“Même si une pochette est vraiment atroce, elle contient quelque chose qui permet de faire l’association avec la musique… C’est vraiment à Vaughan Oliver que l’on doit ce mélange réussi de tous les ingrédients.” Dix ans séparent cette citation d’Ivo l’homme phare de 4AD et la pochette insupportable du premier album de Sheer. […]
« Même si une pochette est vraiment atroce, elle contient quelque chose qui permet de faire l’association avec la musique… C’est vraiment à Vaughan Oliver que l’on doit ce mélange réussi de tous les ingrédients. » Dix ans séparent cette citation d’Ivo l’homme phare de 4AD et la pochette insupportable du premier album de Sheer. Sans doute la plus terrible que Vaughan Oliver ait jamais conçue, tout imprégnée d’esprit body-art. En parcourant le livret, on remonte un processus d’ablation d’une excroissance depuis la débectante cicatrice fraîchement recousue qui monopolise la face avant du disque, jusqu’au non moins charmant kyste situé au dos de la pochette. On vous fait grâce des deux étapes intermédiaires et des deux photos d’arborescence cartilagineuse servant d’intercalaires à ce joyeux précis de la dermatochirurgie. A en croire Ivo, il faudrait donc voir une interprétation des sentiments véhiculés par la musique de Scheer. Excepté un rapprochement archifantaisiste avec le problème irlandais du Nord (les cinq du groupe viennent du comté de Derry) ou encore une allégorie sur les blessures métaphysiques qui hantent les textes d’Audrey la chanteuse , on ne trouvera aucune symbolique valide de la pop d’Infliction dans ce design astringent. Tout juste peut-on comparer le frisson provoqué par un tel graphisme à celui que fait courir la voix d’Audrey lorsqu’elle fantasme une version rageuse du chant d’Harriett des Sundays (Demon, Baby size), ou lorsque Scheer s’empare des cordes pour s’autoriser l’onirisme et laisser filtrer dans un Goodbye final quelques instincts de folklore celtique. Dans ces moments, Scheer sort de son rôle de néo-Breeders sans histoire ni vitalité et s’écarte des voies déjà piétinées par Veruca Salt pour enfin délivrer des chansons équilibristes goûtant, douces-amères, au plaisir de l’urgence tout en sachant la tristesse tout près (In your hand). Frayant avec la chute, ces mélodies s’acoquinent d’arrangements dérangeants qui, sans causer le moindre vertige, ont au moins la faculté de s’extirper du ventre mou du championnat noisy à voix féminine, cette zone franche inintéressante où se côtoient dans des duels sans intérêt des groupes aux ambitions lâchement modestes.
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