela que la phrase portée en étendard de Pier Paolo Pasolini, dévoile tout son sens : « Le football est la dernière représentation sacrée de notre temps. »
Lutter contre les a priori liés au football
Cette phrase, on la retrouve en plein cœur de la très belle et très riche exposition Nous sommes foot qui ouvre le 11 octobre 2017 et qui se tient jusqu’au 4 février 2018. Et quelle autre ville en France que Marseille pouvait accueillir une telle expo ? Plus de 400 œuvres ont été collectées par les commissaires avec une ambition assumée : celle de lutter contre « nos a priori » sur ce sport « abîmé par le foot business » mais qui « reste avant tout une pratique et une passion populaires », rappelle l’un d’entre eux, Gilles Perez.
L’exposition, conçue par le collectif Democracia, a pour objectif de nous plonger dans les arcanes du football. Et quoi de mieux pour cela que de partir en exploration en son propre cœur ? Le visiteur est alors guidé dans ce qui ressemble aux entrailles d’un stade de foot, dans onze sections différentes, divisées en 3 grandes thématiques : la « religion », « l’engagement » et le « mercato ».
Religion, engagement et mercato
C’est l’engouement du supporter qui est mis en avant dans la première partie ; celui pour une équipe, l’OM, véritable poumon de la cité phocéenne, ou même d’un seul joueur Diego Armando Maradona, à qui la ville de Naples dédie des autels. Sans en oublier certains excès comme en témoignent deux barres de fers récoltés après les scènes de bataille rangées survenues en marge du match Angleterre-Russie, qui a eu lieu à Marseille lors de l’Euro 2016.
La deuxième partie sur l’engagement, rappelle comment le football et la politique ont des frontières ténues. Des photos incroyables jaillissent aux yeux des visiteurs, comme celle d’une tenue de sport issue du camp de concentration de Mauthausen ou de footballeurs faisant grève lors de Mai 68.
La troisième partie aborde l’inévitable essor du foot business que pleurent encore beaucoup de nostalgiques du ballon rond. Nous, on préférera se souvenir de cette illustre citation d’Albert Camus à la place, de nombreuses fois reformulées. En 1953, l’auteur de l’Etranger, a écrit dans le Journal du Racing universitaire algérois un billet intitulé La Belle Époque qui dit :
« Car, après beaucoup d’années où le monde m’a offert beaucoup de spectacles, ce que finalement je sais sur la morale et les obligations des hommes, c’est au sport que je le dois, c’est au Racing universitaire algérois que je l’ai appris. »
Illustres marraine et parrain
Soixante-quatre ans ans plus tard, ces mots gardent tout leur sens à l’évocation de la marraine de l’exposition, Honey Thaljieh, capitaine de la toute première équipe nationale de Palestine (la Fifa reconnaît le pays !) et du parrain, l’équipe de l’Alma de Africa. Évoluant en troisième division, elle est constitué de réfugiés et évolue avec l’article 14 de la Déclaration universelle des droits de l’homme floqué sur le maillot. Une équipe, à l’image de l’Afro Napoli en Italie, où la diversité permet à ceux qui ont le moins de partager plus que du sport : des valeurs morales et sociales.
Le reste de la programmation est à retrouver ici.
« Nous sommes foot » au Mucem de Marseille du 11 octobre 2017 au 4 février 2018
{"type":"Banniere-Basse"}