Un hold-up qui tourne mal, le siège d’une falaise où crépitent les armes. Un polar abstrait et maniériste, innervé par l’amour du cinéma de genre seventies.
Le premier roman de Jean-Patrick Manchette, coécrit en 1971 avec Jean-Pierre Bastid, était le support idéal pour Cattet et Forzani (Amer, L’Etrange Couleur des larmes de ton corps). Il a pour particularité d’être raconté en temps réel, minute par minute. Quoi de plus excitant pour des cinéastes aussi conceptuels et formalistes ?
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L’histoire que relate le film est très simple : un hold-up sur une route, des brigands contraints de se réfugier dans un mas isolé. Mais voilà, le lieu est dominé par une créature fantasque (Elina Löwensohn, ex-égérie nineties du cinéaste Hal Hartley, tout à fait naturelle dans le rôle). Tout déraille et tout le monde veut s’emparer du butin : des lingots d’or. La quête folle de l’or devient quasi métaphysique, et la passion pour le giallo des Cattet-Forzani est libre de toute entrave : gros plans, images psychédéliques, musique de Morricone époque 1970, le film vire au western-spaghetti dans un bruit d’orchestre défoncé au LSD.
Une question demeure : comment un spectateur comme l’auteur de cette critique, que le cinéma bis des années 1970 a toujours laissé un peu froid, peut se laisser prendre à ce plaisir-là ? C’est sans doute que Laissez bronzer les cadavres n’est pas froid, lui, malgré les corps sans vie qui s’amoncellent. Que les acteurs (notamment Stéphane Ferrara, ancien boxeur qui a joué dans Détective de Godard) expriment des sentiments, des vrais, humains. Ce ne sont pas des robots. Et que le film déborde d’idées de cinéma, comme celle de l’or qui fond et gicle sous le feu des mitraillettes.
Laissez bronzer les cadavres d’Hélène Cattet et Bruno Forzani (Fr., Belg., 2017, 1 h 30)
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