Pendant toutes les années 70, Deep Purple servit de jeu de quilles à la critique. Mais même si les raisons sont étayées, on ne peut crier inlassablement avec les loups sans se sentir à un moment détroussé de ses libertés de penser, d’aimer, de voter, de pisser, etc. Pour être honnête, Pearl Jam, on s’en […]
Pendant toutes les années 70, Deep Purple servit de jeu de quilles à la critique. Mais même si les raisons sont étayées, on ne peut crier inlassablement avec les loups sans se sentir à un moment détroussé de ses libertés de penser, d’aimer, de voter, de pisser, etc. Pour être honnête, Pearl Jam, on s’en fiche pareillement. Mais pour des raisons voisines, on va se racler le cervelet jusqu’à y trouver le filon d’une approbation ténue. Et on y arrivera, juste pour énerver la meute. Il va falloir faire abstraction de quelques notions de pureté, de noblesse, de dentelle… Il va falloir apprendre à conjuguer à l’imparfait du démonstratif, à composer avec des visées commerciales bon teint. Prenant appui sur leur indéniable savoir-faire, sur leur statut d’ouvriers consciencieux, le spéléologue remontera finalement en surface de quoi alimenter un éloge décent. Interceptons par exemple ce Sometimes d’ouverture, qui déjà a le bon goût de ne pas frapper là où on l’attend, tout en douceurs acoustiques, comme une intrusion désormais familiale du Neil Young folk chez les ferrailleurs de Seattle. A une faconde souvent limitée, Pearl Jam sait allier un réel appétit d’aventure pour gommer les carences de son univers. A d’autres Hail hail, Habit ou Mankind, radicalement récités au pied de la lettre grunge, ils accolent les torsades fleuries d’In my tree ou Red mosquito pour justifier une carrure de caïds acquise de force plus que de droit. On pense de plus en plus au Led Zeppelin de Houses of the holly ou Physical graffiti, à ces mille-feuilles de plomb et de crème, pas toujours digestes mais à l’effet assuré. Sans sourciller, on affirmera que Pearl Jam est un bon groupe, de ceux qui comptent. Un peu comme des comptables certes, comme des conteurs aussi. Leurs histoires sont connues, percluses de grosses ficelles, mais Eddie Vedder et Stone Gossard savent y mettre le ton. Au génie, ils substituent l’aplomb entêtant de Present tense ou les souvenirs de route bien digérés de Who are you (Nusrat Fateh Ali Khan) et Smile (Neil Young encore) pour éviter le gouffre béant de l’ennui et du futile. Un coup à droite, un coup à gauche, un coup de sang, un coup de blues et parfois même quelques parcimonieux coups de théâtre. Leur équilibre est instable, dangereux, sans cesse à la merci d’une guitare pataude ou d’une pitrerie vocale. Miraculeusement, No code accuse quelques flottements, les dompte et ne prend pas l’eau.
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