Un certain regard.Agréable surprise. Alors qu’on n’attendait plus grand-chose d’Hal Hartley, il revient en grâce avec un film très différent de ses précédents : une fable contemporaine qui raconte la fascination réciproque qu’éprouvent un monstre pas si méchant et une ingénue moins gourde qu’elle n’en a l’air. Au début, quand on voit le monstre mélancolique […]
Un certain regard.
Agréable surprise. Alors qu’on n’attendait plus grand-chose d’Hal Hartley, il revient en grâce avec un film très différent de ses précédents : une fable contemporaine qui raconte la fascination réciproque qu’éprouvent un monstre pas si méchant et une ingénue moins gourde qu’elle n’en a l’air.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Au début, quand on voit le monstre mélancolique et atrabilaire soliloquer sur sa triste condition de reclus tueur d’humains, on ne peut s’empêcher de se demander quelle nouvelle couillonnade « philosophique » a concoctée Hartley, cinéaste désormais mal aimé, après avoir été une idole auteuriste au début des années 90. Mais les choses ne tardent pas à s’arranger avec l’arrivée de Sarah Polley, la jeune fille des Beaux lendemains d’Egoyan, journaliste new-yorkaise chargée par sa rédactrice en chef de pister l’affreux jojo, déjà responsable de la disparition d’une équipe de reportage.
La grande qualité du film est de savoir s’amuser de lui-même, de ne pas prendre trop au sérieux sa parabole sur le contrôle des médias et le devenir incertain d’une humanité en voie de normalisation complète. Si certaines choses sont tout de même trop dites, surtout quand survient l’habituel raisonneur à la Hartley, ici un étrange docteur Artaud (!), seul capable de délivrer le monstre de son immortalité, No such thing a le charme languide des projets improbables, des films de commande qui permettent à un cinéaste de sortir de son univers d’auteur pour jouer avec des motifs nouveaux.
Initié par un producteur islandais dans le cadre d’une série de « films de monstres », No such thing est drôle quand il utilise les conventions du conte de fées et donne sa version de King Kong, et assez touchant quand il ne cache pas sa sympathie pour ses personnages d’immortel alcoolique, de naïve en mal d’amour et de reconnaissance ou de créature médiatique toujours entre deux hystéries.
Composée par Hartley lui-même, la partition est tendrement postmoderne, très Music for airport, et le film contient un magnifique plan d’avion en plein vol. Le plus agréable est de retrouver le talent « ligne claire » d’Hartley et sa capacité à camper des personnages complexes en deux attitudes et trois lignes de dialogue, dans un univers nouveau qui le fait échapper à sa routine. No such thing est un bon petit film, pas méchant, pas prétentieux, une greffe intéressante qui ne la ramène pas plus que nécessaire : autant de handicaps pour être apprécié à Cannes.
{"type":"Banniere-Basse"}